Parmi les chemins qui peuvent mener à la transformation du monde capitaliste, celui que suit la coopérative de consommation n’est guère semé d’obstacles risquant de mettre en danger la sécurité personnelle de ses adhérents. Ceux qui se donnent entièrement ou tout spécialement à ces groupements ne sont pas des révolutionnaires au sens complet du mot.
C’est donc une organisation un peu à part qui n’a rien de commun avec le syndicat, la ligue antimilitariste, la libre pensée, le Parti socialiste ou les groupes anarchistes-communistes ; autant de groupements où l’adhérent risque à tout instant les représailles de la bourgeoisie, depuis la perte de son travail jusqu’à la prison et même la mort.
C’est une organisation utile, où le besoin de combativité n’est pas nécessaire, mais où l’activité de « tempéraments combatifs » doit se manifester, si l’on veut que la coopérative de consommation soit une œuvre de transformation sociale développant ses cadres dans la société actuelle, tout en restant dans la limite de ses fonctions en société communiste.
Puisque la coopérative de consommation peut être un des facteurs qui nous aidera à la réalisation de notre idéal communiste, nous devons étudier la forme que doit revêtir ce groupement, afin d’obtenir de lui le maximum de résultats et avoir en mains un outil sérieux dont on pourra se servir au lendemain de la Révolution.
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Dans chaque localité ou dans chaque quartier, les consommateurs désirant se substituer aux commerçants locaux pour organiser la répartition des produits et articles de consommation, se réunissent et fondent une société coopérative de consommation. Tous leurs efforts doivent tendre à ne répartir que des aliments purs et des articles de toute première qualité — aux plus bas prix.
Ils auront recours souvent aux conseils d’hommes compétents médecins, chimistes, ingénieurs, etc., qu’ils choisiront parmi les personnes sympathiques au monde du travail.
Cela les obligera à une besogne de recherche parmi les producteurs ; mais, ce travail nécessaire une fois effectué, la liste des fournisseurs sera établie, le Comité de direction local (membres) n’aura plus qu’à suivre les achats, comparer la qualité des produits à chaque réception de marchandise.
Un gérant, imbu des directives exposées plus haut, appliquera les méthodes d’achat et de répartition des produits, étudiées par le Comité de direction et lui-même.
Avec intention, je n’ai pas parlé du Conseil d’administration qui n’existe que conformément à la loi, et dont les membres, au nombre de sept au minimum, se relaieront, tous les six mois par exemple, pour former le Comité de direction.
Tablant sur leurs moyens de transports et sur les facilités de communiquer facilement entre elles, les sociétés coopératives de consommation se grouperont par régions, départements, villes, etc…, et formeront un Office de consommation régional, dont le siège sera au lieu le plus accessible à tous.
Cet Office de consommation groupera les délégués de chaque société et se réunira aussi souvent que possible.
Il recevra les offres de service des fournisseurs, il enverra à ceux-ci un questionnaire demandant les prix et conditions pour telles quantités et telles destinations, et, muni de tous ces renseignements, il établira une circulaire mensuelle qu’il adressera à toutes les sociétés de son ressort, circulaire indiquant le prix des différents produits avec les conditions de livraison ; chaque société indiquera en marge la quantité dont elle est preneur et retournera la circulaire à l’Office de consommation.
Celui-ci, à son tour, passera l’ordre aux fournisseurs d’expédier, en indiquant les adresses des destinataires.
À la réception des marchandises, la société enverra les fonds représentant le montant de la facture à l’Office de consommation qui réglera les fournisseurs.
Les frais généraux du bureau de l’Office de consommation seront payés par les sociétés, au prorata du montant de leurs achats durant l’exercice écoulé (1 mois, 2 mois ou 3 mois).
Les Offices de consommation établiront entre eux des rapports constants qui leur serviront à se communiquer les renseignements intéressant la production et la fabrication des produits dans leurs régions respectives.
N. B. — Les Offices d’alimentation ayant fonctionné durant la guerre nous ont servi d’exemple, et certains d’entre eux n’ont grevé les achats que de 0,23 pour cent. On avouera que c’est un résultat.
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Je ne pense pas qu’il soit utile d’envisager la création d’entrepôts inter-régionaux et, principalement, dans les principaux ports, pour l’emmagasinement des produits exotiques ; il y a là un rude pas à franchir, et les risques à courir ne me paraissent pas en rapport avec les avantages qu’on pourrait en retirer.
Contentons-nous de faire notre possible pour que le mouvement coopératif reste dans les limites que nous avons tracées, et laissons aux groupements artistiques, aux groupements sportifs et aux groupements humanitaires, le soin de favoriser, chacun en ce qui le concerne, l’art, le sport, les secours aux nécessiteux.
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