La transformation sociale qui doit amener le règne de la justice sur la terre comme au ciel n’est pas éloignée, parce que les masses populaires sont arrêtées sur les moyens à employer pour arriver au grand but. Ces moyens sont l’instruction, le travail, l’épargne, la morale, la moralité, l’association sous toutes ses formes morales. Avec ces moyens-là, la marche est lente, mais elle conduit sûrement au but, et elle a cela de sublime, c’est qu’à chaque pas la transformation sociale s’opère sans secousse et sens perturbation. Pourquoi alors avons-nous des ennemis ? Peu nous importe qu’ils soient engendrés par l’ignorance ou la mauvaise foi, ils existent. Ce sont ceux qui nous maudissent, qui dénaturent nos intentions, qui nous calomnient ; ce sont ceux qui entravent nos efforts par les moyens les plus divers ; ce sont ceux qui nous combattent par leurs paroles, par leurs journaux et par leurs manœuvres de tous genres. Ils ne sont exclusivement ni dans un parti, ni dans un autre, ils appartiennent à toutes les classes de la société.
Cependant, nous voyons en général qu’ils appartiennent partout, plus spécialement aux partis gouvernementaux. En Suisse, les organes du parti conservateur ont manifesté au Congrès ouvrier de Genève des sentiments de bienveillance, tandis que la presse radicale du canton de Neuchâtel a traité le Congrès de la Société internationale des Travailleurs de la manière la plus inconvenante et avec ce langage méchant, stupide, calomniateur, qu’on ne retrouve que dans les journaux rétrogrades de 1848. Ce n’est donc pas si étonnant que le prétend un journal de la Chaux-de-Fonds, si nous faisons d’amers reproches à une fraction du parti radical ; c’est pour nous défendre légitimement, que nous sommes obligés de riposter contre les coups que nous porte l’organe de ce parti. Pourquoi nous attaquerions-nous à ceux qui nous prodiguent des éloges ou qui nous laissent tranquilles ? Nous frappons sur celui qui nous frappe ; nous nous heurtons contre l’obstacle placé sur notre route ; nous passons à travers le corps de celui qui se met au travers de la voie du progrès, de la voie que nous parcourons.
La signification des vieux partis politiques disparait, et des éléments qui les composaient se constitue le parti de la Démocratie sociale.
Nos ennemis sont ceux qui nous entravent ; nos amis sont ceux qui nous laissent marcher ou qui nous aident, peu importe leur origine. Nous ne voulons le drapeau d’aucun parti ; nous ne voulons entrer au service de qui que ce soit, mais nous admettons tous les combattants dans nos rangs.
Ceux qui nous suivent et nous aident sont des amis, des frères ; ceux qui s’éloignent de nous pour nous insulter et nous combattre sont nos ennemis.