L’Archipel aux Sirènes, de MM. Somers et Maugham. – Les Éditions de France. – Recueil de nouvelles dont la plupart sont quelconques, mais l’une vaut l’achat de cet ouvrage.
« La Pluie » a fourni le sujet d’une pièce mise à la scène à New York et qui a obtenu un vif succès.
Un missionnaire protestant, Davidson, après une assez longue absence, revient parmi les indigènes qu’il évangélise.
L’affreuse morale religieuse qui fait naître le mal pour la joie de l’extirper est naïvement. Exposée par ce prêtre.
« À notre arrivée, l’idée du péché n’existait pas. Les indigènes sans même s’en douter manquaient à tous les commandements de Dieu. Ma tâche la plus difficile fut, je crois, de leur inculquer le sentiment du mal. »
« Voyez-vous ils étaient si ingénument corrompus que nous n’arrivions pas à leur faire comprendre leur perversité. Il fallut transformer en péchés ce qui leur paraissait naturel, non seulement l’adultère, le mensonge, le vol, mais l’exhibition du corps, la danse, l’absence au prêche. Ainsi j’ai décrété qu’il y aurait péché pour une jeune fille à montrer sa poitrine et pour un homme à ne pas porter de pantalon. »
« Pour prouver aux gens qu’une action est coupable le moyen radical est de les punir. Je leur infligeais donc une amende quand ils ne venaient pas à l’église, qu’ils dansaient ou s’habillaient sans décence. »
« J’avais un tarif ; tout péché devait se payer en argent ou en travail. Ils ont fini par comprendre. »
– Refusèrent-ils jamais de payer ?
– Comment l’eussent-ils pu ?
« N’oubliez pas qu’en dernier ressort je pouvais les expulser de l’église. »
– Craignaient-ils ce châtiment ?
Davidson esquissa un sourire en se frottant doucement les mains.
– Impossible alors de vendre leur copra, et au retour de la pêche plus de droit au partage. À peu près la certitude de mourir de faim. Oui, cela leur faisait grand peur.
* * * *
Une petite brochure qui devrait être dans les mains de tous ceux parmi les ouvriers qui s’adonnent à la propagande parlée, abordent les tribunes des réunions.
Sans pédantisme dans la « Rhétorique du Peuple », Raoul Odin trace les règles générales desquelles il convient de ne pas s’écarter si l’on veut être compris, écouté avec soin et satisfaction.
Il proscrit, et comme il a raison les mots peu usités mais sonores ou destinés à épater l’auditoire. Ah ! les directives, les concrétisations et autres mots plus ou moins obscurs et qui permettent au copain qui les prononce de prendre un petit air avantageux et font faire les yeux ronds aux pauvres bougres d’auditeurs.
Et les images, les figures de rhétorique qui abrutissent ou font se gondoler les assistants. Toujours je me rappellerai cette phrase lancée avec son creux des bons jours par de brave Bousquet. mort récemment :
« Compagnons ! La boulange sera le pont-levis hérissé de baïonnettes sur lequel passera la Révolution. »
Deux mille mitrons qui assistaient à ce meeting ne retinrent du discours de Bousquet que cette effarante envolée d’éloquence.
Ces mots rares et ces phrases à effets satisfont peut-être la vanité des orateurs populaires. Ils n’apprennent rien à ceux qui les écoutent.
Lisez la petite brochure de Raoul Odin. En quelques pages elle contient ce qui est utile de savoir, non pour devenir un orateur, mais pour ne pas dire de bêtises et ne pas endormir son monde.
À la « Brochure Mensuelle », 39 rue de Bretagne.
[/C.D./] [[Attribué à Charles Desplanques ? – L.P.A.]]