La Presse Anarchiste

Après la Conférence de Londres : Autres problèmes

La Con­férence de Lon­dres et l’in­ter­view fournie par De Gaulle au « Times » ont été les deux faits diplo­ma­tiques ayant retenu l’at­ten­tion ; en ce qui nous con­cerne, nous ne nous y attarderons pas, les prob­lèmes soulevés à Lon­dres, nous les avons analysés, avec toutes les dif­fi­cultés qui s’y rat­tachent. La con­férence n’est d’ailleurs pas au bout de ses peines et nous aurons dans des jours prochains l’oc­ca­sion d’é­tudi­er son tra­vail. Dis­ons, pour l’in­stant, qu’à Lon­dres il s’ag­it beau­coup moins de la paix, humaine, uni­verselle et défini­tive que d’éviter immé­di­ate­ment une nou­velle saignée que l’on réserve pour plus tard.

Le jour­nal « Com­bat », dans son édi­to­r­i­al du 18 sep­tem­bre 1945 a, d’une façon très claire situé ce à quoi nous devons nous atten­dre : guerre économique d’abord, puis guerre mil­i­taire ensuite, les efforts et les espoirs nés des deux dernières con­fla­gra­tions en faveur d’une paci­fi­ca­tion des peu­ples étant vains et inutiles.

Quant à l’in­ter­view de De Gaulle au « Times », la diplo­matie française cherche sa voie, décon­te­nancée par le réal­isme sovié­tique qui ne nous a rien apporté jusqu’à main­tenant, et par Wash­ing­ton, aux exi­gences économiques, mil­i­taires et finan­cières telles que la libéra­tion pour une « France libre et indépen­dante » risque de devenir une pan­talon­nade pour laque­lle trop de braves cœurs ont jusqu’alors œuvré.

Il faut donc nous retourn­er vers les puis­sances sub­al­ternes pour essay­er de frein­er les appétits des grands alliés. Blocs, zones, petit à petit la poli­tique lancée en 1942 au micro de Lon­dres fait sa marche.

Notre poli­tique de puis­sance et de pres­tige, alors que matérielle­ment nous sommes exclus et que nous n’ap­por­tons que des sym­bol­es et des gloires effacées, ne pèse pas lourd. On sem­ble oubli­er par ici que le « Vae vic­tis » du vieux Brenus est tou­jours d’ac­tu­al­ité et que, dans cette guerre, par­mi les vain­queurs nous restons quand même des vaincus.

Toutes les dif­fi­cultés européennes ne peu­vent nous faire ignor­er qu’il n’y a là qu’une faible par­tie du prob­lème et que la grande dis­cus­sion rebondi­ra lorsque les prob­lèmes du Paci­fique et de l’Asie vont être mis à l’é­tude. C’est afin que nos amis puis­sent suiv­re ces ques­tions que nous allons étudi­er dans nos prochains exposés les points soulevés par la guerre d’Extrême-Orient.

Depuis qua­tre-vingt-dix ans, la ques­tion d’Ex­trême-Ori­ent n’a con­nu comme solu­tion que celle inhérente au régime cap­i­tal­iste : la guerre.

Con­sta­tons que jusqu’au début du siè­cle deux puis­sances européennes s’in­tro­dui­saient en Chine avec des vues pure­ment colonisatri­ces, tan­dis que la troisième, la Russie, avait l’a­van­tage d’être elle-même puis­sance européenne et puis­sance asi­a­tique, ce qui dans l’avenir déter­min­era toute la poli­tique russe, laque­lle ten­tera tour à tour de s’é­ten­dre en Europe (prin­ci­pautés balka­niques), puis lorsque cette poli­tique sera stop­pée par le con­cert européen des grandes puis­sances, l’ex­pan­sion­nisme russe se tourn­era vers l’Asie où il se trou­ve à pied d’œuvre.

Un nou­veau con­cur­rent qui dès 1854 a com­mencé à détenir la vedette diplo­ma­tique, le Japon, appa­raît à l’hori­zon, et avec lui son antag­o­niste, les U.S.A.

Au cours de notre prochain arti­cle, nous étudierons l’évo­lu­tion de la ques­tion d’Ex­trême-Ori­ent avec ces deux nou­veaux venus.

Que nos cama­rades aient l’œil atten­tif sur le casse-tête européen, mais qu’ils n’ou­blient pas qu’en Asie il y a les deux « grands », Russie et États-Unis, et que le Japon est appelé à jouer le rôle de l’Alle­magne dans les dif­fi­cultés européennes. Ce sera le poids qui fera pencher la bal­ance d’un côté avec un apport de force très important.


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