La Presse Anarchiste

Dans notre courrier

D’un cama­rade d’Ar­rans (Côte d’Or) : « … J’ai des cri­tiques à faire au sujet de l’ar­ticle de Simon (« NR » n°19). Il dit par exemple qu’il y a 25 ans pour les tra­vailleurs les plus défa­vo­ri­sés, c’é­tait la misère ; moi je dis que pour la majo­ri­té, c’est tou­jours pareil ; il cite le cas d’un ouvrier agri­cole qui a la télé, etc. moi je n’en connais pas et le cas de Simon doit être une petite mino­ri­té ; dans le coin où je suis, les ouvriers agri­coles gagnent de 20.000 à 25.000 francs au grand maxi­mum (par mois) et au moins 12 heures par jour ; pour la vieillesse assu­rée médio­cre­ment, il devrait dire très médio­cre­ment, donc pas assu­rée du tout.

Pour les salaires, il n’y a pas que des grèves tour­nantes, il y a aus­si des grèves de 24 heures, assez sou­vent ; évi­dem­ment, il vau­drait mieux des grèves illi­mi­tées, mais ceci est la faute aux syn­di­cats d’a­bord, et aux ouvriers ensuite. Pour le SMIG, Simon dit que c’est un pla­fond non négli­geable pour beau­coup ; il me semble que c’est exac­te­ment le contraire, le SMIG est loin d’être adap­té au coût de la vie ; les petits retrai­tés éga­le­ment, qui ont autant de besoin que les autres, sont très loin d’être en rap­port avec la cher­té de la vie ; les employés des ser­vices publics qui se remuent quand même, mais pas assez évi­dem­ment, ne touchent pas les mêmes salaires que le privé.

Pour la Sécu­ri­té Sociale, il y a aus­si beau­coup à dire : je cite mon cas per­son­nel : j’a­vais obte­nu un mois dans une mai­son de repos, je devais être rem­bour­sé à 100%, or j’ai été obli­gé de payer 540 francs par jour, sous pré­texte que la Sécu­ri­té Sociale de la Côté d’Or ne paie que le taux de 1430 au lieu de 1970 à V… ; j’a­vais obte­nu un mois de plus, mais j’ai du y renon­cer ; voi­là quelques exemples irré­fu­tables et il y en a beau­coup d’autres. En résu­mé, les salaires, en géné­ral, sont loin, très loin d’être en rap­port avec le coût de la vie ; éga­le­ment les retraites, etc. Tout le reste de l’ar­ticle de Simon est très bien… »

Du cama­rade M.P. de Poi­tiers : « … Quant à l’ar­ticle sur le syn­di­ca­lisme, je ne suis bien sûr pas entiè­re­ment d’accord.

Il est très vrai qu’au point de vue de la col­la­bo­ra­tion de classe, ou du frein sur les luttes ouvrières, les syn­di­cats ne sont pas du tout dégé­né­rés. Bien au contraire.

Il est vrai éga­le­ment que le pro­blème n’est pas de savoir si l’on doit être dans ou hors des syn­di­cats. La lutte peut se faire avec ou contre les syn­di­cats sclérosés.

Mais il est néces­saire d’or­ga­ni­ser par­tout où cela est pos­sible des noyaux syn­di­ca­listes révo­lu­tion­naires, spé­ci­fi­que­ment orga­ni­sés, qui consti­tuent une avant-garde. Actuel­le­ment les syn­di­cats semblent viser à la repré­sen­ta­ti­vi­té (« on a tant de carte ! »). C’est une jus­ti­fi­ca­tion recher­chée face à la bour­geoi­sie qui leur offre les fau­teuils de ses Conseils Éco­no­miques et autres.

Les syn­di­ca­listes de classe n’ont pas la pré­ten­tion de repré­sen­ter X indi­vi­dus pos­ses­seurs d’une part, mais X exploi­tés sus­cep­tibles tôt ou tard de se révol­ter, et qui auront besoin de leur expé­rience syn­di­ca­liste. Ain­si dans le monde étu­diant, le syn­di­ca­lisme s’il exis­tait ne vise­rait pas à res­pec­ter X étu­diants, quelles que soient leurs ori­gines, leur rela­tive tran­quilli­té douillette, leurs égoïsmes bour­geois et petit-bour­geois, mais bien à se faire les porte-parole des jeunes qui pâlissent leurs 18 ans à l’u­sine, et donc se trouvent vic­times d’une véri­table alié­na­tion cultu­relle, et plus par­ti­cu­liè­re­ment pour les plus intel­li­gents d’une véri­table muti­la­tion intellectuelle.

Je puis en par­ler, car j’ai trop connu en milieu ouvrier l’im­mense amer­tume, et dans cer­tains cas le déses­poir de types qui se sont vus refu­ser le droit à l’ins­truc­tion (sans tou­te­fois qu’ils éprouvent de honte pour leur métier manuel). Un cas entre autres : mon père vou­lait être ins­ti­tu­teur. Il est mode­leur-méca­ni­cien et ouvrier hors ligne ».

Du cama­rade B.V. de Rio (Bré­sil) : « … L’ar­ticle le plus inté­res­sant, mar­xisme et anar­chie, y est mal­heu­reu­se­ment envi­sa­gé uni­que­ment du point de vu mar­xiste. Ça n’empêche pas les conclu­sions d’être nettes ; mais il fau­drait qu’un anar fasse le pen­dant : anar­chisme et marxisme.

En tout cas, heu­reu­se­ment ini­tia­tive. Il y a long­temps que les anar­chistes fran­çais gas­pillent leurs forces dans un iso­le­ment violent. Per­son­nel­le­ment, je crois leur vio­lence néces­saire (par oppo­si­tion aux hypo­cri­sies douces qui fleu­rissent sur la ques­tion mar­xiste, mais je n’ad­mets pas leur volon­té de détruire direc­te­ment l’É­tat sans se pré­oc­cu­per de rien d’autre : y en a marre des belles paroles inef­fi­caces. Je crois que les anars ont à perdre leur belle âme mal­heu­reuse et que le mar­xisme leur en offre quelques possibilités. 

Mais ce que je dis là n’est qu’une vue exté­rieure, je connais des anars, mais pas l’anarchisme ».

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