La Presse Anarchiste

Il n’y a pas de Dieu

Les sal­tim­banques reli­gieux, pro­fes­sion­nels inté­res­sés du mys­tère et de toutes les reli­gions, ont une sin­gu­lière manière de conce­voir la puis­sance divine ; ils sont bien élo­quents, lors­qu’ils parlent du haut de leur chaire, dans leurs églises, temples et syna­gogues mais par­fois des mécréants sont assez témé­raires, pour aller les contre­dire, les lois divines ne leur suf­fisent plus ; ils s’empressent de les rendre effec­tives par l’ap­point des lois humaines : témoins les per­tur­ba­tions des églises à Romans, à Paris, a St-Mau­rice-de-Vienne, etc.

Je veux bien admettre, que tout le menu fre­tin des hié­rar­chies reli­gieuses ait plus de foi, que de véri­té, plus de croyance, que de savoir ; mais vous, prêtres, pas­teurs, rab­bins, arche­vêques, car­di­naux et pape, vous qui avez fait de pro­fondes et puis­santes études, vous n’i­gno­rez pas que tout ce qui existe est en conti­nuelle trans­for­ma­tion de com­bi­nai­sons et de formes et n’est pas autre chose, que le pro­duit de la com­bi­nai­son des corps simples, appe­lés élé­ments et que ces élé­ments sont indes­truc­tibles, ils s’as­so­cient, se séparent, selon les dif­fé­rentes condi­tions et tem­pé­ra­tures, dans les­quelles ils se trouvent pla­cés, mais ne dis­pa­raissent jamais ; donc ils n’ont vas de fin.

Vous, les cer­veaux ins­truits dans les choses mys­tiques, com­ment pou­vez-vous admettre que ce qui n’a pas de fin, puisse avoir eu un com­men­ce­ment ? Vous répon­drez : c’est un mys­tère. La réponse est facile mais ne sau­rait me suf­fire. Eh bien ! moi, humble pro­lé­taire, je vous affirme, avec l’ap­pui de la science, que ce qui ne peut avoir de fin, n’a pu avoir un com­men­ce­ment, donc point de créa­tion : ce qui existe a tou­jours exis­té. Sous des aspects divers, soit à l’é­tat gazeux, liquide ou solide ; que les sciences, s’ap­puyant sur l’ob­ser­va­tion des faits, concluent à l’é­ter­ni­té des atomes ; que toute matière brute et vivante est douée de force ; qu’il n’y a pas de force sans matière, et que, ce que vous appe­lez âme ce ne sont que les forces ou éner­gies, insé­pa­rables de la matière, qui se mani­festent sous forme de mou­ve­ment, cha­leur, clar­té et fluide et, comme la matière, à laquelle elles appar­tiennent, elles sont indes­truc­tibles ; que la vie dans la matière brute et vivante ne s’exerce que par un conti­nuel échange de molé­cules consti­tu­tives, prises au milieu ambiant.

Enfin, pour vous faire la part plus large, je veux momen­ta­né­ment admettre que vos absur­di­tés soient vraies et qu’il y ai eu créa­tion ; il faut alors s’en­tendre sur ce que l’on admet par créa­tion. Créer, c’est faire quelque chose avec abso­lu­ment rien ; cela ne s’est jamais fait, jamais vu, et pour qu’il y ai eu créa­tion, il a fal­lu, que tout ce qui existe, aie été crée avec rien ; c’est sur­pre­nant et évi­dem­ment, ce ne pour­rait être que d’une force ter­ri­ble­ment puis­sante, extra­or­di­naire, puis­qu’il n’y a pas de force sans matière — et qu’il est impos­sible de s’i­ma­gi­ner. Pour­quoi alors lui don­ner le nom de Dieu ? Pour­quoi lui don­ner une res­sem­blance humaine, l’homme étant le cou­sin ger­main des singes, ce n’est guère flat­teur pour votre divi­ni­té, que de lui octroyer la res­sem­blance d’un des­cen­dant de la race simiesque, — au milieu de plu­sieurs cen­taines de mille d’autres espèces, dont il serai soi-disant le créa­teur ? Le microbe pos­sède des éner­gies, et si ces éner­gies s’ac­tionnent en clar­té men­tale et qu’elles lui sug­gèrent une croyance divine, il aurait eu tout autant de rai­son de croire que le créa­teur des microbes doit être sa propre image. L’exemple lui vient d’en hauts puisque l’homme, ani­mal culti­vé et per­fec­tion­né et qui croit en Dieu, lui donne sans le savoir une forme humaine. Vrai­ment, c’est inepte, c’est ridicule.

