La Presse Anarchiste

Du haut de mon mirador

J’écris ces lignes en enten­dant évo­quer, à la Radio, l’exé­cu­tion des 27 otages de Châteaubri­ant — 27 inno­cents. Et je songe à tous les otages fusil­lés, à tous les déportés morts en exil, à tous les tor­turés, à tous les. meur­tris, à tous les sup­pli­ciés. et tous ceux que, depuis que les sociétés humaines exis­tent, les guer­res ont détru­its, ruinés, anni­hilés les inno­cents comme les coupables — à toutes les vic­times de la vio­lence organ­isée et de la vio­lence inor­gan­isée, à toutes les vic­times de l’u­ni­verselle bar­barie. Et je songe encore que nous vivons à l’âge de la dés­in­té­gra­tion de l’atome, c’est-à-dire à la veille peut-être du plus grand tri­om­phe que la démence meur­trière et infer­nale de l’hu­man­ité puisse se tar­guer de rem­porter Et tout ceci con­sid­éré, com­bi­en m’ap­pa­rais­sent sottes et mesquines et les polémiques de per­son­nes et les querelles partisanes ! 

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D’un heb­do­madaire d’outre-Manche, j’ex­trais la let­tre suivante : 

« … Je ne pense pas que c’est unique­ment par l’ac­tiv­ité des par­tis, des ligues, des alliances, des mou­ve­ments, qu’on pour­ra réformer le monde. Je crois que c’est de l’ex­em­ple indi­vidu­el que sur­gi­ra un monde meilleur. Tout indi­vidu qui fait régn­er l’or­dre dans sa pro­pre mai­son et rit en paix avec ses proches voisins, accom­plit quelque chose de con­struc­tif en faveur de la paix uni­verselles. Sa vie elle-même con­stitue une pro­pa­gande et un exem­ple puis­sants pour la cause de la paix et des réformes sociales,..

JOHN ROLLEY (Nou­velle Zélande). » 

Est-ce que cela ne vaut pas tous les pro­grammes élec­toraux les plus aguichants ? Et quelle pro­pa­gande rivalis­erait avec celle pré­con­isée par John Rol­ley, si cha­cun, voulait réelle­ment la met­tre en pratique ? 

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Sur dix mille catholiques que ren­fer­merait Nagasa­ki, la ville japon­aise où se trou­vait le plus de catholiques. 9.000 ont été anéan­tis par la bombe atom­ique qui a dévasté cette grande cité ! Décidé­ment les voies du Seigneur sont bien impénétrables.

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Dans divers­es régions du Mex­ique, la pop­u­la­tion. d’o­rig­ine européenne souf­fre d’une étrange mal­adie, provo­quée selon l’avis des savants par le manque de vit­a­mines. Robert Har­ris, spé­cial­iste des ques­tions ali­men­taires, qui fait par­tie de l’« Insti­tute of Tech­nol­o­gy » à Cam­bridge, invité par le gou­verne­ment mex­i­cain à étudi­er le prob­lème, ne tar­da pas à con­stater que les Indi­ens qui habitent la même région que les Blancs se por­tent très bien. Mais ils ont l’habi­tude d’a­jouter à leur nour­ri­t­ure cer­taines herbes sèch­es qui, comme on put le con­stater après de mul­ti­ples recherch­es, con­te­naient juste­ment les vit­a­mines qui man­quaient à la nour­ri­t­ure de la pop­u­la­tion. Les Indi­ens, eux, n’avaient pas besoin de savants spé­cial­istes pour con­serv­er leur santé. 

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Deux objecteurs de con­science anar­chistes sont amenés devant un tri­bunal lon­donien. L’un. God­frey R. Mun déclare ce qui suit : « Je suis anar­chiste et je vous crois assez intel­li­gents pour com­pren­dre qu’un anar­chiste n’est pas quelqu’un essayant d’im­pos­er ses idées aux autres avec des bombes.… Vous voudrez bien admet­tre que je ne recon­nais pas votre autorité pour me décider à faire ce que je dois faire et si votre juge­ment n’est pas con­forme à mon désir, on s’apercevra que ma déférence appar­ente pour votre autorité n’est qu’ap­par­ente. Si je suis obligé de me soumet­tre à une façon de me con­duire que je dés­ap­prou­ve — et je pour­rais le faire sous l’empire d’une con­trainte très forte — je puis vous assur­er que je ferai tout ce qui est en mon pou­voir, et cela aus­sitôt que pos­si­ble, pour faire regret­ter à ceux qui ont usé de force à mon égard, d’avoir agi ain­si, et cela en faisant con­naître mes idées à tous ceux avec lesquels je viendrai en con­tact et en les per­suadant de se rebeller con­tre l’autorité. » 

