La Presse Anarchiste

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Perspective

La guerre est finie depuis 16 ans, mais jamais on n’a­vait pré­pa­ré la mort en série comme main­te­nant. Le monde entier s’est lan­cé dans une course folle aux arme­ments qui abou­ti­ra infailli­ble­ment au meurtre col­lec­tif. Fusil, baïon­nette, canon, gre­nade, semblent moyens désuets… inof­fen­sifs, à côté des pos­si­bi­li­tés que nous offre la chi­mie. À titre d’in­di­ca­tion nous pen­sons utile de don­ner une liste de gaz qu’il est pos­sible de fabri­quer en quan­ti­tés industrielles :

L’a­cide cyan­hy­drique, res­pi­ré à dose légère, donne la mort.

Le bro­mure et le chlo­rure de cya­no­gène pro­voquent l’ar­rêt des fonc­tions vitales.

Le chlore, au 1100.000e, donne la mort.

L’oxy­chlo­rure de car­bone, à dose légère, donne la mort.

Les palite et sur­pa­lite, à dose légère, donnent la mort.

Le phos­gène agit à retar­de­ment, à faible dose, il tue.

Le chlo­ro­pi­crine, suf­fo­cant, attaque les pou­mons et donne la mort.

Le bro­mure de ben­zyle, au 150.000e rend aveugle.

Le méthy­lé­thyl­cé­tone donne la mort après avoir enle­vé la vue.

L’hy­pé­rite, ou sul­fure d’é­thyle dichlore, détruit les muqueuses, les yeux, la peau. Ce gaz dépose et empoi­sonne long­temps les lieux où il a été répandu.

La lewi­site asphyxie, brûle et pro­voque à faible dose la mort.

Le tétraé­thyle de plomb, com­bi­né au dié­thyle de tel­lure, est cent fois plus violent que la strych­nine. Il tue.

Le caco­dyl-iso­cya­nate, à dose très légère, tue sans rémission.

Dans la recherche des moyens de mort, l’homme a du génie ; que ne l’emploie-t-il à d’autres fins. La conscience s’in­digne devant le crime d’un sadique ou le geste d’un fou, mais dès qu’il s’a­git d’œuvres de mort sous le cou­vert de la défense natio­nale, une étrange insou­ciance s’empare de l’homme, de la foule, abo­lis­sant tout juge­ment. Qu’il sache, l’homme de la rue, que la guerre future ne sera pas plus meur­trière pour ses fau­teurs que les guerres pas­sées ; ils sau­ront tou­jours se mettre à l’a­bri… lais­sant aux autres la gloire et l’asphyxie. 

Des res­sources pour les grands travaux

Nous vivons des temps dif­fi­ciles. Le chô­mage pèse, les res­sources sont rares. Pour l’at­té­nuer, le gou­ver­ne­ment a déci­dé d’en­tre­prendre des grands tra­vaux. Pour ce faire, il emprunte.

Nous pen­sons qu’il pour­rait, s’il le vou­lait, trou­ver des res­sources. Un magni­fique, un for­mi­dable cadeau fut fait, après la guerre à la métal­lur­gie fran­çaise, il consis­tait en la ces­sion pour 180 mil­lions, payables en 20 années, des usines lor­raines éva­luées à « huit » mil­liards de francs.

Voi­ci quels furent les bénéficiaires :

1° Les usines d’U­ckange pas­sèrent des mains des Gebru­der Stumm (Sarre) au grou­pe­ment métal­lur­gique Nord et Lor­raine au capi­tal de 36 mil­lions de francs. (MM. Jules Ber­nard et Bes­son­neau) grou­pant les firmes sui­vantes : Forges de la Basse-Loire, Ate­liers et Chan­tiers de Bre­tagne, Câble­ries et Tré­fi­le­ries d Angers ;

2° Les Eta­blis­se­ments de Knu­tange et d’Au­tun-le-Tiche, des mains de la Lothrin­ger Hut­ten-und-Berg­werks­ve­rein à la Socié­té Métal­lur­gique de Knu­tange au capi­tal de 75 mil­lions de francs, groupe Schnei­der, avec la par­ti­ci­pa­tion des firmes sui­vantes : Châ­tillon-Com­men­try et Neuves-Mai­sons, Com­men­try-Four­cham­bault et Deca­ze­ville, Denain-Anzin, Senelle-Mau­beuge, Socié­té de Construc­tion des Bati­gnolles, de Wen­del, etc… ;

