Le samedi 15 septembre, les ouvriers des usines Berliet étaient convoqués pour entendre un exposé de M. Greppat, président du comité d’entreprise, sur le programme social et le ravitaillement des ouvriers, ainsi qu’un compte rendu d’une année de gestion par l’administrateur-séquestre de ces usines.
M. Greppat oublia tout d’abord de nous dire à quoi servent les retenues faites sur les payes des ouvriers, variant de 10 à 20 fr. par quinzaine, et ce, sur 5.500 ouvriers, ce qui doit faire un joli denier mensuel ; et par qui fut décidée cette retenue ; car, en ce qui concerne le ravitaillement, c’est plutôt maigre depuis le mois de juillet. Ces retenues vont peut-être aux œuvres sociales.
Pourtant, M. Mosnier, l’administrateur séquestre, au cours de son exposé, annonça un certain nombre de millions de bénéfices. Simple suggestion : n’aurait-on pas pu prendre les frais qu’entraînent ces œuvres sur lesdits millions ?
Il est vrai que M. Mosnier donna bien le chiffre de vente des véhicules et pièces détachées, s’élevant à 558 millions, mais que les camions laissés pour compte par l’armée entraîneraient des frais assez élevés.
Si M. l’administrateur-séquestre nous donna connaissance des recettes, il omit de nous signaler les dépenses. Gardons pour la bonne bouche les déclarations de MM. les secrétaires du syndicat des métaux et de l’Union des Syndicats. Le premier réclame la nationalisation des usines : pourtant, il devrait savoir que le syndicalisme pour nous est autre chose que ça. Quant au second, il fit un véritable exposé politique du mémorandum de la C.G.T. et des partis de gauche au général de Gaulle, et naturellement renationalisation des usines.
Pourtant, tout au cours de la réunion, l’on proclama bien haut que les ouvriers avaient donné la preuve qu’ils pouvaient se gérer eux-mêmes en connaissance de leurs besoins ; alors, pourquoi les mettre sous la tutelle d’un patron, fût-ce l’État, car ses ministres n’ont pas l’habitude de se mettre devant le tour ou l’établi pour connaître les besoins du prolétariat ?