Chapitre premier
[|L’abstraction. L’abstraction arithmétique. L’arithmétique, sa base, son but.
(suite)|]
L’abstraction.
Il ne faut pas confondre l’abstraction avec la métaphysique.
Si l’on appelle
Si nous soumettons un corps à l’examen successif de tous nos organes des sens (vue, toucher, ouïe, goût, odorat), nous pourrons noter nos sensations et noter ainsi les causes que nous attribuons à ces sensations, c’est-à-dire les
Différents corps ayant des propriétés communes, il est important, pour éviter la confusion, de donner un même nom à chacune de ces propriétés communes, et l’on a été conduit naturellement à faire séparément l’étude des différentes propriétés des corps. Comme il est impossible de les étudier toutes à la fois dans un même corps ou dans des corps différents, on a été conduit à les étudier les unes après les autres, c’est-à-dire à oublier volontairement toutes les propriétés d’un ou de plusieurs corps, à l’exception d’une seule ou de plusieurs, pour comparer les corps relativement à cette ou à ces propriétés.
Oublier volontairement toutes les propriétés d’un ou de plusieurs corps, à l’exception d’une ou de plusieurs, pour penser uniquement à cette ou à ces propriétés, c’est faire de l’abstraction.
L’abstraction est l’essence même de la science.
Pas de science possible pour qui veut comparer les corps, saisir leurs ressemblances et leurs différences, en les considérant toujours en bloc (corps = ensemble de propriétés) et sans s’occuper des détails (propriétés).
Le chimiste qui pèse un corps sur un peson, c’est-à-dire qui, momentanément, oublie, à dessein, toutes les propriétés de ce corps, à l’exception de celle d’avoir du poids, c’est-à-dire de nécessiter un certain effort pour être maintenu écarté de la terre, effort que nous pouvons percevoir au moyen de nos muscles (toucher) et mesurer au moyen d’un peson (vue, toucher), ce chimiste fait de l’abstraction au même titre que le géomètre qui s’occupera, momentanément, de la forme des corps, à savoir de certaines sensations provenant de certaines propriétés et perçues par la vue et le toucher, en oubliant volontairement toutes les autres sensations provenant de toutes les autres propriétés.
Classement des sciences.
Le caractère de chaque science consiste dans la ou les abstractions étudiées ou dans le ou les corps dont on étudie une ou plusieurs abstractions ou successivement toutes les abstractions.
Tous les autres classements sont illogiques et notamment les classements en sciences abstraites et concrètes, ce qui laisse supposer qu’une science (connaissance) peut ne pas être abstraite. Tous les classements faits jusqu’à ce jour sont plus ou moins absurdes. Nous donnons ailleurs le classement rationnel des sciences.
L’abstraction en arithmétique.
L’abstraction que l’on étudie en
Importance de l’arithmétique.
Cette propriété de nombre est tout à fait générale dans l’univers. Sa connaissance doit donc être un moyen puissant de distinguer entre eux les corps, qui nous apparaissent comme des groupements de substance.
Or, comme nous le constatons, nous ne pouvons vivre qu’en opérant la sélection entre les substances utiles et nuisibles, c’est-à-dire en distinguant les corps et c’est la connaissance des propriétés des corps qui nous permet de les distinguer entre eux. Il s’ensuit que le nombre, étant une propriété très générale, doit avoir une importance considérable et son étude, l’arithmétique, nous le montrera, en effet.
L’arithmétique va nous apprendre à reconnaître les groupements, à les nommer, à les classer, à les suivre dans leurs transformations, quand ils se déforment et se reforment en groupements pareils ou différents, à former, nous-mêmes, et à déformer des groupements, à suivre le transformisme universel, dont notre vie est un cas particulier, et à le mesurer.
Résumé du chapitre 1er.
— Toutes les sciences sont expérimentales et utilitaires. En effet, toutes les connaissances (sciences) viennent par les sens et sont par conséquent le résultat de l’expérience. La vie serait impossible pour l’individu qui n’écouterait pas les indications des sens.
— C’est l’utilité des connaissances acquises par les sens qui a motivé leur conservation et leur développement.
— Comme les autres sciences, l’arithmétique est expérimentale et utilitaire.
— La base de toute science est l’abstraction, opération qui consiste à retenir une ou plusieurs propriétés des corps pour en faire l’étude à l’exclusion des autres. Les abstractions ou propriétés abstraites sont celles qu’on étudie ou celles qu’on omet. Toutes les sciences sont donc abstraites. Pas d’abstraction, pas de science.
— Le caractère de chaque science consiste dans la ou les abstractions étudiées, ou dans le ou les corps dont on étudie une ou plusieurs abstractions. Un classement logique des sciences (connaissances) ne peut donc être fait que d’après la ou les abstractions étudiées et d’après les corps dont on étudie une ou plusieurs abstractions.
— L’abstraction que l’on étudie en arithmétique est le nombre, c’est-à-dire la propriété qu’ont tous les corps de se réunir en groupes très variés.
— L’importance de l’arithmétique est considérable. Elle nous apprend à reconnaître les groupements, à les nommer, à les classer, à les suivre dans leurs dégroupements et dans leurs regroupements et à mesurer tous les groupements si divers. L’étude du nombre est pour nous un moyen puissant de comprendre le transformisme universel, dont notre vie est un cas particulier.
Tableau récapitulatif du chapitre 1er.
(À suivre)
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Les deux volumes d’arithmétique physique, dans lesquels nos principes ont été partiellement exposés, ont été publiés par Ferrer pour l’École Moderne de Barcelone. Ce sont un Volume de commençants et un Cours moyen. Un traité complet d’arithmétique physique sera publié en français.