La Presse Anarchiste

Mouvement social

La Tri­bune de Chi­ca­go, grand organe capi­ta­liste, fait remar­quer que depuis le 1er jan­vier, les plou­to­crates ont don­né 4.075.750 dol­lars pour les uni­ver­si­tés et col­lèges, 789.000 dol­lars pour les églises, 3 mil­lions de dol­lars pour les musées. Le jour­nal ajoute : « Des faits comme ceux-ci sont à la confu­sion de cette affir­ma­tion des tra­vailleurs que le capi­tal est un ins­tru­ment de tyran­nie contre la classe pauvre. Il n’y a pas de pays où la classe riche soit plus géné­reuse que chez nous : elle paye au peuple un bel inté­rêt pour l’argent qu’elle gagne par ses propres moyens. »

« Hypo­cri­sie, répond The All­tru­rian. L’argent don­né par les riches, d’a­bord est pris aux pauvres, ensuite est employé en dépenses qui pro­fitent seule­ment aux riches, uni­ver­si­tés et col­lèges pour les jeunes gens for­tu­nés, églises pour abru­tir le peuple, etc. De plus, les capi­ta­listes font bien leurs comptes, et s’ils laissent tom­ber en aumônes et en dona­tions 10 mil­lions de dol­lars par an, ils expriment de la nation, dans le même espace de temps, 45 mil­liards 340 mil­lions de dol­lars, soit plus de 226 mil­liards de francs, en bud­get public et en recette de com­pa­gnies à mono­pole. Encore, les loyers et les béné­fices des usines n’entrent-ils pas dans ce total dont ils triplent le montant. »

The All­tru­rian, le nou­veau cama­rade dont nous tirons ce qui pré­cède, paraît chaque semaine, depuis le 22 juin der­nier, a Colom­bus Junc­tion, dans l’Io­wa, au centre des États-Unis.

Il ne faut pas le confondre avec The Altruist, organe men­suel d’un groupe de com­mu­nistes vivant sui­vant leurs théo­ries, comme il en existe plu­sieurs dizaines aux États-Unis. The Altruist paraît chaque mois à Saint-Louis (Mis­sou­ri).

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Edward, ouvrier de la Com­pa­gnie du che­min de fer Paci­fique (États-Unis), ren­voyé pour fait de grève, vient cher­cher de l’ou­vrage dans son pays, l’An­gle­terre. Là les Com­pa­gnies aux­quelles il s’a­dresse lui répondent qu’on ne l’emploiera pas parce qu’il figure sur la liste noire (bla­ck­list) où sont notés les meneurs ouvriers. « Qu’en pen­sez-vous ? » ajoute The Coming Nation, qui rap­porte le fait. Les membres des Com­pa­gnies de che­mins de fer ne forment-ils pas une asso­cia­tion de mal­fai­teurs inter­na­tio­naux ? Oh non ! »

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Le gou­ver­neur de l’É­tat du Mas­sa­chu­setts a cru faire acte de socia­lisme en ache­tant 2000 acres (envi­ron 1500 hec­tares) de maré­cages et en invi­tant les sans-tra­vail à venir en tirer leur sub­sis­tance. L’ap­pel n’a pas eu de suc­cès ; on a déjà fait plus de cent fois des ten­ta­tives de ce genre qui ont tou­jours échoué. Rien de plus natu­rel. Le tra­vail n’est pas une force sur­na­tu­relle qui puisse faire sor­tir du blé d’un désert. Nous ne récla­mons pas le droit au tra­vail qui ne signi­fie rien, mais la mise en com­mun des ins­tru­ments de tra­vail, c’est-à-dire de la bonne terre, des outils, des machines.

