La Presse Anarchiste

Une oubliée : Flora Tristan

Proches ou loin de notre pen­sée, les œuvres des savants, artistes, phi­lo­sophes, his­to­riens, etc., sont les grandes forces psy­cho­lo­giques de l’humanité.

Dans un de ses bons livres, Jean Ros­tand nous expose, comme il sait le faire, la puis­sance de foi des « hommes de véri­té » (Fon­te­nelle, La Roche­fou­cauld, Claude Ber­nard, etc.). Œuvres gran­dioses, certes, noms pres­ti­gieux sans doute. Mais il en est d’autres, oubliés aujourd’­hui et qui dési­gnent pour­tant des per­son­na­li­tés atta­chantes, voire héroïques, envers les­quelles les hommes ne se sont pas tou­jours mon­trés géné­reux. C’est ce qui nous amène à par­ler de Flore Tristan.

Où trou­vons-nous ce nom ? Les études bio­gra­phiques consa­crées aux pion­niers des causes huma­ni­taires l’écrivent rare­ment, et c’est seule­ment à la noto­rié­té du peintre Gau­guin, son petit-fils, qu’il doit d’être par­fois cité. Mais jamais, à cette occa­sion, il ne sera fait allu­sion à la fana­tique dévo­tion aux devoirs que cette femme admi­rable s’imposa durant une vie abré­gée par des sacri­fices trop peu spec­ta­cu­laires pour tenir une place dans l’histoire.

La courte vie de Flore ne fut que luttes et tour­ments. De sa nais­sance à sa mort (à qua­rante et un ans), en elle comme autour d’elle, jamais la paix ne régna.

Son père, don Maria­no de Tris­tan, issu d’une noble famille péru­vienne, avait héri­té lui-même d’un carac­tère indé­pen­dant et pas­sion­né. Colo­nel dans l’armée espa­gnole, il connut Thé­rèse Lai­né, qui, fuyant la Révo­lu­tion fran­çaise, vivait misé­ra­ble­ment à Bilbao.

Pour des rai­sons assez obs­cures, il n’épousa jamais celle qu’il aimait, mal­gré la ten­dresse qu’il lui voua jus­qu’à sa mort. Mais on sait que le colo­nel don Maria­no s’était tou­jours mon­tré rebelle à toute forme de lien.

Quoi qu’il en soit, la situa­tion de ce « faux ménage » – comme on dit – eut un reten­tis­se­ment consi­dé­rable sur le des­tin de Flore, car plus tard, quand mou­rut le colo­nel, sa femme, Thé­rèse Lai­né, ne fut pas consi­dé­rée comme une héri­tière légale. Puis, comble de mal­heur, un impor­tant envoi de fonds, peut-être une for­tune, avait été englou­ti dans le nau­frage du navire qui le transportait.

Le ménage Tris­tan s’était fixé à Paris un peu avant la nais­sance de Flo­ra, en 1803. Don Maria­no, ami de Boli­var, prit un inté­rêt pas­sion­né aux contro­verses que celui-ci sou­te­nait contre les bona­par­tistes. On le trai­tait de jaco­bin – comme tous les hommes oppo­sés à Bona­parte d’ailleurs. « Déno­mi­na­tions encore tout impré­gnées de sang », écri­ra Flo­ra plus tard.

« Liber­té, oppres­sion, éga­li­té », ces termes bien des fois pro­non­cés, étaient nou­veaux pour elle, et son père tâchait d’en faire com­prendre le sens à l’enfant qu’elle était alors. Mais cela était bien au-des­sus de sa por­tée, d’autant plus que don Maria­no, trop fan­tai­siste, n’était guère un éducateur !

Il mou­rut en 1808, lais­sant ses deux filles – Flo­ra avait une sœur – et leur mère sans un sou.

Réfu­giée à la cam­pagne avec ses deux enfants, Thé­rèse Lai­né se voit réduite, pour vivre, à accep­ter toutes les besognes et n’eut jamais le cou­rage ni sur­tout le loi­sir d’instruire Flore, son aînée.

