le grand blessé [[Ne s’en offenseront point les rares qui furent de la révolte.]].
Le printemps est allumé en fleurs de joie
parmi les yeux,
sur mon chemin.
Car je vois,
Je me promène parmi les gens
et c’est la guerre qui passe, —
hideuse.
Je béquille jusqu’au soleil de la rue et parmi
l’ombre des jardins,
mon corps de pantin avachi, —
mon pauvre corps… en mal de caresses !
mon front crevé en mal de rêves,
ma viande qui voudrait
vivre.
Il fait un petit vent doux de printemps.
On dirait que l’embaume l’amour,
ce petit vent si deux,
doux à faire pleurer les infirmes, —
pour toujours.
J’en ai vu de l’espoir
depuis que la guerre est finie !
Mais moi…
C’est pas la peine, va, ne dis rien ! !
D’illusion !
Je n’en ai plus : ça vaut mieux…
Mais j’ai de la haine
vois-tu
C’est les femmes, – surtout.
Quand je passe près d’elles,
– avec des chapeaux ou en cheveux, –
en suant ma misère et ma souffrance,
Il y a de l’eau qui mouille leurs yeux
d’anges déchus et de bonnes bêtes.
Leur pitié !
c’est une insulte, c’est du mépris
et j’ai envie de leur crever le ventre avec mes
béquilles.
et de leur fêler leur crâne – un grelot fou !
Ah ! les garces !
Si j’appuyais sur leurs gueules de porcelaine,
ma face de cauchemar où suintent les fistules –
à jamais inguéries,
elles crieraient, elles crieraient !
Ah ! les garces !
Elles n’ont point crié leurs entrailles et leur cœur.
Elles ont pleuré… peut-être,
acclamé les martyrs et tourné les obus.
Elles nous ont soigné avec le sourire…
pour qu’on y retourne, –
là-bas !…
[/Marcel