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La pro­pa­gande fait des pro­grès. Elle a pour centre les dis­tricts miniers de l’Ouest et les ports et les grandes villes de l’Est, c’est-à-dire les agglo­mé­ra­tions où les émi­grants étran­gers viennent appor­ter les idées révo­lu­tion­naires. Dans l’Ouest, le Fire­brand de Port­land (Ore­gon) a des cor­res­pon­dants et des abon­nés dans la Cali­for­nie, l’U­tah, le Ter­ri­toire indien, etc. Là, plu­sieurs des divi­sions poli­tiques de l’Ouest amé­ri­cain ne sont pas encore éri­gées en États ; les groupes d’ha­bi­tants et d’é­mi­grants y prennent l’ha­bi­tude de se pas­ser de légis­la­teurs élus ; ils peuvent aus­si faire des inno­va­tions har­dies dont per­sonne ne leur demande de compte. C’est ain­si que les mineurs du Wyo­ming ont pu don­ner aux femmes l’é­man­ci­pa­tion civile et poli­tique. Dans l’Est, la pro­pa­gande se fait en langues étran­gères plus encore qu’en anglais. Les deux centres prin­ci­paux sont les grandes villes de New York et de Chi­ca­go. Cha­cune de ces villes a un pério­dique com­mu­niste anar­chiste en langue alle­mande : Chi­ca­go a le Vor­bote, New York le Frei­heit. New York pos­sède de plus un impor­tant jour­nal heb­do­ma­daire en langue espa­gnole, El Des­per­tar (le Réveil). El Des­per­tar a publié la tra­duc­tion espa­gnole du mani­feste de l’al­liance com­mu­niste anar­chiste-socia­liste de Londres[[Le numé­ro 17 des Temps Nou­veaux ont publié le réc­ti­fi­ca­tif suivant :

Nous avons reçu la lettre suivante :

« Dans le n°16, page 3, colonne 2, se trouvent des remarques inexactes sur le mani­feste de l’« Alliance anar­chiste com­mu­niste » de Londres.

« La tra­duc­tion espa­gnole a bien été publiée par El Deper­tar, mais le texte n’a pu en être publié dans Soli­da­ri­ty, qui ne paraît plus.

« Dans ce jour­nal, alors qu’il parais­sait, a bien été publié, avec ce titre d’« Alliance », un pro­jet de socié­té ou orga­ni­sa­tion inter­na­tio­nale, éla­bo­ré par Mala­tes­ta, mais les deux choses : pro­jet et mani­feste, n’ont rien de commun.

« Ce der­nier n’est pas un pro­gramme, mais une bro­chure expli­ca­tive, n’ayant rien à voir avec les idées spé­ciales des cama­rades Mala­tes­ta et Mer­li­no. — Cor­dia­le­ment. »]], tan­dis que Soli­da­ri­ty de New York en publiait le texte anglais. Ce mani­feste, ins­pi­ré par Mala­tes­ta et Mer­li­no, est un plai­doyer pour l’u­nion de tous les com­mu­nistes révo­lu­tion­naires, c’est-à-dire de tous ceux qui veulent la conquête de l’é­ga­li­té maté­rielle par la grève géné­rale, défi­nie comme la main­mise par les tra­vailleurs sur les ins­tru­ments de pro­duc­tion. Les rédac­teurs d’El Des­per­tar ont insis­té sur cette idée en de nom­breux articles, sai­sis­sant, pour la répandre, l’oc­ca­sion four­nie par les grèves impor­tantes qui viennent d’a­gi­ter New York, la grève des ouvriers du che­min de fer de Brook­lyn, et celle des ouvriers en tabac qui s’est pro­lon­gée pen­dant quatre mois. L’é­man­ci­pa­tion des tra­vailleurs par eux-mêmes, l’é­ga­li­té et la liber­té à la place de la tyran­nie capi­ta­liste et de la hié­rar­chie gou­ver­ne­men­tale, la civi­li­sa­tion com­mu­niste au lieu de la socié­té auto­ri­taire, tel est le pro­gramme d’El Des­per­tar, et le nôtre aussi.

À Tam­pa (Flo­ride), paraît depuis plus d’un an el Escla­vo, dont nous avons déjà par­lé. El Escla­vo et El Des­per­tar sont les deux organes de pro­pa­gande en langue espa­gnole, les plus impor­tants de l’A­mé­rique du Nord. Au Mexique, la police du pré­sident Por­fi­rio Diaz empêche la fon­da­tion d’un jour­nal révo­lu­tion­naire, et quand elle le peut, l’in­tro­duc­tion des publi­ca­tions socia­listes des États-Unis. À Cuba, l’or­gane ouvrier El Archi­vo social, paraît irré­gu­liè­re­ment et ses rédac­teurs sont per­sé­cu­tés. Mar­ti­nez Cam­pos le fait arrê­ter à la douane et nous n’en avons pas reçu un seul numéro.

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