Les momies au pouvoir
De machin en tracassin, ponctué d’explosions au plastic et de discours du Sauveur, le régime dur et pur hérité du 13 mai 1958, approche doucement de sa fin. Et chacun prépare les lendemains qui, cette fois, c’est garanti, chanteront. Les hommes nouveaux sortent de leurs sarcophages, les bandelettes empoussiérées tombent et l’on voit apparaître un joli Mollet, un Mendès encore en état de marche, un Gaillard de choc et autres Edgar Faure voir du Paul Reynaud rénové. Sans oublier un certain Pinay qui, de St Chamond, joue les grandes mystérieuses, imitant en cela un illustre prédécesseur aux longs bras en V. Dame ! Il ne faut jamais négliger une bonne recette, ça peut resservir…
Ce fascisme bien de chez nous…
Les lendemains qu’on nous prépare chanteront peut-être, à moins que la baraque « républicaine » ne saute avant, car il y en a qui lui en veulent sérieusement, à la République ! Par exemple, ceux pour qui « l’ALGÉRIE FRANÇAISE » a, enfin, été le bon truc qui ramène beaucoup de monde autour du néo-fascisme. Parce que nous en sommes là, nous Français, pays de la liberté et du bon sens réunis (
Mémoire courte et bras long
Car enfin, si on veut faire un peu d’histoire, il faut bien dire que l’Indochine, la Tunisie, le Maroc, les Comptoirs des Indes, et tous les « abandons » signalés à la vigilance patriotique, ça n’avait pas rendu, et les croisés celtiques de Jeune Nation commençaient à se morfondre quand soudainement, on entendit la voix du camarade Mitterrand, ministre de Mendès-France, déclarer : « l’Algérie, c’est la France » pendant que le gouvernement d’alors parlait déjà de rappeler des trouffions « afin que nos départements algériens restent dans la République ».
Souvenons-nous du beau travail du gouvernement Mollet, son rappel de réservistes, le proconsulat de l’ignoble Lacoste, l’homme qui couvrit les tortures, aidé et protégé par son camarade de parti, Max Lejeune (toujours à la SFIO, toujours pas désavoué par Mollet, et les militants…) alors ministre. Dans ce beau tableau, n’oublions pas les pouvoirs spéciaux votés par les socialistes et le PC, en bons et braves républicains qu’ils étaient.
Tout ça pour dire que le fascisme a bien été aidé en ses débuts par cette Algérie française dont tout le monde était partisan, hommes de « gauche » en tête, au commencement de la révolution algérienne et si Mitterrand a depuis retourné sa veste pardon ! reconsidéré la question, il n’est pas le seul. Seulement le temps de cette réflexion a coûté des centaines de milliers de morts algériens et français (le peuple algérien a été de loin le plus saigné, cela va sans dire quand on se livre à une « pacification » bien conduite), des monceaux de fric (n’en parlons pas trop longuement, ce sont également les peuples algériens et français qui casquent) enfin la dernière note à payer risque d’être tout simplement la bagarre, ici même, « entre français », comme on dit avec horreur, et dans cette bagarre chacun peut recevoir des éclats.
Franco de port
En attendant, le gouvernement gaulliste fait du troc. Avant d’aller pleurer misère auprès des organisations ouvrières en cas de nouveau putsch comme il est vraisemblable que cela se fera, la République dure et pure obtient la neutralisation, (ça on demande encore à voir) des fascistes de l’OAS en Espagne, en coffrant El Campesino. Non que nous nous attendrissions spécialement sur le sort de l’ami du sinistre Lister, destructeur des collectivités d’Aragon, dont nos camarades de la CNT-FAI apprécièrent les méthodes très particulières durant la guerre civile, non bien sûr, mais chacun peut se rendre compte du dangereux précédent que cela crée. Car on a commencé par un « Républicain » et, pour faire bon poids, on est venu arrêter des camarades libertaires ensuite. Et rien ne prouve que cela soit fini. C’est beau, c’est grand, c’est généreux, la France ! Le Préfet de police, lui, « conseille » aux musulmans de rentrer chez eux, à 20 heures et seuls, aux cafés musulmans de fermer à 19 heures ; le 17 octobre, ce sont les morts algériens pendant les dramatiques manifestations de Paris…
Pendant ce temps, le PC fait risette à la SFIO, laquelle boude, le Mollet prépare un Front Républicain, à moins que ce ne soit socialiste (ce Mollet interchangeable, futur grand homme de la Gauche de demain, mais qui serait tout aussi capable de s’acoquiner avec le Droit, il l’a déjà montré) avec Mendès ou d’autres (radicaux, MRP, etc.) bref on se prépare pour le futur. Ajoutons qu’il serait peut être temps aussi pour la classe ouvrière de se préparer pour le futur, et même pour le présent.
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