3° Les Eta­blis­se­ments de Rom­bas-Redange, Ottange, des mains de la Rom­ba­cher Hut­ten­werke à la Socié­té Lor­raine des Acié­ries de Rom­bas au capi­tal de 150 mil­lions de francs — grou­pe­ment métal­lur­gique La Marine Homé­court (MM. Théo­dore Laurent et Emile Heur­teau), finan­cé par la Socié­té Géné­rale de Cré­dit Indus­triel et Com­mer­cial et grou­pant outre les Acié­ries de la Marine Homé­court, les Acié­ries de Pont-à-Mous­son, Miche­ville, Alais, Fives-Lille, Delattre et Frouard, etc…

4° Les Eta­blis­se­ments de Thion­ville, des mains de Rœchling, à la Socié­té Lor­raine Minière et Métal­lur­gique, au capi­tal de 50 mil­lions de francs, finan­cé par la Socié­té Cen­trale des Banques de Pro­vince com­pre­nant les Acié­ries de Longwy, Saulnes, les groupes Hot­ch­kiss, Arbed, Decau­ville, Tré­fi­le­ries du Havre, Paul Girod, etc., ain­si que les entre­prises belges de la Chiers et de la Providence.

5° Les Eta­blis­se­ments d’Ha­gon­dange, des mains de Thys­sen et Cie à l’« Union des Consom­ma­teurs de pro­duits métal­lur­giques et indus­triels », au capi­tal de 150 mil­lions, com­pre­nant la plu­part des entre­prises méca­niques et auto­mo­biles telles que : Fives-Lille, Japy, la Socié­té Alsa­cienne de Mul­house et les auto­mo­biles telles que : Ariès, Ber­liet, Peu­geot, Renault, etc., etc.

Au Leu de rogner les salaires des fonc­tion­naires, l’é­co­no­mie réa­li­sée se tra­dui­sant par quelques cen­taines de mil­lions, le ministre des Finances aurait plus de chance de trou­ver là les res­sources qui lui manquent. Seule­ment dans notre répu­blique « on » fait des affaires au pro­fit de quelques privilégiés.

Misère

C’est la crise, les tra­vailleurs la subissent, le chô­mage total ou par­tiel crée la misère à l’é­tat endé­mique, la sous-ali­men­ta­tion, le maigre repas quo­ti­dien. Toutes les indus­tries sont tou­chées, tous les salaires ont été rognés, c’est le règne de la por­tion congrue et le chô­mage aug­mente. Du Nord au Midi, de l’Est à l’Ouest, le même mot d’ordre invite à dimi­nuer le salaire. Dans les mines, actuel­le­ment, l’ou­vrier qui tra­vaille gagne de trois cent cin­quante à cinq cents francs par mois, compte tenu de la dimi­nu­tion des heures de tra­vail, alors qu’en 1932 il en gagnait le double ; pour­tant les mines qui ont des mil­liards d’im­mo­bi­li­sa­tion ne sont pas au seuil de la faillite !

Un exemple qui montre bien l’é­goïsme patro­nal est celui de la grève des ouvriers por­ce­lai­niers de Limoges.

« Il y a aujourd’­hui deux mois [[Le Temps du 3 octobre]] que les ouvriers por­ce­lai­niers de Limoges ont refu­sé de reprendre le tra­vail aux condi­tions nou­velles qui leur étaient pro­po­sées par les fabri­cants et qui com­por­taient une dimi­nu­tion de 10 % des salaires. Aucun pour­par­ler n’ayant abou­ti, aucun arbi­trage n’ayant été accep­té, une com­mis­sion pari­taire com­pre­nant deux délé­gués patro­naux, deux délé­gués ouvriers et l’ins­pec­teur divi­sion­naire du tra­vail, devait en der­nier res­sort éta­blir si les salaires payés dans l’in­dus­trie de la céra­mique étaient en rap­port avec le coût de la vie. Cette com­mis­sion n’a pu mener à bien sa tâche et le grave conflit, loin de s’ar­ran­ger, semble se ter­mi­ner par la rup­ture qui amè­ne­ra la fer­me­ture défi­ni­tive d’une ving­taine d’usines.

« Les syn­di­cats patro­naux sont, en effet, res­tés sur leurs posi­tions pri­mi­tives, pré­ten­dant que les charges sup­por­tées par l’in­dus­trie de la céra­mique sont trop lourdes pour per­mettre la conti­nua­tion du tra­vail aux condi­tions anciennes. D’autre part, les syn­di­cats ouvriers ont refu­sé caté­go­ri­que­ment une dimi­nu­tion de salaires et une réunion de 2.000 ouvriers a approu­vé cette façon de voir. »

Sait-on que les salaires des ouvriers por­ce­lai­niers à Limoges oscil­lent entre 500 et 600 francs par mois. Il est vrai que dans les périodes de pros­pé­ri­té ils gagnaient, aux pièces, de 1.000 à 1.100 francs par mois. Salaires somptuaires (

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