Les individus sont tellement moutonniers, tellement dépourvus d’esprit d’initiative et de bon sens utilitaire que bon nombre d’applications dans les sciences, d’idées nouvelles sont encore à l’état de lettre morte. Toute initiative si intéressante soit-elle ne trouve jamais crédit auprès du public, s’il n’y a pas espoir de gain.
Cela tient à ce que les gens croient que l’État ou la commune doivent seuls s’occuper de leur existence. Si bien que l’on s’oublie soi-même. On dirait que les individus vivent en dehors d’eux-mêmes, si je puis m’exprimer ainsi. Nous possédons bien cinq sens, mais ils ne nous sont d’aucune utilité puisqu’il nous manque le sixième — le sens de la vie. À quoi servent ô bonnes gens vos oreilles et vos yeux s’ils ne voient et n’entendent rien.
Croyez-vous que l’électricité, la vapeur en seraient à l’état d’avancement actuel s’il n’y avait pas eu des sociétés financières accaparant ces découvertes pour en retirer profit. Vous saisissez la nuance ? Ce n’est plus l’individu qui s’intéresse à l’électricité, à la vapeur, mais des sociétés financières anonymes. Je ne conteste pas la présence dans ces sociétés d’individus toujours à la recherche de perfectionnements et d’améliorations, mais je veux parler de la foule avachie au plus haut degré, sans personnalité qui pour gagner de l’or fait que l’électricité et la vapeur rayonneront par le monde entier parce que eux ont fourni les capitaux.
Et les gens indifférents iront par chemin de fer sans penser à la force puissante qui les fera passer d’un pays dans un autre, personne ne songera en tournant le commutateur quels progrès nous avons fait depuis la découverte de l’électricité. On s’adapte bêtement et c’est tout.
Il est certain que ces sentiments de recherche, d’initiative existent chez beaucoup d’entre nous, mais ne peuvent se développer dans une société comme la nôtre ; alors on suit le fil de l’eau et on se laisse entraîner dans la civilisation moderne qui nous abêtit et nous exploite.
Léon Hubert