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Chaque État capitaliste veut avoir son cas Sacco et Vanzetti ; c’est une mode qui gagne lentement mais sûrement les bourreaux capitalistes de tous les pays.
Comme jadis le révolutionnaire irlandais Mac Swinzey, l’objecteur de conscience R.A. Simoens a été froidement conduits à la mort, jour après jour, un mois durant, par la volonté implacable de toute une bourgeoisie il qui parvenait chaque matin des nouvelles de son supplice. Ceci dans les contrées élues de la liberté et de la démocratie que sont la Grande-Bretagne et la Belgique !
En France, le chômeur Fritsch, l’ouvrier Legay ont été abattus sans la moindre provocation par les flics d’Herriot et de Chiappe, et l’on voit encore parader aujourd’hui dans les rues d’Ivry et d’Orléans les « bêtes noires » qui les ont tuées, et ont été félicités pour cela par leurs supérieurs. L’un des assassins de Marcel Legay, à Orléans, est même encore membre du Parti Radical, et comme tel, adhérent au dérisoire « Comité Marcel Legay » qui a précisément pour but de réclamer contre le coupable des sanctions administratives. La veulerie du peuple français est sans borne !
Aux États-Unis se poursuivent les crimes de la justice capitaliste contre Mooney et Billings, contre les huit nègres de Scotborough, contre les trente mineurs du Kentucky et bien d’autres horreurs également impunies.
Ainsi partout où domine le capitalisme, sous quelque forme que ce soit, se répètent les mêmes méthodes : Pendaison ! Fusillation ! Chaise électrique ! La haine de la bourgeoisie ne connaît pas de frein. Lorsqu’il s’agit de venir à bout d’un lutteur de classe, tous les moyens sont bons, la légalité, les serments professionnels sont oubliés. La leçon du cas Szallaï et Fürst est incontestable : devant la justice bourgeoise il n’y a pas de place pour une demande de grâce, pas de place pour un « oui ! », mais seulement pour un « non ! » éternel.
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Des employés du ministère de l’Intérieur ont raconté après l’exécution que le ministre de la Justice Zsitvay se trouvait en conversation avec le ministre de l’Intérieur Kerosztes-Fischer lorsque leur parvint la nouvelle de l’arrestation de Fürst et Szallaï. Tous deux ont immédiatement convenu entre eux que « les deux drôles devaient être pendus pour faire un exemple ». Lorsque Zsitvay rendit compte à Horthy de la question, et lui soumit ses projets patriotiques en ce qui concernait les deux communistes arrêtés, la réponse fut : « Allez‑y carrément ! »
Zsitvay fil alors venir l’avocat-général Barothy, le chargeant de dresser l’acte d’accusation devant la Cour d’Assises, mais celui-ci refusa, déclarant que comme juriste il estimait impossible de porter l’affaire devant la juridiction.
Le lendemain eut lieu chez le ministre de la Justice une entrevue spéciale où furent agitées les mêmes raisons d’État que précédemment. « La nation hongroise devait se protéger contre les attaques du bolchévisme etc. Après que l’avocat général Barothy eut donné connaissance du dossier, on consulta Patay, premier président à la Cour, qui déclara : « Excusez-moi, Excellence, mais la cause ne peut être portée en Cour d’Assises ; aussitôt que l’acte me parviendra, je me verrai forcé de le transmettre à mon collègue du Tribunal correctionnel qui est seul compétent. »
Et malgré tout, Fürst et Szallaï furent traduits en Cour d’Assises, sans tenir compte des protestations du président et de l’avocat-général. On entendit d’en haut, après que la séance eut été levée, le ministre de la Justice Zsitvay articuler sur un ton de menace : « Monsieur l’Avocat Général voudra bien, en tout cas, rédiger son acte d’accusation, et me le soumettre avant que l’expédition en soit faite, en y joignant le dossier. Monsieur l’Avocat Général m’a bien compris, n’est-ce pas ? » Zsitvay eut recours pour remplacer Patay à un charognard prêt à tout, le Président à la Cour, Ceza Töreky, qu’il fit revenir de vacances à cette seule fin. Celui-ci, après en avoir conféré avec le ministre de la Justice s’empressa d’écarter les défenseurs, de leur cacher les pièces du dossier, et les empêcha même de voir leurs clients, les communistes emprisonnés.
Jusqu’au début du procès les avocats ignorèrent quand et devant qui il aurait lieu. À leurs demandes réitérées, le secrétaire de Töreky n’avait qu’une réponse : « Je ne sais pas. Monsieur le Président ne nous a encore rien dit. » À cette même heure ledit Töreky était en train de distribuer des cartes d’entrée pour le procès. Et c’est seulement au milieu de la nuit, par une indiscrétion de journalistes que les défenseurs apprirent ceci : le procès devait avoir lieu le lendemain à huit heures du matin.
Après que Töreky eut prononcé sa sentence de mort, il posa à Szallaï cette question : « Demandez-vous grâce ? » Szallaï se tut. — « Répondez ! Demandez-vous grâce, oui ou non ? »
Et comme Szallaï restait de nouveau muet, Töreky cingla brutalement le condamné à mort avec ces mots : « Qu’y a‑t-il, vous ne répondez pas ? Avez-vous peut-être perdu votre présence d’esprit ? » Szallaï dit : « Je voudrais en causer avec mon avocat ». — « Je ne le permets pas. Répondez aussitôt ! » Un signe d’assentiment du défenseur, et l’instinct de conservation arrache douloureusement à Szallaï cette réponse étranglée : « Je demande… »
Quand Szallaï put parler à l’avocat Lengyel : « Je, vous remercie pour ce que vous avez fait pour moi » dit-il. « Je sais que vous avez agi pour le mieux, mais je regrette amèrement d’avoir laissé échapper une demande de grâce. Je réparerai cela. Je remplirai mon devoir. »
Fürst, pendant ce temps, remerciait aussi son avocat, Szöke : « Pendant votre discours, dit-il, l’espoir s’était éveillé en moi. Mais je suis bien vite revenu à moi. J’ai compris : il leur faut des cadavres. Au moins deux cadavres. C’était décidé d’avance. »
Ainsi ont été conduits à la potence Fürst et Szallaï. Ils sont morts en criant : « Vive la dictature du prolétariat ! »… Quand donc, prolétaire, rempliras-tu le vœu révolutionnaire de tes frères assassinés ?
[/(Kamzpfruf)/]