Dès son enfance, celle-ci sen­tit vive­ment l’iniquité de son sort et d’autant plus péni­ble­ment que son nom était celui d’une famille de haut rang.

Fière, les pri­va­tions de toute sorte, l’humble condi­tion de son milieu l’humiliaient, l’irritaient. Et l’épuisement de sa mère au tra­vail l’affectait douloureusement.

D’être sans ins­truc­tion aus­si la ren­dait avide d’acquérir l’éducation, la science qui lui avaient été refu­sées ; l’orthographe, qu’elle igno­ra long­temps, prit pour elle une impor­tance qui tour­nait à l’obsession. Mar­ga­ret Gold­smith, sa bio­graphe, à laquelle nous emprun­tons, ain­si qu’à Jules Puech, des ren­sei­gne­ments pour ce petit tra­vail, nous dit que, jeune fille, « elle dis­si­mu­lait ses igno­rances et ses incer­ti­tudes der­rière un masque d’arrogance qu’elle ne dépouilla jamais entiè­re­ment, sur­tout en face des étrangers ».

Dis­tante, d’une froi­deur déci­dée, mais d’une grande beau­té, il rayon­nait d’elle un charme qui, plus tard, lui per­mit d’exercer une emprise rare sur les audi­toires populaires.

De retour à Paris avec sa mère, en 1818 – elle avait alors quinze ans – on les trouve ins­tal­lées dans un quar­tier des plus mal famés : la place Mau­bert. Il lui fal­lait gagner sa vie. Entrée dans un ate­lier de litho­gra­phie, elle en épou­sa le patron, un nom­mé Cha­zal, en 1821. Peut-être vou­lait-elle ain­si mettre fin à l’extrême pau­vre­té dont elle avait tant souf­fert ? On ne sait. Mais elle ne put sup­por­ter son ménage mal­gré une situa­tion maté­rielle accep­table. Elle rom­pit et confia à sa mère la garde des trois enfants qui lui étaient nés.

Tra­quée par son mari, sys­té­ma­ti­que­ment per­sé­cu­tée, elle était chas­sée de chez ses employeurs, aux­quels il fai­sait connaître la situa­tion de sa femme. Ren­voyée par ses logeurs, Flore doit encore sou­te­nir une lutte impla­cable pour gar­der ses enfants, dont la der­nière, Aline, future mère de Paul Gau­guin, devait connaître une enfance plus misé­rable encore que ne l’avait été celle de Flo­ra ! Contre vents et marées, celle-ci assu­rait l’existence des enfants.

La haine de Cha­zal, son mari, ne la lais­sant pas en paix, elle se réfu­gia en Angle­terre, où elle res­ta cinq ans. C’est durant cette période que sa dure exis­tence la fit réflé­chir aux injus­tices, aux souf­frances du monde. Elle com­mence à lire, à pen­ser, à étu­dier, inci­tée qu’elle y est par une large pro­pa­gande des jour­naux anglais, comme « The Pion­ner », qui appe­laient les tra­vailleurs à la grève générale.

Elle ren­tra en France dans l’hiver 1829, mais ne pour­ra évi­ter une ren­contre avec Cha­zal, son mari, qui, furieux de ne pou­voir la vaincre, tira sur elle. Légè­re­ment bles­sée, elle se réta­blit vite. Son mari éco­pa vingt ans de tra­vaux forcés…

Après le drame, nous la retrou­vons encore en Angle­terre, où elle pense assu­rer l’avenir de ses enfants. Pour cela, elle ten­te­ra de nouer des rela­tions avec la famille péru­vienne de don Maria­no, son père. Sans succès.

Alors elle se décide à par­tir pour le Pérou, où elle ne sera pas plus heu­reuse, le « mariage » irré­gu­lier de ses parents étant mal jugé, comme aus­si le voyage d’une femme seule à l’étranger.

