Des gazetiers vont même jusqu’à dire qu’il tiendrait dans ses mains le sort de l’État.
Il n’est pas le premier juge d’instruction qu’on flatte pareillement. Sans conviction. Uniquement parce que les gens qu’on pense en cause ne sont pas des amis. Autrement, on ferait jouer tous les ressorts secrets qu’on a ou qu’on se chercherait dans l’État ou dans la « société » pour ralentir son zèle.
Ce ne serait plus un justicier, mais un petit intrigant attentif à se pousser à la faveur de discordes civiles.
Enfin, pour l’instant, il paraît tenir le bon bout, mais invitera-t-il à comparoir ou « décernera-t-il » contre les grands de l’État, qu’il a, nous dit-on, à sa discrétion !
Rien n’est moins sûr. D’autres avant lui jurèrent quelquefois de vider l’abcès et qui ne vidèrent finalement que leur « délibéré », comme on dit dans le jargon de la maison.
On a déjà parlé ici de Bertulus, juge du temps de l’Affaire Dreyfus et qui grimpa au faîte de la hiérarchie sur un coup d’audace : la prescience de la culpabilité du colonel Henry, sur quoi il poussa hardiment ses avantages.
Carte qu’il avait jouée aussi sûrement qu’il eût joué la contraire, si elle se fût offerte aussi vraisemblable.
Précisément ce Bertulus était un joueur. Et c’est même cela que les antidreyfusards lui reprochèrent avec le plus d’acharnement, cette passion du tapis vert, secret probablement de son attitude.
Mais voilà : il n’y a pas apparence que M. Zollinger, plutôt de mine janséniste, fréquente les tripots.