L’expérience et l’utilité.
Nous avons montré ailleurs 1Voir Le mécanisme du raisonnement, Introduction, que ce chapitre reproduit en partie. que toutes les sciences sont expérimentales et utilitaires. Il ne peut en être autrement.
En effet, toutes les connaissances viennent par les sens. Un individu qui naîtrait privé de l’usage de tous les sens ne pourrait entrer en communication avec le milieu extérieur à lui. Un tel individu ne connaîtrait pas. Toutes les connaissances (sciences) sont donc le résultat de l’expérience.
Sans l’expérience, la vie serait impossible. On a fait remarquer que nos sens ne nous trompent pas et que la logique résulte de la sélection naturelle 2Voir, par exemple, Le Dantec, Traité de biologie, Paris, Alcan, éd.. En effet, un individu n’existe que parce que tous ses ancêtres, en séries innombrables, ayant agi conformément aux indications de leurs sens, ont duré, se sont développés, modifiés, reproduits et ont ainsi pu transmettre à leurs descendants leurs facultés et leurs connaissances.
D’ailleurs, l’expérience de tous les instants nous montre qu’il suffit de négliger pendant un court espace de temps les indications de nos sens pour souffrir et même pour mourir.
C’est ce qui se passe, par exemple, si nous ne tenions pas compte d’une sensation de compression, de brûlure, de suffocation, etc., etc. La science (connaissance), qui résulte de l’expérience, aboutit donc à l’utilité.
Elle est naturelle, logique, utile, nécessaire.
Conservation et développement des sciences.
On a encore fait remarquer que c’est précisément cette utilité pratique des connaissances acquises par les sens qui a motivé, dès les origines, leur conservation et leur développement, de telle façon que le début de la science se perd dans l’antiquité très reculée 3Voir, par exemple, F. Houssay, Nature et sciences naturelles, Paris, E. Flammarion, éd.. Quand nos ancêtres lointains ont distingué les pierres entre elles, reconnaissant celles qui pouvaient leur servir à certains usages, ils ont ainsi commencé les premières classifications minéralogiques. Quand ils ont distingué, entre eux, les végétaux et, entre eux, les animaux, ensuite ceux qui pouvaient leur être utiles et ceux qui pouvaient leur nuire, ils ont commencé les premières classifications botaniques et zoologiques. Et l’on pourrait montrer de même que le point de départ de la chimie, de la physique et de toutes les sciences peut être profondément retrouvé dans la lente et pénible accumulation de l’expérience ancestrale.
C’est ce qui nous permet d’affirmer que toute connaissance provient de notions, non seulement naturelles, logiques, utiles et nécessaires, mais encore vérifiables par de nouvelles expériences (contrôle) et que les conceptions surnaturelles, en désaccord avec l’expérience, illogiques, inutiles, nuisibles et invérifiables, ont toujours été des obstacles au progrès et au bien-être.
Un individu qui veut vivre de la meilleure façon, doit tout soumettre au contrôle de ses sens, doit faire de la physique, laissant de côté la métaphysique, c’est-à-dire ce qui est en dehors de la physique, du résultat de l’expérience, de la réalité. Il a intérêt à utiliser tous les moyens d’acquérir la science des générations passées et présentes, de la contrôler, de la conserver. Le langage mimé et parlé d’abord, le langage écrit ensuite, puis l’imprimerie et enfin les communications rapides et les reproductions (télégraphe, téléphone, phonographe, cinématographe, etc.), sont devenus successivement des moyens puissants de conservation et de vulgarisation rapide des sciences.
L’expérience et l’utilité en arithmétique.
Comme toutes les autres sciences, l’arithmétique est expérimentale et utilitaire et c’est ce que nous allons montrer en détail. Toutes les notions qui sont à sa base proviennent de l’expérience, ainsi que celles qui, à un moment donné, sont employées au cours d’un raisonnement quelconque.
Nous verrons que toutes les parties de l’arithmétique ont des applications extrêmement nombreuses et variées et qu’il est impossible de s’occuper d’une science quelconque sans le secours de l’arithmétique, puisque toutes les sciences aboutissent, en définitive, à des opérations de mesure et que la mesure et impossible sans la science des nombres.
(À suivre)
Paraf-Javal
- 1Voir Le mécanisme du raisonnement, Introduction, que ce chapitre reproduit en partie.
- 2Voir, par exemple, Le Dantec, Traité de biologie, Paris, Alcan, éd.
- 3Voir, par exemple, F. Houssay, Nature et sciences naturelles, Paris, E. Flammarion, éd.