Tou­jours vaillante, tou­jours lucide mal­gré sa san­té ébran­lée et ses amères décep­tions, la voi­ci de nou­veau en France ; elle va publier deux bro­chures, ses pre­miers écrits pro­ba­ble­ment, trai­tant de l’affranchissement de la femme et de la néces­si­té de réta­blir le divorce. C’est alors qu’elle com­men­ce­ra à envi­sa­ger le pro­blème social, mais du point de vue fémi­niste. On la com­prend. Elle connaît que c’est bien l’inégalité impo­sée à son sexe qui lui valut sa triste vie conju­gale avec son dra­ma­tique dénoue­ment. De plus, la misère de l’ouvrière lui est, d’expérience, aus­si connue.

Comme les saint-simo­niens, elle envi­sage l’amélioration de l’humanité par l’égalité des sexes et ne perd jamais de vue la cause fémi­niste, même au plus fort de son acti­vi­té dans la lutte ouvrière. Au reste, dans son livre l’Union ouvrière, – bien oublié, sa vive cri­tique de la morale cou­rante parut des plus osées.

Elle admi­rait Fou­rier, qui condam­nait dure­ment le prin­cipe du mariage, pro­cla­mant la haute mora­li­té de l’amour libre. La faillite de son aven­ture conju­gale n’était sans doute pas étran­gère à cette admi­ra­tion. Idéa­liste par nature, les théo­ries huma­ni­taires l’aideront gran­de­ment à s’évader de l’impitoyable lutte pour la vie.

Réflé­chis­sant de plus en plus pro­fon­dé­ment, elle se convain­quit que l’intérêt du tra­vailleur exi­geait autre chose que de douces réformes. Elle écrit alors : « Les masses ouvrières seules doivent, par une asso­cia­tion étroite, se libé­rer de l’oppression et de la famine. »

Puis le temps arrive où elle accorde moins de sérieux à Fou­rier. Plus atten­ti­ve­ment, elle exa­mine les tra­vaux de Robert Owen, dont la colo­nie de « New Lamark » l’intéressait vive­ment. Les méthodes paci­fistes l’emportèrent alors, dans son esprit, sur la vio­lence, encore qu’elle trou­vât Owen trop convain­cu des « influences exté­rieures sur l’évolution de l’être humain ».

Nous sommes à pré­sent en 1837. Elle connaît Robert Owen. Son inté­rêt pour l’Angleterre en est éveillé com­plè­te­ment. Elle veut y retour­ner dès que le grand ouvrage qu’elle pro­jette serait ter­mi­né. Un grand ouvrage : « Les péré­gri­na­tions d’une paria. » C’est le récit du voyage au Pérou. Il parut en 1838 et fut son pre­mier suc­cès littéraire.

Son talent d’écrivain, réel, se confirme la même année avec son roman « Méphis ». La voi­ci col­la­bo­rant à plu­sieurs jour­naux, éten­dant ses rela­tions ; son appar­te­ment, au 100 de la rue du Bac, devient un salon lit­té­raire coté. La sta­bi­li­té dans la vie de Flo­ra semble s’établir.

Mais atten­tion ! « semble » seulement.

Han­tée encore une fois par un désir de chan­ge­ment comme par la mis­sion sociale qui s’imposait à sa conscience dont l’appel est pour elle un devoir, elle décide de retour­ner à Londres, où, à leurs sources, elle étu­die­ra les tra­vaux d’Owen, de John Grey et d’autres. Elle se met alors à une étude sur l’Angleterre dans laquelle elle s’oppose sys­té­ma­ti­que­ment à la vio­lence dans la guerre des classes, ce qui ne l’empêchera pas d’y pla­cer, en exergue, « Mieux vaut périr par l’épée que mou­rir de faim. »

Elle prend part à des réunions secrètes, ce qui comble bien son esprit roma­nesque. Elle écri­ra : « Dans le secret des cavernes, les apôtres ensei­gnaient les caté­chu­mènes et leurs paroles étaient plus puis­santes que la force des Césars. »

Sa véri­table voca­tion s’affirme dans son livre Pro­me­nades dans Londres, publié à Paris en 1840 et qui reflète une pro­fonde connais­sance du pro­blème ouvrier de ce pays. On y trouve une étude peu ordi­naire des condi­tions indus­trielles qui font la richesse des uns et la misère des autres.

