La Presse Anarchiste

Couches sociales en U.R.S.S… et chez nous

M. de Kerillis est allé en Rus­sie. C’est de mode d’al­ler voir ce qui se passe au pays de l’homme-au-cou­teau-entre-les-dents ; là il a fait des décou­vertes. « Cinq couches, dit-il, s’ob­servent déjà très distinctement :

« Pre­mière couche. Les têtes du par­ti ; les hauts fonc­tion­naires ; les chefs de l’ar­mée et de la Gué­péou ; les grands écri­vains. (Je vous recom­mande de jeter un regard sur la luxueuse vil­la de Maxime Gorki !) 

« Deuxième couche. Les ingé­nieurs ; les tech­ni­ciens ; les intel­lec­tuels ; les médecins.

« Troi­sième couche. Les oudar­niks (c’est-à-dire les ouvriers de choc) et les membres subal­ternes du par­ti et de la Guépéou.

« Qua­trième couche. La masse esclave des pay­sans et des ouvriers. 

« Cin­quième couche. Les « intou­chables », c’est-à-dire les pros­crits et les exclus : anciens nobles, anciens kou­laks, anciens com­mer­çants, popes, rab­bins, sus­pects politiques.

« Ces classes se dif­fé­ren­cient par le salaire, le stan­dard de vie, la tenue ves­ti­men­taire et, bien enten­du, par les condi­tions de loge­ment et l’alimentation. »

Comme nous n’a­vons pas les moyens d’en­voyer des envoyés spé­ciaux, nous avons pen­sé faire un voyage cir­cu­laire à Paris dans la Seine et nous avons obser­vé nous aus­si, cinq couches.

Pre­mière couche. Les maîtres : les socié­tés finan­cières et indus­trielles, les trusts commerciaux.

Deuxième couche. Les poli­ti­ciens, classe inter­mé­diaire, don­nant l’illusion de l’autorité.

Troi­sième, couche. Les para­sites : inter­mé­diaires, mer­can­tis, démar­cheurs, poli­ciers, les hauts fonc­tion­naires de l’État, les militaires.

Qua­trième couche. Les valets : jour­na­listes, gens de plume, membres d’académies, de socié­tés intellectuelles.

Cin­quième couche. Les pro­duc­teurs : les ingé­nieurs, les méde­cins, les manuels, les agri­cul­teurs, tous ceux dont le labeur crée des richesses.

Il y aurait une sixième couche, celle des chômeurs.

Ces dif­fé­rentes couches, comme en Rus­sie, se dif­fé­ren­cient par le salaire, le stan­dard de vie, le loge­ment, l’a­li­men­ta­tion, etc.

Les palaces ne sont pas habi­tés par des travailleurs.

II y a six cent mille autos dans Paris mais l’ou­vrier prend le métro.

De même qu’il y a des tailleurs sur mesures pour les for­tu­nés et la confec­tion des maga­sins pour la roture ; des quar­tiers salubres, des arron­dis­se­ments et une zone qui déciment leurs habi­tants ; un luxe inso­lent et une misère immense, des reli­gieux bien gras et des laïcs famé­liques, des monar­chistes à leur aise dans la Répu­blique, des répu­bli­cains pros­crits à la San­té, à la Petite-Roquette, à Fresnes, etc.

L’in­jus­tice, la misère, en un mot toutes les tares inhé­rentes à une socié­té civilisée

… Il y a là matière à articles que le valet de plume Kerillis ne fera pas, car il importe à ses maîtres de décou­vrir les tares ailleurs et de cacher soi­gneu­se­ment les nôtres.

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