La Presse Anarchiste

Les épaves de l’armée Wrangel

« On con­state avec regret qu’il se forme à ce pro­pos par­mi les réfugiés un courant d’opinion hos­tile à la France et à la Ser­bie. Ce n’est pour­tant de la faute ni de la France, ni de la Ser­bie, si l’armée Wrangel s’est effon­drée d’un seul coup et a cou­ru s’embarquer dans les ports de Crimée au moment où l’on croy­ait qu’elle défendait avec acharne­ment les deux isthmes reliant la Crimée au con­ti­nent. Les chefs de cette armée ont pub­lié des réc­its mir­i­fiques d’où il résul­tait que l’embarquement s’était effec­tué dans les con­di­tions rel­a­tive­ment les plus sat­is­faisantes. On aurait mieux aimé appren­dre que la défense d’isthmes pas­sant pour impren­ables avait été aus­si bril­lam­ment organ­isée — et soutenue. C’est grâce à la marine française qu’ont pu s’embarquer plus de 70.000 sol­dats et plus de 100.000 civils. Pour­tant, d’après des ren­seigne­ments con­cor­dants qui nous parvi­en­nent, c’est à la France que s’en pren­nent de leurs mal­heurs beau­coup de ces réfugiés. Les voilà main­tenant qui s’en pren­nent à la Ser­bie, alors que Bel­grade et d’autres villes serbes sont encom­brées d’une pop­u­la­tion russe qui y mène une vie peu édi­fi­ante. Nos amis et nous sommes bien récom­pen­sés de sac­ri­fices immenses.

« Il importe de liq­uider cette sit­u­a­tion. La France ne peut pas entretenir indéfin­i­ment une armée de 70.000 Russ­es, qu’ils soient can­ton­nés ici ou là. Elle ne peut pas, non plus, laiss­er dire à ces hommes, sol­dats ou officiers, armés ou out­il­lés par la France, et qui n’ont pas su défendre d’admirables posi­tions, que la France est cause de leur défaite ou de leur mis­ère. Nous ne désirons pas pour l’instant relever un cer­tain nom­bre de faits qui expliquent trop bien la déban­dade de Crimée. Mais il faut aver­tir les réfugiés valides qu’ils auront prochaine­ment à sub­venir par leur tra­vail à leur pro­pre entre­tien. Les con­tribuables français se refuseront à pay­er plus longtemps, sur le Bospho­re, sur l’Adriatique ou sur la Côte d’Azur, l’entretien d’oisifs qui passent leur temps à récrim­in­er con­tre nous ou à chercher dans les jeux de cartes la solu­tion de la ques­tion russe. »

[/(Auguste Gau­vain, Jour­nal des Débats, 25 déc.)/]


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