Infa­ti­ga­ble­ment, Flo­ra ira d’un bout à l’autre des dis­tricts ouvriers, posant des ques­tions aux patrons, pre­nant des notes, éta­blis­sant des sta­tis­tiques sur les salaires et les condi­tions éco­no­miques en France et en Grande-Bre­tagne [[N. de la R. – Sou­li­gnons que cette étude remonte à 1840, que d’autres furent aus­si publiées à cette époque. Et les caté­chu­mènes enra­gés de Marx pensent que c’est lui, et Engels, qui furent les révé­la­teurs de la véri­té sur la nais­sance du capi­ta­lisme anglais.]].

Elle connaît à pré­sent le sort des tra­vailleurs et, plus que jamais, est réso­lue à faire quelque chose pour eux. « Sur le sol anglais – écrit-elle – vingt mil­lions de pro­lé­taires gémissent ; qui leur révé­le­ra à eux-mêmes leur pou­voir et orga­ni­se­ra l’union de leurs forces ? » C’est ce qui lui ins­pi­re­ra son livre l’Union ouvrière, « moins un livre qu’une action », dira-t-elle.

Elle va par­tout où des êtres humains sont oppri­més. En Angle­terre, tou­jours, on la ver­ra étu­diant la pros­ti­tu­tion, visi­tant les aliénés.

Un fou fran­çais, recon­nais­sant tout de même sa langue, lui offri­ra une croix faite de quelques brins de paille : « Prends cette croix, lui dit-il, et va par le monde annon­cer la loi nou­velle. » Elle prend la croix et écrit : « J’accomplirai la tâche que cet homme m’a indi­quée ; je déli­vre­rai la femme de la ser­vi­tude de l’homme ; le pauvre de la ser­vi­tude du riche ; l’âme humaine de la ser­vi­tude du péché. »

Son émo­tion indique-t-elle un côté mys­tique de son carac­tère ? On le dirait, car sa tâche se teinte un peu de sur­na­tu­rel sans pour cela que sa luci­di­té en soit altérée.

Paris l’attire encore. Elle y est ren­trée pour écrire un livre et conti­nuer ce qu’elle consi­dère comme une mission.

Pour cela, Flo­ra orga­ni­se­ra des mee­tings par­tout en France ; elle ten­te­ra de grou­per les ouvriers en « Socié­té de Com­pa­gnon­nage » dans l’esprit de ce qui devait être plus tard les syn­di­cats. Elle est prise à par­tie vio­lem­ment, trai­tée « d’apôtre en jupon », pour­chas­sée par la police et, dans maintes villes, sa chambre sera per­qui­si­tion­née. Ses écrits sont sédi­tieux ? Elle conti­nue­ra de plus belle à les dif­fu­ser. Aucun édi­teur ne veut publier l’Union ouvrière ? elle le fera impri­mer elle-même, tâche ardue quand on n’a pas d’argent ! Il faut recueillir des fonds ? Elle se met en cam­pagne, allant jus­qu’à sol­li­ci­ter le ban­quier Laf­fite qui, furieux, la congé­die. Il est vrai qu’elle n’avait qu’une médiocre confiance dans le libé­ra­lisme de façade de ce bour­geois richis­sime. Flo­ra avait frap­pé à la mau­vaise porte. Mais d’autres devaient s’ouvrir, plus accueillantes à son cou­rage : ce furent celles d’Eugène Sue, de Béran­ger, de Pon­sard, de George Sand.

N’aimant pas qué­man­der, sa nature trop fière pui­sait dans sa foi pour vaincre ses répugnances.

Elle dira plus tard : « Je vais à pied, je visite vingt per­sonnes pour n’en trou­ver que trois qui donnent quelque chose. Seule l’indifférence de ceux que je veux ser­vir, les tra­vailleurs, m’accable, mais je sais que je fais œuvre utile, qu’un grand bien en résultera. »

Cette vision­naire, comme beau­coup d’orateurs brillants, sub­ju­guait moins un inter­lo­cu­teur iso­lé qu’un audi­toire nom­breux. Puis on n’avait pas oublié l’héroïne d’un crime pas­sion­nel, et les esprits mal aver­tis ne la voyaient guère en réfor­ma­trice sociale…

