La Presse Anarchiste

Le maître des maîtres

[/​Ex nihi­lo nihil fit/]

Le Génie :  À moi le chant, la beau­té, le pou­voir de péné­tra­tion, la trame et le tis­su des images belles et immortelles. 

Une voix : Éma­nés de moi, toi et tes rêves péri­ront. Seul, je suis immortel. 

L’A­mour : À moi le fan­tôme éphé­mère jaillis­sant de mon cœur pal­pi­tant. J’ai pour­sui­vi mon rêve jus­qu’à son incar­na­tion. J’ai pris l’I­dée au piège. C’est cette nuit que j’entre dans mon Royaume. 

La Voix : Je l’ai engen­dré éga­le­ment, ô Amour. Tu es comme un grain de sable dans le simoun du Cosmos. 

Le Dévot : Je suis Dieu amal­ga­mé ; mon corps, et mon âme sont emmaillo­tés dans son amour ; je suis tout lui­sant du chrême de l’Éternel. 

La Voix : Je t’ai expec­to­ré dans un bâille­ment. Je t’ai bâti d’air et de vide. Tu es mon Ode à la Bêtise ; l’his­toire de ton espèce sur la pla­nète Terre est la Lita­nie de la Bouffonnerie.

Le Guer­rier : Je suis le Soleil de la Gloire, L’Ar­change du Maté­ria­lisme. Je suis la trom­pette dorée des idéals raciques. Je suis le pro­prié­taire de ce monde. Sala­mandre, je vis dans le feu et dans la flamme. En avant !

La Voix : Je t’ai mis bas lors de ma der­nière visite en enfer.

Satan : Qui es-tu pour par­ler ain­si à mes serviteurs ? 

La Voix : Un plus grand que toi, ô Satan, et que ton ombre, Dieu. Car tous deux vous êtes des reflets du cer­veau humain. Je suis le maitre de Tout ce qui est, de Tout ce qui peut être, Tout ce qui est n’est que mon ombre.

Je suis l’es­prit de vie et de mort. Je suis l’Être et le Non-Être. Je suis races, mondes, guerres, lois, gou­ver­ne­ments, rêves, Mou­ve­ment, Lumière. Je suis le Com­men­ce­ment et la Fin. Je ne puis ni sen­tir, ni pen­ser, ni voir. Je suis le der­nier, le pre­mier, le seul Dieu. 

Je suis la stu­pi­di­té, éter­nelle, immuable.

[/​Benjamin de Cas­seres/​]

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