Chicago. — Les faits finissent toujours par nous donner raison, et si les actes répressifs ne vont pas jusqu’à l’assassinat, comme le 11 novembre 1887, nos détracteurs peuvent faire amende honorable, ou y seraient tenus, puisqu’ils nous imitent et mettent nos principes en pratique. Les mêmes hommes qui mirent à mort cinq de nos compagnons, la haute pègre de Chicago qui a dépensé 500.000 dollars pour en finir avec l’anarchie et les anarchistes, ces mêmes hommes sont coupables du crime d’anarchisme. Dégoûtés de l’insalubrité des rues, abandonnant tout espoir de les voir nettoyer par les pouvoirs constitués et créés pour exécuter les travaux publics, mais qui se bornent à empocher leurs gros émoluments, nos gros bonnets se sont cotisés, et, sous le nom de Fédération civique, se sont équipés et ont entrepris eux-mêmes les travaux que l’administration n’exécutait pas, et l’on peut maintenant aller et venir sans prendre des bains de boue. Encouragés par leur succès, la F. C. a entrepris une campagne contre les joueurs aux courses et a embauché des mouchards pour arrêter les vendeurs de pool, mais ces derniers étaient prévenus : ils se sont munis de mandats d’arrêt et ont fait mettre les mouchards au bloc, à la grande joie des joueurs qui se composent en grande partie des employés, caissiers et calicots, des patrons qui ont formé la F. C., et dont le président est le plus grand spéculateur de blé de Chicago.
Ces messieurs voient d’un mauvais œil leurs employés risquer leurs picaillons, dans la crainte d’avoir à solder leurs comptes, mais, pour faire de l’argent, ils se livrent eux-mêmes à des spéculations effrénées, au risque d’affamer les malheureux ; et ceux qui osent les critiquer, ceux qui trouvent mauvais que les Jessie James soient condamnés à perpétuité pour arrêter un train, tandis que les Gould, les Vanderbilt peuvent impunément voler un chemin de fer, ceux-là, — ils les pendent.
À Waukegan, une petite ville au nord d’ici, on va installer des conduits comme il y en a déjà pour l’eau ou le gaz ; mais ces conduits contiendront du dioxyde de carbone, au moyen duquel l’on peut atteindre 100 degrés de froid et qui peut se régler comme on veut. Le but de cette installation sera la conservation des aliments et la distribution dans les appartements de la température désirée… par ceux qui en ont les moyens ; quant aux autres… qu’ils rôtissent !