Quoi qu’il en soit, l’apparition de l’Union ouvrière fut une révé­la­tion. Son lan­gage simple était bien à la por­tée de ceux aux­quels il s’adressait ; les noms de Saint-Simon, Owen, Fou­rier, Prou­dhon y étaient cités. « Il ne reste qu’une chose à faire, écrit-elle : agir. Et c’est aux tra­vailleurs de le faire. »

Un bio­graphe de Flo­ra, Puech, dira de l’Union ouvrière : « C’est le plus com­plet résu­mé du caté­chisme révo­lu­tion­naire paru jus­qu’i­ci en France. Il ouvre le champ à la guerre des classes sans contra­rier l’altruisme et le paci­fisme de son auteur. »

Pour Flo­ra, l’aide maté­rielle tem­po­raire qu’apportaient les socié­tés de secours mutuels était insuf­fi­sante. Les causes de la misère res­taient enra­ci­nées. Elle ver­ra se dres­ser les adver­saires de son ensei­gne­ment, c’est-à-dire tous ceux pour qui les concep­tions d’un ave­nir meilleur pour les déshé­ri­tés étaient non seule­ment pure folie, mais atten­tats aux sacro-saints pri­vi­lèges de la classe riche. Il n’y avait que des mal­fai­teurs comme elle pour son­ger à une coopé­ra­tion entre les tra­vailleurs eux-mêmes !

Son idéa­lisme, par cer­tains côtés un peu aveugle – tout amour ne l’est-il pas ? – lui assu­rait que les tra­vailleurs com­pren­draient qu’en don­nant cha­cun deux francs par an ils consti­tue­raient un fonds de sou­tien de quinze mil­lions et que, ain­si, l’union ouvrière serait une force contre le patro­nat, qui se ver­rait désar­mé. Hélas ! elle oubliait, d’abord, que bon nombre d’ouvriers sol­li­ci­tés refu­se­raient leur obole ; elle oubliait encore que les chefs d’industries pou­vaient, quand ils le vou­laient, licen­cier les ouvriers, rien ne les en empê­chant, et qu’alors la contri­bu­tion indis­pen­sable ces­se­rait – au moins pour ceux-là. L’argent néces­saire à la lutte manquerait.

Elle veut réa­li­ser l’union entre les tra­vailleurs. Oui. Mais sans entre­voir que « l’arme éco­no­mique », comme elle l’appelait, n’est pas tout – sur­tout à cause de son insta­bi­li­té – et qu’il y a, qu’il aura tou­jours des fac­teurs moraux et psy­cho­lo­giques qui domi­ne­ront la situation…

Elle oubliait aus­si les stu­pides que­relles entre les membres de diverses cor­po­ra­tions. Sans relâche, on la ver­ra adju­rer les tra­vailleurs de tous les pays d’adhérer à « l’union » sans dis­tinc­tion de natio­na­li­té ou de métier. À cet égard, « elle observe avec cha­grin l’ostracisme de O’Con­nell, qui, au nom de la reli­gion, empê­chait les ouvriers d’Irlande de fra­ter­ni­ser avec leurs cama­rades anglais ».

Son livre paru, Flo­ra repren­dra sa pro­pa­gande active, ne comp­tant pas que son ouvrage suf­fi­rait à lui seul pour éclai­rer les masses populaires.

Alors, dans beau­coup de grandes villes de France, des audi­toires émus et nom­breux iront cher­cher dans ses élo­quentes paroles des remèdes à leur misère, des ensei­gne­ments, des consolations…

Elle se trou­vait à Bor­deaux en 1844 quand une hémor­ra­gie céré­brale la frap­pa. Elle en mou­rut, pri­vant les pauvres qui l’aimaient de son admi­rable dévouement.

Suprême témoi­gnage de res­pect et d’amour pour Flo­ra, qui avait voué toutes ses forces à leur cause, ils éri­gèrent un monu­ment à sa mémoire. Aux mots « Liber­té, Éga­li­té, Fra­ter­ni­té », gra­vés dans la pierre de son tom­beau, ils ajou­tèrent : « Solidarité ».

[/​Marcel Renot./​]

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