L’autre, Ralph. P. Mills déclare, à son tour, qu’en 1938, il a présen­té au con­grès annuel de son syn­di­cat une réso­lu­tion pré­con­isant une grève générale con­tre la guerre. « On dit, ajoute-t-il, que cette guerre se livre pour la lib­erté. La lib­erté, pour moi, c’est le droit de faire selon mon désir, à con­di­tion que cela, ne porte pas préju­dice au droit légal d’autrui d’en faire autant. Je dénie à l’É­tat le droit de lim­iter ma lib­erté en me forçant à m’en­rôler dans une guerre à laque­lle je suis opposé et je me refuse à devenir un assas­sin en uni­forme aux ordres de l’État. » 

Les juges anglais ont jugé authen­tique et fondée leur objec­tion de con­science au ser­vice mil­i­taire com­bat­tant et non com­bat­tant. Ils les ont par suite relaxés de toute pour­suite (Juin 1940). 

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On a célébré le 26 juil­let dernier le 70ème anniver­saire de la nais­sance du Dr C. G. Jung, qui fut d’abord un dis­ci­ple ent­hou­si­aste de Freud, ce qui lui atti­ra l’inim­i­tié de cer­tains cer­cles offi­ciels. Plus tard Jung et Freud se séparèrent au sujet du com­plexe d’Œdipe que Freud inter­pré­tait de façon pos­i­tive alors que Jung l’en­vis­ageait de façon sym­bol­ique. D’ailleurs, Jung était trop mys­tique pour pou­voir s’en­ten­dre avec Freud, irréligieux et matéri­al­iste. L’ou­vrage inti­t­ulé « Méta­mor­phoses et sym­bol­es de la Libido », entre autres, ren­du Jung célèbre. Ce savant a voy­agé en Amérique, en Afrique, aux Indes. 

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Le Peu­ple de Brux­elles (n° du 24 août 1945), pub­lie une infor­ma­tion datée d’Ox­ford, d’où il appert qu’a la con­férence des hommes d’églis­es (church­men) mod­ernes, on a déclaré « néces­saires dans la vie sociale et famil­iale la pra­tique des méth­odes du bitrth con­trol » Le révérend J, Hin­to vicaire de West­bury, a réclamé qu’on étab­lisse « un plan eugénique basé sur le con­trôle des nais­sances » et que l’église « se prononce et pense plus ouverte­ment » à ce sujet, pour arriv­er à main­tenir un stan­dard de vie plus élevé en lim­i­tant le nom­bre des enfants. 

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Il parait qu’a 80 mètres d’un point de la côte du Pon­doland, dans l’Afrique du Sud, git, enseveli dans les sables de l’Océan, un voili­er qui fit naufrage en 1782, en prove­nance de Cey­lan, Dans les flancs de ce bâti­ment se trou­vent 19 caiss­es de pier­res pré­cieuses, 200 lin­gots d’or, 1450 lin­gots d’ar­gent et plusieurs mil­lions de mon­naies divers­es. La légende ajoute qu’ils ren­fer­ment égale­ment des paons empail­lés ser­tis de dia­mants et un trône d’or mas­sif, pil­lé à Del­hi, dans l’Inde. 

Bien des ten­ta­tives ont été faites pour récupér­er ce tré­sor. Un tun­nel fut même creusé sous le lit de l’Océan et parvint à quelques pieds de l’é­pave, mais l’eau s’en­gouf­fra dans le tun­nel et, faute de fonds, il fal­lut renon­cer à l’en­tre­prise, Un Anglais, ingénieur en chef du ser­vice civ­il, qui élab­o­rait depuis qua­tre ans un plan, des­tiné a rejoin­dre les débris du pré­cieux navire, s’est décidé à renou­vel­er l’aven­ture et à réus­sir coûte que coûte. 

En fait de course au pognon, en voilà une de taille. 

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Le dernier numéro de The War Resister (été 1945) con­tient de nom­breuses nou­velles des résis­tants à la guerre, objecteurs de con­science, etc., à tra­vers l’Eu­rope. Nous y trou­vons men­tion de noms bien con­nus. L’In­ter­na­tionale des Résis­tants à la guerre songe déjà à l’or­gan­i­sa­tion de con­grès régionaux simul­tanés en jan­vi­er et févri­er 1946. 

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La guerre n’a pas empêché les colonies ou com­mu­nautés coopéra­tives juives — les Kib­butz­im — de Pales­tine de per­sévér­er et même de prospér­er. Elles fonc­tion­nent sans chefs, sans directeurs, bien que leurs con­sti­tu­tions soient vari­ables et si elles élisent des secré­taires ou prési­dents, c’est pour régler leurs rap­ports avec les Anglais, qui ne com­pren­nent pas qu’un groupe­ment puisse se pass­er de « leader ». Il existe aus­si des colonies où la terre est pos­sédée indi­vidu­elle­ment, et non col­lec­tive­ment et qui crois­sent en nom­bre, La ques­tion mérite qu’on y reviennent. 

Qui CÉ.


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