La Presse Anarchiste

De quelques aspects de l’organisation

1. Groupes par affinité ou organisation territoriales

La vie du mili­tant est par­ta­gée entre l’ha­bi­ta­tion (sa famille), le quar­tier ou le lieu de rési­dence, l’a­te­lier ou l’u­sine et les amis ins­pi­rés par les mêmes idées. Ces liai­sons les plus fré­quentes et les plus natu­relles, déter­minent, dans une large mesure, le choix de la forme de grou­pe­ment. Les groupes par affi­ni­té sont les plus répan­dus. Ils ont leurs avan­tages mais aus­si leurs défauts. Le simple fait de nous sen­tir plus atta­chés à cer­tains de nos cama­rades d’i­dées nous oppose aux autres et par­fois nous en éloigne. D’autre part, les petits groupes par affi­ni­té abou­tissent à un épar­pille­ment des forces.

Le groupe sur le lieu de tra­vail pré­sente cet avan­tage que la meilleure connais­sance des pro­blèmes quo­ti­diens concer­nant l’en­semble des tra­vailleurs per­met de mieux ajus­ter la pro­pa­gande et l’ac­tion à la réalité.

Mais c’est sur­tout le lieu de rési­dence, la loca­li­té ou le quar­tier, qui réa­lise les condi­tions néces­saires pour un tra­vail de dif­fu­sion des idées et de com­bat, social, stable et per­ma­nent. Donc, l’or­ga­ni­sa­tion ter­ri­to­riale doit être, à mon avis, le fon­da­men­tal de la struc­ture de la fédé­ra­tion anarchiste.

2. Spontanéité ou activité coordonnée

Nous connais­sons tous les mérites exa­gé­rés que beau­coup de nos pro­pa­gan­distes, et mêmes des théo­ri­ciens ont tou­jours attri­bués à la spon­ta­néi­té. Sans la nier tota­le­ment, nous devons nous rendre compte que la vie sociale et l’é­vo­lu­tion contem­po­raine imposent de plus en plus une acti­vi­té pla­ni­fiée, pro­gram­mée, coor­don­née, afin d’a­bou­tir à une plus grande efficacité.

3. Initiative ou attentisme

Ce qui dis­tingue phi­lo­so­phi­que­ment les anar­chistes de toutes les autres concep­tions, c’est la prio­ri­té que nous don­nons à l’i­ni­tia­tive indi­vi­duelle et col­lec­tive, anti­dote de l’au­to­ri­ta­risme, condi­tion sine qua non pour rendre toute auto­ri­té superflue.

Mal­heu­reu­se­ment, l’ex­pé­rience quo­ti­dienne nous a mon­tré que nous aus­si, comme tout le monde, avons l’ha­bi­tude d’at­tendre l’i­ni­tia­tive des autres pour… la réfu­ter, la cri­ti­quer, l’en­tra­ver et sou­vent la combattre.

Donc, les par­ti­sans de l’or­ga­ni­sa­tion doivent com­men­cer par com­battre en pre­mier lieu et en eux-même, l’at­ten­tisme paralysant.

4. Individualisme de doctrine et individualisme de comportement

D’ac­cord pour réfu­ter l’in­di­vi­dua­lisme comme doc­trine qui a fait tant de mal au mou­ve­ment. Mais il y a un autre indi­vi­dua­lisme pire que le pre­mier, et dont nous souf­frons tous. C’est celui qui nous pousse à mettre notre « moi » au-des­sus de tous, de négli­ger. volon­té des autres, de se sub­sti­tuer aux autres, de prendre des posi­tions sur l’en­semble. Là-des­sus, le com­bat à mener est beau­coup plus dif­fi­cile que celui que nous avons entre­pris contre le milieu social qui nous entoure et nous opprime.

5. L’unanimité ou la détermination de la majorité

Faux pro­blème et dis­cus­sions vaines. La vie demande des déci­sions afin d’a­gir. La recherche de l’u­na­ni­mi­té est la voie natu­relle qui mène à la cohé­sion, à l’har­mo­nie. Sur le plan idéo­lo­gique, le manque d’u­na­ni­mi­té abou­tit à la scis­sion, à la sépa­ra­tion. Sur le plan de l’ac­ti­vi­té pra­tique, si l’u­na­ni­mi­té ne se réa­lise pas, il ne reste que la déter­mi­na­tion de la majo­ri­té, autre­ment, toute acti­vi­té sérieuse, sou­te­nue et res­pon­sable d’une orga­ni­sa­tion qui ne vit pas à la petite semaine s’a­vère impos­sible. Mais le manque d’u­na­ni­mi­té n’a­bou­tit pas néces­sai­re­ment, ne doit pas abou­tir, à la scis­sion. Pour main­te­nir l’u­ni­té, il n’y a qu’une condi­tion à res­pec­ter par la majo­ri­té : les déci­sions n’en­gagent et n’o­bligent que ceux qui les prennent et les acceptent volon­tai­re­ment, et là, où les mino­ri­tés ne peuvent empê­cher l’ap­pli­ca­tion des déci­sions, tout en réser­vant le droit de cri­tique au sein de l’organisation.

6. A partir de quel moment les décisions deviennent-elles obligatoires ?

Dans l’or­ga­ni­sa­tion locale, chaque déci­sion prise à l’u­na­ni­mi­té ou par la majo­ri­té devient une obli­ga­tion immé­diate pour tous ceux qui l’ont libre­ment et volon­tai­re­ment for­mu­lée et accep­tée. Les congrès prennent leurs déci­sions sui­vant les déter­mi­na­tions des orga­ni­sa­tions par­ti­ci­pantes, après dis­cus­sion préa­lable d’un ordre du jour dûment éla­bo­ré et approu­vé. Néan­moins, les déci­sions des congrès ne deviennent valables pour l’en­semble et ne prennent un carac­tère obli­ga­toire pour ceux qui les ont libre­ment for­mu­lées ou accep­tées par la suite, qu’a­près le congrès et la rati­fi­ca­tion par les orga­ni­sa­tions inté­res­sées. En dehors de ces pro­cé­dés, il n’y à pas le fédé­ra­lisme et il ne pour­rait pas y avoir d’a­nar­chisme ni d’efficacité.

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