La Presse Anarchiste

Le cirque socialiste

Le cirque socia­liste a entre­pris une nou­velle tour­née. Nou­velle non pas tant parce qu’elle s’a­joute aux tour­nées qui ont pré­cé­dé que pour son style et sa nature. On vou­drait com­men­ter ce grand écart et cette cabriole sur la corde raide avec l’hu­mour féroce qui convien­drait, mais ce n’est guère pos­sible. Depuis qu’a­vec la béné­dic­tion du grand patron Karl Marx, et de son fon­dé de pou­voir Jules Guesde, il est allé plan­ter sa tente au Par­le­ment pour balayer le capi­ta­lisme et libé­rer le pro­lé­ta­riat, il a fait tant de pirouettes, de sauts périlleux, de pro­messes funam­bu­lesques, de culbutes et de réta­blis­se­ments que rien ne devrait nous sur­prendre. Alliance avec les radi­caux, avec tous les par­tis dans l’u­nion sacrée, Front popu­laire, lutte contre les com­mu­nistes dénon­cés comme agents de Mos­cou, alliance avec les com­mu­nistes, deve­nus des frères, oppo­si­tion à l’or­ga­ni­sa­tion euro­péenne, adhé­sion à cette orga­ni­sa­tion, pro­messe for­melle de paix en Algé­rie, inten­si­fi­ca­tion de la guerre en Algé­rie… autant de cabrioles et d’acrobaties.

Si bien que toutes ces repré­sen­ta­tions illu­sion­nistes et épous­tou­flantes ont fini par dés­illu­sion­ner et faire bâiller d’en­nui les plus tenaces et les plus fidèles, las de voir se répé­ter les mêmes jeux. Il a fal­lu trou­ver de l’i­né­dit. Dans ce but, on a enga­gé un nou­veau direc­teur, expert aus­si dans l’art des équi­libres instables, lequel du jour au len­de­main, se décou­vrit socia­liste et fut bom­bar­dé direc­teur de la troupe.

On alla plus loin. On fit, et on fait usage de faux-nez, de masques incon­nus, de dégui­se­ments nou­veaux, de tra­ves­tis­se­ments extra­or­di­naires, et on a pous­sé la bouf­fon­ne­rie jus­qu’à signer un pacte avec l’en­ne­mi juré qui les a, pen­dant trente ans, dénon­cés comme social-traitres, et les a com­bat­tus par tous les moyens. Sous la direc­tion du nou­veau Mon­sieur Loyal (qui ne mérite pas ce nom) ces spé­cia­listes en tours de passe-passe et de jon­gle­ries sont deve­nus amis de ceux qui, jus­qu’à main­te­nant, vou­laient les pendre.

Mon­sieur Loyal espère deve­nir ain­si pré­sident de la répu­blique des bate­leurs. Il est pour cela en train d’ap­prendre à mar­cher sur les mains, la tête en bas et les pieds en l’air, afin d’a­mu­ser la gale­rie. Si tous ces clowns, grands et petits, réus­sissent dans leur entre­prise ou leur nou­velle tour­née, ils risquent de s’y cas­ser les reins, comme il est arri­vé à leurs core­li­gion­naires de Pologne, de Tché­co­slo­va­quie, et d’ailleurs. C’est la grâce que nous leur sou­hai­tons, à condi­tion qu’ils n’en­traînent pas les spec­ta­teurs avec eux, comme cela s’est pro­duit dans tous les pays où les socia­listes se sont livrés à ces jeux de cirque.

La Presse Anarchiste