Une liquidation à la sauvette
Il convient peut-être de faire un retour en arrière afin d’être compris.
Depuis plusieurs années, au sein de la société, une action syndicale continuelle avait amené de nombreux avantages ; ce qui avait encouragé les salariés indécis. La direction, inquiète, décidait le 18 août de demander auprès du tribunal de commerce la nomination d’un administrateur judiciaire. Cela sans tenir les délégués du personnel au courant, malgré de nombreuses questions posées par ceux-ci à la direction sur la continuité de la société.
L’administrateur désigné, la direction lui adressait une demande de sursis d’exécution ; à la suite de la grève, elle revenait sur cette décision et l’administrateur entrait en fonctions.
Les délégués, accompagnés d’une délégation des salariés, après une entrevue avec le chef de cabinet du ministre des Transports, furent reçus chez l’inspecteur divisionnaire du travail, lequel accompagnant la délégation auprès de la direction de Cosmos obtint enfin ce que les délégués n’avaient pu obtenir, c’est-à-dire la communication de la décision de la direction décidant de liquider la société ; infraction grave à la législation du travail qui prévoit qu’en l’absence de comité d’entreprise les délégués doivent être tenus au courant de l’avenir de leur entreprise.
La totalité des salariés, y compris les cadres, fut sidérée d’apprendre la décision de la direction et incapable de réagir devant le fait accompli. Certains cadres, proches « collaborateurs » de la direction – et depuis longtemps n’eurent jamais connaissance des intentions de la société ; si quelques-uns l’apprirent, ils ne dirent rien aux autres salariés. Peut-être par volonté délibérée ou par indifférence pour la classe ouvrière ! Est-ce une consolation pour les ouvriers de voir tout le monde dans le même panier, cadres compris ?
Une constatation s’impose : la grande concentration décidée par le capital et le gouvernement, dont l’application est le plan, entraîne particulièrement dans la branche des transports – directement sujette aux aléas de la grande industrie, telle l’affaire Sidelor-De Wendel – de nombreux changements. Fermetures, fusions, autrement dit licenciements ou dans le meilleur des cas changement d’emploi, avec la baisse de salaire que cela sous-entend le plus souvent. Des « mouvements » ont été constatés chez Mullet-Leygonie, Tailleur, Michelin.
Dans une branche aussi peu structurée du point de vue ouvrier, les directions ont beau jeu d’écraser les travailleurs et de leur imposer un abaissement des conditions de vie. Isolés dans leurs boîtes, sans liaison et divisés entre catégories – le bon vieux truc des cadres – les travailleurs se feront battre en ordre dispersé s’ils ne s’organisent !
C’est-à-dire à plus ou moins brève échéance non seulement la disparition des avantages durement acquis au sein de l’entreprise mais également un retour en arrière de la législation du travail, dénotant une attaque en règle du grand capital, contre le monde du travail avec l’aide objective de l’État bourgeois.
Seule l’organisation de classe peut faire reculer le patronat, avant de le battre !
Travailleurs des transports, organisons-nous !
[/J.M./]