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Un geste… en Allemagne
D’une lettre saisie sur un prisonnier et expédiée de Berlin-Shomberg, j’extrais les lignes suivantes :
À Cherchœne-Weine, où je travaille, six magasins ont été, un samedi, pris d’assaut. Tout a été mis en pièces ; on a fait main basse sur tout ce qui s’y trouvait, marmelade et fromage. Une rue était absolument envahie par la foule. Les gendarmes étaient presque impuissants. Un gendarme fit un discours, disant qu’en temps de guerre il était tout à fait inconvenant de faire la guerre à ses propres compatriotes, que le peuple allemand devait être uni, n’avoir qu’une volonté, et accepter tout sacrifice, afin de déjouer les plans des Anglais qui voulaient nous affamer.
Alors les gens ont si bien rossé le gendarme qu’il est resté étendu sur la place et qu’il a fallut l’emmener dans une voiture d’ambulance.
Hé ! hé ! Quand on nous disait que les habitants de Germanie sont soumis et discipliné comme un troupeau ! Ils rossent aussi le commissaire.
Dans un temps où tant de gens, non seulement acceptent la férule, mais encore la demande, c’est un geste qui fait plaisir, même s’il a eu lieu à Oberchœne-Weine.
Au rabais
L’Action Française va lancer un roman sensationnel : La Vermine du Monde. elle a fait tirer 100 affiches de luxe du dessinateur Jeanniot, qu’elle laisse au prix de 10 francs.
Maintenant, pour les lecteurs qui désireraient la même affiche, revêtue de la signature de Jeanniot et de celle de Léon Daudet, on leur facturera 25 francs.
C’est-à-dire que Daudet et Jeanniot estiment leur signature à 15 francs les deux, soit 7 fr. 50 chaque.
Au prix où est le beurre, ce n’est vraiment pas cher.
Nous ne doutons pas que les lecteurs de l’A.F. ne s’offrent les paraphes de ces fidèles défenseurs de Philippe.
D’autant que c’est pour le Roy et pour la France.
Notre consœur ne nous en voudra pas si nous pillons son idée pour lui faire concurrence. C’est la loi du régime capitaliste. À titre tout à fait exceptionnel et par une faveur dont nos lecteurs nous sauront gré, nous mettons en vente quelques numéros de ce « Ce qu’il faut dire » revêtus de mon illustre autographe au prix vraiment dérisoire de 5 fr. 75.
Un miracle
(article trop mutilé dans l’original pour être retranscrit ici. Il traite sur le ton humoristique d’une brève sans intérêt politique ou moral)
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Mot de la fin
Ces quinze jours de prison sont un exemple me diront les moralistes, il ne faut pas faire croire à ceux qui se battent que leurs femmes puissent les tromper avec des embusqués. Je doute que la prison soit moralisatrice, nos pères usaient de la ceinture de chasteté sans beaucoup de succès, les amants cambriolant les serrures. On n’arrête pas l’amour arec des gendarmes. Quinze jours à Saint-Lago ne me paraissent pas devoir redonner à une femme une tendresse absente, le mari de la femme Carrion pourrait commenter utilement le fait suivant, dont la philosophie souriante me semble préférable aux appels à des lois archaïques.
C’était dans une tranchée de l’Argonne, pendant une accalmie, des deux côtés de la, ligne de feu les lascars s’envoyaient des quolibets. Soudain on vit paraître sur les tranchées allemandes un écriteau, sur lequel on lisait ces mots stupéfiants : « On peut s’en aller d’ici, maintenant qu’on vous a fait tous cocus, dans le Nord. » Les poilus furent un instant interloqués, mais ils se ressaisirent vite et rétorquèrent par un écriteau identique : « Nous on s’en fout, on est tous du Midi ! »
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