La Presse Anarchiste

La propagande antimilitariste

Une confé­rence extra­or­di­naire du Bureau Inter­na­tio­nal Anti­mi­li­ta­riste s’est tenue à Ber­lin du 2 au 4 août. C’était un Congrès Inter­na­tio­nal qui avait été convo­qué pour cette date. Il devait se tenir à Vienne ; mais la police autri­chienne ayant empê­ché la tenue de Congrès on fut for­cé, à la der­nière minute, de démé­na­ger à Ber­lin. Beau­coup de délé­gués n’ayant pu arri­ver à temps, le Congrès se trans­for­ma en Confé­rence Internationale.

La seule ques­tion à l’ordre du-jour était la rati­fi­ca­tion de l’accord sur­ve­nu entre le Bureau Inter­na­tio­nal Anti­mi­li­ta­riste et l’Association Inter­na­tio­nale des Tra­vailleurs, accord adop­té par le Plé­num de l’AIT tenu à Paris en mai 1926.

L’accord est le suivant :

« 1° Le BIA et l’AIT créent une com­mis­sion anti­mi­li­ta­riste inter­na­tio­nale pari­taire, (CIA) de 6 membres.

« 2°) Se basant sur les décla­ra­tions de prin­cipes du BIA et de l’AIT, la CIA aura à exé­cu­ter le tra­vail suivant :

« a) Docu­men­ter la presse révo­lu­tion­naire sur le déve­lop­pe­ment des pré­pa­ra­tifs de guerre, sur­tout quant à la fabri­ca­tion des armes et de toutes sortes de maté­riel de guerre ;

« b) Don­ner un expo­sé sur les causes éco­no­miques de conflits de guerre à l’heure actuelle et à l’avenir ;

« c) Trai­ter de la ques­tion du désarmement ;

« d) Démon­trer la fausse route du paci­fisme et du pseudo-militarisme ;

« e) Don­ner une docu­men­ta­tion sur l’activité anti­mi­li­ta­riste pratique ;

« f) Publier des mani­festes et des brochures.

« 3°) La CIA est res­pon­sable devant le BIA et l’AIT et envoie tri­mes­triel­le­ment un rap­port de son acti­vi­té à ces deux Internationales.

« 4°) La CIA éla­bore un bud­get semes­triel qu’elle pré­sente aux deux Inter­na­tio­nales qui s’engagent, après rati­fi­ca­tion, de cou­vrir à parts égales les frais de la CIA.

« 5°) Dans la réa­li­sa­tion de son tra­vail, la CIA se pla­ce­ra sur le point de vue que tous les syn­di­cats accep­tant les décla­ra­tions de prin­cipes de l’AIT devraient adhé­rer à celle-ci par l’intermédiaire de leurs cen­trales et que tous les grou­pe­ments anti­mi­li­ta­ristes et anar­chistes accep­tant la plate-forme du BIA devraient adhé­rer à ce dernier. »

Nous sommes heu­reux de consta­ter que cet accord a ren­con­tré l’approbation presque una­nime de la Confé­rence. L’activité du BIA s’était, en effet, affai­blie der­niè­re­ment, et pour cause. Une pro­pa­gande comme celle de l’antimilitarisme ne peut avoir un suc­cès et un reten­tis­se­ment que si elle s’appuie sur la grande masse des exploi­tés – les vic­times sécu­laires du mili­ta­risme et de l’impérialisme. Cette base manque au BIA. Ce der­nier est com­po­sé, dans sa majeure par­tie, de grou­pe­ments idéo­lo­giques à nombre d’adhérents très res­treint. Sa ten­ta­tive de gagner l’affiliation du mou­ve­ment syn­di­ca­liste inter­na­tio­nal n’a pas pu avoir le suc­cès qu’il escomp­tait pour la simple rai­son que l’Association Inter­na­tio­nale des Tra­vailleurs unis­sait pré­ci­sé­ment en son sein les orga­ni­sa­tions syn­di­ca­listes révo­lu­tion­naires de tous les pays et que la pro­pa­gande de l’antimilitarisme entrait éga­le­ment dans le pro­gramme d’activités de l’AIT. Rap­pe­lons ici le para­graphe des sta­tuts de l’AIT concer­nant cette propagande :

« Le syn­di­ca­lisme révo­lu­tion­naire com­bat le mili­ta­risme sous toutes ses formes et consi­dère la pro­pa­gande anti­mi­li­ta­riste comme une de ses taches les plus impor­tantes dans la lutte contre le sys­tème actuel. En pre­mière ligne, il faut consi­dé­rer le refus indi­vi­duel et, sur­tout, le boy­cot­tage orga­ni­sé contre la fabri­ca­tion du maté­riel de guerre. »

Le même point de vue est aus­si expo­sé dans les Sta­tuts et la décla­ra­tion de prin­cipes du BIA. Il était donc de pure logique qu’un tra­vail en com­mun des deux orga­nismes inter­na­tio­naux sur le ter­rain de l’antimilitarisme ne ferait que ren­for­cer et appro­fon­dir la tac­tique anti­mi­li­ta­riste de la classe ouvrière dans sa lutte contre le capi­ta­lisme, l’État et les guerres engen­drées par ces institutions.

À cet effet, le cama­rade Lan­sink jr, qui repré­sen­tait, à la Confé­rence, l’Internationale, la Fédé­ra­tion du Bâti­ment de la Hol­lande, résu­mait admi­ra­ble­ment bien la valeur morale et pra­tique de cette col­la­bo­ra­tion : « Il nous faut plus de clar­té dans notre lutte contre le mili­ta­risme », avait-il décla­ré, « et le para­graphe V de l’accord va pré­ci­sé­ment nous la don­ner, en tant que toutes les orga­ni­sa­tions ouvrières à prin­cipes iden­tiques adhé­re­ront à l’AIT, pen­dant que toutes les orga­ni­sa­tions cultu­relles et anar­chistes s’affilieront au BIA. C’est alors que nous aurons deux centres impor­tants de concen­tra­tion dans la lutte contre le mili­ta­risme – un centre cultu­rel et un centre éco­no­mique – et dont la plate-forme com­mune pour la lutte contre l’ennemi com­mun sera la Com­mis­sion Inter­na­tio­nale Anti­mi­li­ta­riste. »

Cette Com­mis­sion Anti­mi­li­ta­riste est com­po­sée de six membres, à savoir : De Jong, C. J. Björk­lund et la cama­rade W. Eike­boom pour le BIA, et A. Mül­ler-Leh­ning, B. Lan­sink jr et A. Sou­chy­po­ur l’AIT.

La Confé­rence a déci­dé de tenir le pro­chain Congrès anti­mi­li­ta­riste à la suite du 3e Congrès de l’AIT et dans la ville où se tien­dra ce dernier.

La Presse Anarchiste