La Presse Anarchiste

Errico Malatesta : philosophie politique

[/(à paraître courant 1975, éd. 10/18)/]

Mis à part un numéro de « Noir et Rouge » en 1966 et heureuse­ment des réédi­tions récentes de brochures par des groupes parisiens, ain­si que le « Ni Dieu ni Maître », impro­pre­ment signé du seul nom de Daniel Guérin (puisque ce fut un tra­vail plus ou moins col­lec­tif), la pen­sée de Malat­es­ta est escamotée aux cama­rades de langue française, actuelle­ment du moins, car de nom­breuses tra­duc­tions d’ar­ti­cles parurent dans dif­férents périodiques.

L’in­térêt des posi­tions de Malat­es­ta est qu’il fut un des pre­miers à dénon­cer le dévi­a­tion­nisme inhérent à la struc­ture syn­di­cale, au moment de l’apolo­gie de la Charte d’Amiens, et qu’il défendit sa posi­tion pen­dant les fameuses occu­pa­tions d’usines de 1920 en Italie.

Il attaqua égale­ment forte­ment les illu­sions des anar­chistes élec­toral­istes et des organ­isa­teurs cen­tral­istes (let­tre de Makhno et réponse de Malatesta).

Mais Malat­es­ta était surtout un mil­i­tant con­cret, ce qui explique sa par­tic­i­pa­tion à la pro­pa­gande par le fait — dont il fut un des théoriciens du vivant de Bak­ou­nine —, à des actions de masse — Ancone, en 1914, et 1920 déjà cité. Ce désir de con­cret se reflète dans ses pages sur la révo­lu­tion russe, le « Pro­gramme anar­chiste », « Quelques con­sid­éra­tions sur le régime de pro­priété après la révo­lu­tion », « Idéal­isme et matéri­al­isme », par exemple.

Plutôt qu’une antholo­gie de textes, comme l’ont fait Fab­bri et Ver­non Richards. Israël Renof — présen­ta­teur — a préféré un choix d’ar­ti­cles par­mi les plus car­ac­téris­tiques, afin de ren­dre plus vivante la pen­sée de Malatesta.

Au risque d’en­frein­dre la règle du présen­ta­teur, voici deux aspects de Malatesta :

« Pour ce faire (arriv­er à la révo­lu­tion), nous esti­mons néces­saire que les moyens de pro­duc­tion soient à la dis­po­si­tion de tous et qu’au­cun groupe d’hommes, ou groupes d’hommes, ne puis­sent oblig­er les autres à obéir à sa volon­té ; ni exercer son influ­ence autrement que par le raison­nement et l’ex­em­ple. Donc : expro­pri­a­tion des déten­teurs du sol et du cap­i­tal à l’a­van­tage de tous et abo­li­tion du gou­verne­ment. En atten­dant : pro­pa­gande de notre idéal ; organ­i­sa­tion des forces pop­u­laires ; com­bat con­tin­uel, paci­fique ou vio­lent selon les cir­con­stances, con­tre le gou­verne­ment et con­tre les pro­prié­taires pour con­quérir le plus pos­si­ble de lib­erté et de bien-être pour tous. »

(fin du Pro­gramme, rédigé en 1920).

« Nous sommes tous, sans excep­tion, oblig­és de vivre, plus ou moins, en con­tra­dic­tion avec nos idées ; mais nous sommes social­istes et anar­chistes pré­cisé­ment dans la mesure où nous souf­frons de cette con­tra­dic­tion et que nous tâcherons, autant que pos­si­ble de la ren­dre moins grande. Le jour où nous nous adapterons au milieu, nous n’au­rons naturelle­ment plus envie de le trans­former et nous devien­drons de sim­ples bour­geois. Bour­geois sans argent peut-être, mais non moins bour­geois pour cela dans les actes et dans les interventions. »

(« Le Réveil » 5-11-1904). 


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