Ouvrez une feuille quelconque, radicale, opportuniste, progressiste ou autre, et du diable si le premier de vos regards ne tombe pas sur un titre flamboyant en grand caractères : Chasse aux anarchistes ou Exploits anarchistes, le tout suivi d’un entrefilet de quelques lignes plus ou moins acerbes selon la couleur du journal, mais dans tous les cas bête et méchant.
Bête quand on y relate de prétendus exploits suivis de commentaires fantaisistes, méchants, parce que les fait y sont toujours dénaturés avec l’intention, toujours la même d’ailleurs, de nuire, dans l’esprit populaire, à la grande idée anarchiste.
Vol, pillage, assassinat, voila les synonymes qu’ont trouvés, à ce mot sublime, « anarchie », ces écrivassiers vénaux, dont les tartines sont payées non pas selon le plus ou moins de valeur du fond des choses qu’ils traitent, mais bien selon le degré de fourberie qu’ils y déploient.
Nous savons bien que les gouvernements de tous pays, ont un intérêt majeur de détourner l’attention des peuples de ce grand mouvement en avant, qui se produit partout malgré eux, nous savons aussi que tous les moyens, grands et petits, seront employés pour la répression de notre idée qui fait tant de chemin, mais ce que nous avons mieux encore, c’est que rien ne l’arrêtera. Elle a germé, il faut qu’elle pousse, qu’elle s’étende, qu’elle couvre le globe.
Cela doit être, et cela sera d’autant mieux que nous sommes aidés dans notre tâche par ceux-là même qui veulent l’enrayer. Leur impuissance est si grande, qu’ils n’ont réussi jusqu’à présent qu’à faire de la propagande et à pousser ferme la vulgarisation de nos principes.
On peut détruire un parti, anéantir un peuple, mais on ne peut étouffer une idée, surtout quand elle est généreuse et qu’elle vise au bien être de la grande humanité, seule patrie de l’honnête homme.
Continuez vos boucheries tant que vous êtes les maîtres, messieurs les bourgeois, rééditez s’il vous plaît Chicago, Xéres, Nouméa encore où trop lâches pour accomplir en France vos ignobles forfaits, vous y envoyez nos martyrs pour les y supplicier, poussant la férocité jusqu’à les priver de la consolation suprême de mourir au milieu des leurs.
Ainsi vous avez fait de Cyvoct et tant d’autres ; que le sang de tous vous retombent sur la tête.
Continuez votre despotisme barbare, perquisitionnez toujours, emprisonnez toujours et surtout rendez bien public les exploits de vos meutes policières, payez bien cher ces journaleux à tant la ligne, pour qu’ils daubent à plume que veux-tu sur les anarchistes, allez de l’avant, ça fait de la réclame, et de la bonne…
Dites que nous sommes des voleurs, des pilleurs, des assassins, et si jamais nous protestons ce sera quand vous cesserez.
Vos attaques ne prouvent qu’une chose, messieurs les intrus, c’est que la frousse vous empoigne en voyant se dessiller les yeux du grand populo ; alors votre tête s’égare et dans votre affolement vous commettez des crimes et vous les imputez à l’anarchie.
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