La Presse Anarchiste

Makhno, Wrangel et les Bolchevistes

Les jour­naux contre-révo­lu­tion­naires russes ont répan­du, ces der­niers temps, le bruit que Makh­no avait conclu une alliance avec le géné­ral Wran­gel contre les bolcheviks.

Toute cette his­toire n’est qu’une pure inven­tion des contre-révo­lu­tion­naires et des bolcheviks.

Depuis plu­sieurs mois, les bol­che­viks ont de nou­veau res­sen­ti un grand besoin de se débar­ras­ser, coûte que coûte, de Makh­no, dont l’influence sur les masses ouvrières et pay­sannes du Sud de la Rus­sie fait des pro­grès énormes, et devient mena­çante pour les bolcheviks.

Pour en finir avec leurs enne­mis anar­chistes, les bol­che­viks mas­sèrent, à proxi­mi­té du front de Makh­no, une forte armée (16 divi­sions pré­le­vées sur le front polo­nais), et déclen­chèrent une offen­sive contre les com­munes anar­chistes. Makh­no, comme d’habitude, fit appel aux ouvriers et pay­sans de sa région pour défendre, contre les bol­che­viks agres­seurs, l’existence des libres com­munes non bolcheviques. 

Une furieuse bataille s’engagea, et l’acharnement des com­bat­tants était tel qu’en maints endroits on ne fai­sait pas de pri­son­niers ; tous ceux qui tom­baient d’un côté ou de l’autre étaient mas­sa­crés jusqu’au der­nier. Le com­bat le plus, meur­trier eut lieu près d’Ekaterinoslaw, aux abords de l’importante sta­tion de che­min de fer de Sinél­ni­ko­wo ; sur une immense éten­due, le sol était jon­ché de cadavres et de blessés. 

Devant la ferme volon­té de leurs adver­saires, déter­mi­nés à défendre jusqu’au bout leur liber­té et leur exis­tence, les bol­che­viks com­prirent qu’ils ne pou­vaient rien faire par la force des armes, et ils cher­chèrent à atteindre leur but au moyen de la cor­rup­tion. Le chef dé l’état-major bol­che­vik fit annon­cer par­tout qu’une prime de 10 mil­lions de roubles Roma­nof revien­drait à celui qui appor­te­rait la tête de Makh­no. Mais, si l’on peut cor­rompre et démo­ra­li­ser des mer­ce­naires tels que les gou­ver­ne­ments impé­ria­listes ou les bol­che­viks en emploient, il en est autre­ment des ouvriers, des pay­sans qui défendent leur liber­té, leur indé­pen­dance, leur exis­tence même. Sachant ce que signi­fient de telles pro­po­si­tions, ils ont don­né la réplique qui s’imposait : chas­ser l’ennemi, quel qu’il soit. 

Entre temps, les contre-révo­lu­tion­naires qui se groupent autour du géné­ral Wran­gel, en Cri­mée, avaient déci­dé de pro­fi­ter de cette situa­tion pour déclen­cher une offen­sive, espé­rant ain­si, dans leur com­bi­nai­son, pou­voir entraî­ner les forces de Makh­no contre les bol­che­viks. Et, pour don­ner plus de force à ce pro­jet, leur presse a annon­cé l’alliance de Makh­no avec le géné­ral baron von Wran­gel et la marche en com­mun contre les bol­che­viks, cela dans le but d’exercer une influence déci­sive sur la recon­nais­sance par les alliés de Wran­gel, et lui assu­rer l’appui moral et maté­riel qui lui est nécessaire. 

La presse réac­tion­naire des alliés n’a pas man­qué d’exploiter cette fausse nou­velle, afin de per­mettre la réa­li­sa­tion des pro­jets contre-révolutionnaires.

Makh­no n’a pas besoin de l’auxiliaire d’anciens géné­raux tza­ristes ; il l’a déjà démon­tré, par la façon dont il a débar­ras­sé la Rus­sie de l’aventurier Gri­go­rieff, qui était venu chez lui avec de sem­blables propositions.

Il est évident que la légende de l’alliance de Makh­no avec Wran­gel a éga­le­ment été exploi­tée par les bol­che­viks. Et ceux-ci dis­posent de larges moyens de pro­pa­gande, grâce aux­quels les fausses nou­velles qu’ils lancent sont rapi­de­ment connues du monde entier.

Makh­no ne fait pas de poli­tique, pas de com­bi­nai­sons diplo­ma­tiques, ni à l’intérieur du pays, ni à l’étranger, et il ne pos­sède ni sta­tions radio­té­lé­gra­phiques, ni cour­riers diplo­ma­tiques ; il lui est donc impos­sible de démen­tir toutes les allé­ga­tions mensongères.

Pour notre part, nous savons de source abso­lu­ment sûre que la nou­velle d’une alliance entre Makh­no et Wran­gel contre les bol­che­viks est fausse de toutes pièces, et n’a d’autre but que, d’une part, com­pro­mettre Makh­no aux yeux des tra­vailleurs à l’étranger, et d’autre part, ren­for­cer, dans le monde entier, la posi­tion des contre-révo­lu­tion­naires russes. 

Makh­no n’a pas peur ; il n’est pas seul ; il a avec lui la Confé­de­ra­tion des anar­chistes de la Rus­sie méri­dio­nale, par­mi les­quels il y a des cama­rades éprou­vés, qui ne craignent ni les pro­vo­ca­tions ni les menaces des bol­che­viks. Ils savent qu’ils défendent la cause de l’idéal liber­taire, et ils com­bat­tront toute dic­ta­ture, de quel côté qu’elle vienne.

[/​Bro­nis­las-Zri­tel./​]

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