La Presse Anarchiste

Dossier Paraschiv

L’i­ti­né­raire poli­tique de l’ou­vrier rou­main Vasile Para­schiv est sur­pre­nant à bien des égards. Issu d’une famille très pauvre, il s’ins­crit au Par­ti Com­mu­niste en 1946 par sou­ci de jus­tice sociale et non pas pour faire car­rière dans la bureau­cra­tie nais­sante. Entre 63 et 68, il s’é­lève sys­té­ma­ti­que­ment contre les abus qu’il attri­bue, en cette période, aux dévia­tions dues à l’ir­res­pon­sa­bi­li­té des cadres. En 1968, en pleine eupho­rie natio­na­liste (savam­ment orches­trée par le clan Ceau­ses­cu, alors en ascen­sion), Para­schiv écrit une lettre ouverte de pro­tes­ta­tion au Comi­té Cen­tral. Il est exclu du Par­ti, auquel il ne payait plus ses coti­sa­tions. Cible pri­vi­lé­giée de la répres­sion dans les années qui suivent, en rai­son de ses mul­tiples prises de posi­tion cri­tiques sur le lieu de tra­vail, Para­schiv est plu­sieurs fois inter­né en hôpi­tal psy­chia­trique sous l’ac­cu­sa­tion dégui­sée en diag­nos­tic de « para­noïa-psy­chose déli­rante reven­di­ca­tive sys­té­ma­ti­sée ».Cette nou­velle mala­die montre bien le visage de l’op­pres­sion et de la répres­sion qui sévissent en Rou­ma­nie, et serait savou­reuse si elle n’a­vait signi­fié la tor­ture médi­ca­li­sée pour Para­schiv. En 1977, il signe l’ap­pel de Paul Goma, ce qui lui vaut de nou­velles bru­ta­li­tés de la part des auto­ri­tés, excé­dées par sa déter­mi­na­tion. Muni d’un visa tou­ris­tique, il se rend en Autriche puis en France, où il par­ti­cipe le 18 avril 1978 à une confé­rence de presse en faveur du syn­di­cat libre sovié­tique de Khle­ba­nov, aux côtés du sovié­tique Fain­berg, du tché­co­slo­vaque Les­tins­ky et du polo­nais Smo­lar. Il s’a­gis­sait là d’une « pre­mière » inter­na­tio­na­liste concer­nant l’Est. Il faut noter aus­si que ce fut la pre­mière (et la der­nière?) fois que la CGT s’est mani­fes­tée en faveur des syn­di­cats indé­pen­dants à l’Est. Peu de temps après, Para­schiv rentre, à la sur­prise géné­rale, en Rou­ma­nie afin de lut­ter au sein du nou­veau Syn­di­cat Libre des Tra­vailleurs de Rou­ma­nie (SLOMR). Quelques mois après, il disparaît.

Aucune des démarches qui ont été faites pour le recon­tac­ter n’a abou­ti. Rap­pe­lons à ce sujet les mésa­ven­tures du jour­na­liste Ber­nard Pou­let, auquel nous tenons à rendre hom­mage pour son cou­rage, si rare dans ce métier. Curieu­se­ment, c’est lors du show Vir­gil Tanase et Mon­sieur « Z » que nous avons eu des nou­velles de Para­schiv. Plu­sieurs syn­di­ca­listes et jour­na­listes qui l’ont vu au cou­rant du mois d’août 1982 ont rap­por­té son appel : « Tout ce que je désire, c’est qu’on me per­mette de faire un voyage urgent en France… Je demande à tout le monde de m’ai­der. » Puisque nous venons de faire allu­sion à l’af­faire Tanase, il serait peut-être néces­saire de rap­pe­ler que Iztok condamne ce show auquel ont par­ti­ci­pé, outre le déjà fameux jour­na­liste d’Actuel, roman­cier et col­la­bo­ra­teur occa­sion­nel de la DST Vir­gil Tanase et l’es­pion (minable ou d’en­ver­gure, on s’en fout) col­la­bo­ra­teur lui aus­si de la DST Mon­sieur « Z », la direc­tion du men­suel Actuel, Flam­ma­rion (édi­teur du roman­cier sus-nom­mé) ain­si que bon nombre de jour­na­listes et de per­son­na­li­tés par­fai­te­ment au cou­rant depuis long­temps. Rap­pe­lons à ce sujet que celui qui pré­tend avoir chan­gé de patron (la DST après la Secu­ri­tate) parce que sa der­nière mis­sion n’é­tait pas « com­pa­tible avec l’a­mour pour la patrie » a trai­té Para­schiv lors de sa confé­rence de presse du 31 août de « per­son­nage » qui fait plus par­ler de lui en France qu’en Roumanie.

Nous publions ici deux élé­ments du « dos­sier » Para­schiv qui nous ont sem­blé signi­fi­ca­tifs : le compte ren­du de la mani­fes­ta­tion orga­ni­sée en sa faveur par le Comi­té Para­schiv devant l’am­bas­sade de Rou­ma­nie, qui a été trans­mis par Radio Free Europe en rou­main, et un texte écrit par Para­schiv en 1971, qui parait pour la pre­mière fois en tra­duc­tion inté­grale du rou­main. L’o­ri­gi­nal a d’ailleurs été repris dans le n°1 d’Iz­tok en roumain.

Pour finir, nous pré­sen­te­rons briè­ve­ment le Comi­té Para­schiv. Il a été créé en février 1981, deux ans après la dis­pa­ri­tion, pour bri­ser le silence qui s’é­tait fait autour de son cas. Son action s’est dérou­lée en deux temps : tout d’a­bord en 1981 une péti­tion en sa faveur a été lan­cée et a recueillie de nom­breuses signa­tures indi­vi­duelles et col­lec­tives (dont plu­sieurs syn­di­cats). Puis début 82, avec le début de « l’af­faire Pou­let » (jour­na­liste du Matin, il s’est fait tabas­ser par la police rou­maine alors qu’il sor­tait du domi­cile de Para­schiv qu’il n’a­vait pu ren­con­trer), il a relan­cé l’ac­tion en sa faveur par des tracts, une mani­fes­ta­tion et le tor­pillage de la cam­pagne de publi­ci­té de prin­temps dans le métro en faveur du tou­risme en Rou­ma­nie par des graf­fi­tis et des affiches dénon­çant le régime de Ceau­ses­cu, sou­te­nant Para­schiv et appe­lant à ne pas ali­men­ter en devise la répres­sion. Le comi­té est com­po­sé de liber­taires rou­mains et fran­çais, inor­ga­ni­sés, un membre de la FA et plu­sieurs membres de l’UT­CL. Il n’est pas une struc­ture per­ma­nente, mais ponctuelle.

Nico­las et Vincent, membres du Comi­té Paraschiv


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