La Presse Anarchiste

Du pluralisme en amour

20 mars 1947. — Lu avec plai­sir l’ar­ticle de Vera Livins­ka dans le der­nier Unique. Elle ne veut pas être tra1tée en satel­lite, située sur un plan infé­rieur, défa­vo­ri­sée et infé­rio­ri­sée par rap­port à l’a­mie ou aux amies de son com­pa­gnon de route, de ses amis. Bra­vo ! Voi­là la femme éman­ci­pée, qui n’a rien à voir avec la « femelle » qui se consi­dère juste bonne pour assou­vir le désir d’un male à la recherche d’un exu­toire… Mes amies et moi, nous sommes heu­reux de voir la ques­tion clai­re­ment envi­sa­gée. Nargue à la mora­li­té-men­songe conven­tion­nelle, mais qu’on ne confonde plus « plu­ra­lisme en amour » avec « plu­ra­lisme des cou­che­ries » ou « chien­ne­rie sexuelle », comme le font trop sou­vent cer­tains obsé­dés sexuels, tour­nant autour de nos milieux — et aux­quels, entre paren­thèses, serait bien­fai­sant un séjour de quelque temps dans une ins­ti­tu­tion thé­ra­peu­tique appro­priée. Le plu­ra­lisme amou­reux, c’est la facul­té d’ai­mer, plu­ra­le­ment, d’amour, dans le sens éthique et esthé­tique du terme. — Le plu­ra­lisme des cou­che­ries, la chien­ne­rie sexuelle, mais ils abondent par­mi les bour­geois et les pro­lé­taires, les exploi­teurs et les exploi­tés — autant que les mala­dies véné­riennes et ce n’est pas peu dire. Que la facul­té d’ai­mer en même temps plu­sieurs êtres — d’ai­mer d’un amour durable — avec constance — « par delà le bien et le mal » — sans se lais­ser détour­ner par les ten­ta­tions du milieu ambiant ou les coups d’un des­tin adverse — je ne dis pas que c’est à la por­tée de tout le monde. Et qu’on ne croie pas que je sois par­ti­san ou défen­seur de cet « ersatz » qu’on dénomme « amour pla­to­nique » — fichtre non— mais lorsque le sexuel n’est pas com­plé­ment du sen­ti­men­tal, l’é­ro­tique condi­tion­né par l’af­fec­tion pro­fonde et mutuelle, que pré­sente d’en­ri­chis­sant et d’en­no­blis­sant pour l’es­prit et le cœur le geste… émetteur ? 

Voi­là le pro­blème posé à l’u­sage des uniques et non des irres­pon­sables qui se laissent entraî­ner au gré de leurs pas­sions comme des bou­chons au fil de l’eau. Ceci dit, n’ou­blions pas que toute liber­té — y com­prts la « liber­té de l’a­mour » — ne se conçoit pas sans « res­pon­sa­bi­li­té » correspondante.

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