D’autre part, vous n’i­gno­rez pas que le prin­cipe créa­tion implique le prin­cipe fixi­té, c’est-à-dire que ce qui a été créé, reste inva­riable, ne peut se trans­for­mer et aurait dû et devrait res­ter dans l’in­fi­ni des temps pas­sés et futurs tou­jours exac­te­ment sem­blable. Et c’est pour­tant le contraire qui se pro­duit. Il n’y a pas un seul ins­tant, où, dans les com­bi­nai­sons et formes exis­tantes, il ne s’ac­com­plisse un tra­vail molé­cu­laire, et vous recon­naî­trez sans peine, que dans cet ani­mal, plein d’or­gueil et de pré­ten­tion, qu’est la bête humaine, des chan­ge­ments se sont déjà opé­rés et s’y opèrent journellement.

L’embryogénie vous démon­tre­ra, que l’embryon humain, aux pre­miers stades de son déve­lop­pe­ment, est abso­lu­ment iden­tique à celui d’une chienne, d’une tor­tue et d’autres espèces ; que en exa­mi­nant ses pre­mières formes on observe des ébauches des fentes bran­chiales, les­quelles au lieu de se déve­lop­per dis­pa­raissent, ce qui est une preuve cer­taine que ce sont des organes rudi­men­taires, qui se sont atro­phiés, mais qui font appa­ri­tion à l’origine.

Actuel­le­ment, nous pos­sé­dons encore des organes n’ayant plus aucune fonc­tion et des­ti­nés à dis­pa­raître par suite de leur non fonc­tion­ne­ment, puisque c’est la fonc­tion, qui crée l’or­gane. Tels sont les muscles de l’o­reille, ne pou­vant les faire mou­voir, la caron­cule ou troi­sième pau­pière laté­rale, l’ap­pen­dice ou coe­cum. Il n’y a pas de Dieu.

La paléon­to­lo­gie vous démon­tre­ra éga­le­ment, que les espèces vivi­pares avant d’être pla­cen­taires, ont été marsupiaux.

Il n’y a pas de doute, le trans­for­misme existe, donc point de création.

Aus­si, j’ai presque la cer­ti­tude, que dans votre intime pen­sée, vous ne croyez pas du tout, mais seule­ment faites sem­blant de croire. Avec Vol­taire, vous dites : si Dieu n’existe pas, il faut l’in­ven­ter. Il recon­nais­sait fort bien pou­voir s’en pas­ser lui-même mais le jugeait utile pour les autres, pour cette rai­son, que pour asser­vir l’hu­ma­ni­té, il faut une force morale, qui la ter­ri­fie et la contraigne à l’o­béis­sance, à la rési­gna­tion. La force maté­rielle ne pour­rait pas être suf­fi­sante pour asser­vir, le rési­gné aux misères sociales à qui vous faites entre­voir des joies extra-ter­restres après sa morts s’il est bon croyant, ou, des tour­ments éter­nels, s’il n’o­béit pas aux lois, pré­ten­dues divines qui ne sont que l’an­ti­chambre des lois humaines.

Mais, prêtres, vous ne domi­nez l’homme que parce que vous vous empa­rez du cer­veau de l’en­fant, au lieu de déve­lop­per l’i­ni­tia­tive et le désir des connais­sances utiles, vous dépen­sez vos efforts, pour lui faire croire, afin qu’il ne cherche pas à savoir, vous obs­cur­cis­sez sa men­ta­li­té par des absur­di­tés ineptes, au lieu de l’é­clai­rer de tout ce qui est vrai, sain et juste, vous le façon­ne­rez pour la ser­vi­tude et l’ex­ploi­ta­tion, vous étouffes dans son esprit le sen­ti­ment de la révolte contre les injus­tices, pour qu’il soit pré­pa­ré à la tyran­nie de l’au­to­ri­té et du capital.

Vous accom­plis­sez une œuvre néfaste, vous êtes tous des fourbes, des misé­rables à part les croyants, qui êtes ignorants. 

[/​Régio/​]

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