La Presse Anarchiste

Qui sommes-nous ? Que voulons-nous faire ?

Nous sommes issus de deux groupes qui exis­taient avant mai 68 : « Noir et Rouge » et « ICO » ( Infor­ma­tions, Cor­res­pon­dances Ouvrières). N&R était une revue d’é­tudes qui dési­rait abor­der tous les pro­blèmes, sans tabous idéo­lo­giques tout en se récla­mant de l’a­nar­chisme. ICO était à l’o­ri­gine un groupe de tra­vailleurs qui dénon­çait le syn­di­ca­lisme comme allié indis­pen­sable du capi­ta­lisme — de l’Est et de l’Ouest. Après mai 68, ces deux groupes subirent une évo­lu­tion qui fit écla­ter leur struc­ture tra­di­tion­nelle. N&R devint un car­re­four de ren­contres, d’i­ni­tia­tives, tout en vou­lant conti­nuer un tra­vail col­lec­tif d’é­tudes. Mais après un der­nier numé­ro d’a­na­lyse, le groupe déci­da de sabor­der la revue à la suite de l’im­puis­sance col­lec­tive à pou­voir conci­lier les deux. ICO reçut un afflux de mili­tants de mai, plus inté­res­sés par des pro­blèmes liés à la vie quo­ti­dienne hors des boîtes que par une réflexion sur les pro­blèmes plus stric­te­ment liés aux « lieux de tra­vail ». Ces deux optiques coha­bi­tèrent jus­qu’en 1973 pour écla­ter ensuite. Une ana­lyse, « un point de vue[[SIMON Hen­ri, 34 rue Saint-Sébas­tien, 75011 Paris]] » a été écrit à ce sujet par un camarade. 

De ces trois posi­tions — revue d’é­tude, pro­blèmes du tra­vail, pro­blèmes idéo­lo­gi­co-indi­vi­duels —, laquelle choisissons-nous ? 

En fait, il n’est pas fait une sépa­ra­tion a prio­ri, et sans tom­ber dans l’é­clec­tisme du groupe qui veut publier pour admi­rer sa propre signa­ture à défaut d’être publié par « Le Monde » ou le « Nou­vel Obs », nous sen­tons que nous ne nous recon­nais­sons pas dans d’autres revues et que nous avons à faire œuvre de présence. 

Nous avons com­men­cé à nous défi­nir plus pro­fon­dé­ment en abor­dant le titre de la revue. Mis à part le féti­chisme mi-reli­gieux mi-baroque que cer­tains accordent au titre, et au sous-titre, il est appa­ru que pour les uns la réfé­rence à l’a­nar­chisme est néces­saire parce qu’ils s’i­den­ti­fient à des ana­lyses et des expé­riences et que, sans tom­ber dans le dogme, il y a des prin­cipes fon­da­men­taux que nous recon­nais­sons tous (anti-État, non-hié­rar­chie, révo­ca­tion immé­diate, rota­tion, …). Pour les autres, toute éti­quette est à aban­don­ner car elle nuit à la com­mu­ni­ca­tion avec les lec­teurs et adop­ter un « isme », c’est accep­ter cer­taines pro­po­si­tions qui peuvent cacher, blo­quer la com­pré­hen­sion de la réa­li­té. D’autres cama­rades n’ac­cor­daient que peu d’im­por­tance à ce type de pro­blème. C’est pour l’ins­tant la pre­mière posi­tion qui s’est trou­vée « majoritaire ». 

Cette divi­sion au départ ne semble pas un obs­tacle à la fabri­ca­tion d’une revue en com­mun, avec les dis­cus­sions qui en surgiront. 

Et socia­le­ment, qui somme-nous ? Une majo­ri­té d’en­sei­gnants (supé­rieurs et secon­daires !), des employés et ouvriers. De toute façon, tous plus ou moins des intel­lec­tuels, si ce n’est par la pro­fes­sion du moins par le fait que nous sommes « militants ». 

— Pour­rons-nous dépas­ser ces oppo­si­tions sociales ?

— Ce que cha­cun écri­ra sera-t-il lié à ce qu’il est socialement ? 

Le débat est ouvert et la réponse vien­dra de nous et aus­si des lecteurs. 

Ce qui nous ras­semble ce sont bien enten­du nos posi­tions de base, celles expri­mées dans les points com­muns, mais aus­si un cer­tain nombre de « réflexes » com­muns face à des situa­tions pré­cises, réflexes dont nous consta­tons la réa­li­té ponc­tuel­le­ment, épi­so­di­que­ment et néga­ti­ve­ment, par rap­port à tel évè­ne­ment, par rap­port à tel ou tel groupe, telle ou telle position. 

Même si nous ne nous recon­nais­sons pas dans les groupes et publi­ca­tions exis­tantes, cer­tains nous sont proches, mais en par­tie seule­ment. Aus­si envi­sa­geons-nous de dis­cu­ter, avec dif­fé­rents groupes anti-auto­ri­taires, d’ho­ri­zons divers, et de par­ti­ci­per à un débat qui doit avoir lieu sur toute une série de pro­blèmes (voir Thèmes pour la Controverse). 

Nous ferons une part appro­fon­die aux comptes ren­dus, cri­tiques de dif­fé­rents livres, jour­naux, revues, bro­chures, etc. 

De plus, par la suite, chaque numé­ro sera pour moi­tié au moins consa­cré à un sujet par­ti­cu­lier avec des articles contra­dic­toires, écrits par nous ou que nous rece­vrons ou tra­dui­rons. Place sera faite éga­le­ment au cour­rier des lecteurs… 

Cepen­dant, il va de soi que nous ne sommes pas une tri­bune libre, ni un fourre-tout, et que nous res­tons les seuls maîtres (en bons anar­chistes !) de déci­der de ce que nous publions. 

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