La Presse Anarchiste

Lectures

Géné­ral de Gaulle : « Mémoires de guerre », tome I, « l’Appel » (Plon)

Rien n’impose le res­pect comme toute déci­sion majeure prise dans la soli­tude de la conscience, envers et contre tous, et je défie qui­conque de lire sans émo­tion le début de ce livre, toutes les pages qui conduisent à l’appel du 18 juin, sans lequel – et je dis ceci en pesant mes mots, moi qui n’ai jamais été d’obédience « gaul­liste » – le pays de France eût peut-être été tout entier rayé, mora­le­ment, de la carte du monde.

Mais cela dit, sui­vrons-nous tant de com­men­ta­teurs qui, de Mar­cel Arland dans « la Nou­velle NRF » à Fran­çois Bon­dy lui-même (dans la « Welt­woche »), nous invitent à voir en Charles de Gaulle le grand esprit qui ne peut pas ne point habi­ter tout « grand écri­vain classique » ?

Ain­si nous par­la-t-on long­temps de cer­tain mal­heu­reux maré­chal, celui même qui fit condam­ner à mort l’auteur des pré­sents mémoires.

Or, il ne fait mal­heu­reu­se­ment pas de doute, pour ceux qui ont l’oreille un peu fine, que pas­sées les heures authen­ti­que­ment héroïques de son refus d’obéissance, le géné­ral de Gaulle, quand il s’efforce de nous faire par­ta­ger sa concep­tion de la gran­deur de l’État et (pour lui c’est tout un) de la nation, expose, en un style de plus en plus « Revue des Deux Mondes », une pen­sée qui pré­sente un effrayant air de famille avec la bien-pen­sance de son adver­saire Phi­lippe Pétain.

Ce monde est malade et, dans ce monde malade, la France l’est par­ti­cu­liè­re­ment. Mais ce ne sont pas, pour par­ler moi aus­si comme au XVIIe siècle, les « phé­bus » de la gran­deur pour la gran­deur qui réus­si­ront à la sauver.

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