La Presse Anarchiste

Polémique au sujet des prétendues scissions de l’Internationale »

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La bonne foi du Conseil Général

Dans sa « cir­cu­laire privée », sorte de man­i­feste en réponse aux attaques dont il se dit l’ob­jet, le Con­seil général de Lon­dres vient de se dépar­tir du calme et du sang-froid que sa posi­tion — plus ou moins jus­ti­fiée — de représen­tant du pro­lé­tari­at uni­versel, lui commandait.

Au lieu de chercher à se jus­ti­fi­er des actes dont il s’est ren­du coupable, en mécon­nais­sant les principes sur lesquels repose l’Asso­ci­a­tion Inter­na­tionale des tra­vailleurs, en niant le droit d’au­tonomie des sec­tions, notam­ment ; au lieu de nous don­ner l’ex­em­ple de la mod­éra­tion et de l’im­par­tial­ité, le Con­seil général tonne, foudroie et fait pleu­voir l’in­jure sur ses adversaires.

D’autres répon­dront sans doute à la dernière bulle papale qui nous est arrivée de Lon­dres, et les erreurs de principes seront per­cées à jour. — Je veux sim­ple­ment relever les erreurs de fait, qui intéressent la direc­tion et la rédac­tion du jour­nal la Révo­lu­tion sociale.

« La Sol­i­dar­ité ayant cessé d’ex­is­ter, dit la « cir­cu­laire privée », les nou­veaux adhérents de l’Alliance fondèrent la Révo­lu­tion sociale sous la direc­tion supérieure de Madame André Léo, etc… »

Le débat qui s’est élevé récem­ment entre le directeur de la Révo­lu­tion sociale et les grotesques anonymes qui rédi­gent l’Égal­ité de Genève, débat qui a néces­sité de ma part une let­tre explica­tive pub­liée dans le jour­nal l’Inter­na­tionale, de Brux­elles, aurait dû ouvrir les yeux aux mem­bres du Con­seil général sur ce point essen­tiel. J’ai fondé la Révo­lu­tion sociale au mois d’oc­to­bre dernier. Or, à cette époque, je ne fai­sais pas par­tie de la sec­tion de Pro­pa­gande et d’ac­tion révo­lu­tion­naire social­iste, de Genève, et notre jour­nal n’est devenu l’or­gane de la Fédéra­tion jurassi­enne qu’après le con­grès de Sonvil­li­er, tenu en novem­bre, c’est-à-dire un mois après sa fon­da­tion. En sec­ond lieu, j’ai tou­jours eu la direc­tion absolue de la Révo­lu­tion sociale, et si Madame André Léo m’a don­né quelques arti­cles, c’est au même titre que mes autres col­lab­o­ra­teurs Arthur Arnould, E. Razoua, L. Marc­hand, etc.

La Révo­lu­tion sociale n’a donc pas été fondée par les nou­veaux adhérents de l’Al­liance, et Madame André Léo n’a pas eu de direc­tion supérieure ou autre dans le journal.

« Dès son pre­mier numéro, pour­suit la cir­cu­laire, ce jour­nal s’empressa de se met­tre au niveau du Figaro, du Gaulois, du Paris-Jour­nal et autres organes orduri­ers dont il réédi­ta les saletés con­tre le Con­seil général, etc. »

Je laisse de côté les expres­sions mal­pro­pres qui sem­blent com­pos­er le vocab­u­laire favori du con­seil suprême. Quant à assim­i­l­er la Révo­lu­tion sociale aux feuilles bona­parteuses ci-dessus nom­mées, c’est infâme et absurde en même temps. Vous n’avez pas lu le pre­mier numéro dont vous par­lez, Messieurs de la cir­cu­laire. S’il en était autrement je serais bien for­cé de recon­naître que vous avez la con­science plus noire et la tête plus car­rée que je le pen­sais. Mais non, vous nous faites un procès de ten­dances, vous épi­loguez, vous ergotez, vous déna­turez à plaisir des faits acquis, et vous répon­dez par des calom­nies ridicules aux reproches d’au­tori­tarisme et d’am­bi­tion que nous avions le droit et le devoir de vous adresser.

Je sais que le Con­seil général de Lon­dres est com­posé d’élé­ments hétérogènes ; qu’il y a dans son sein des mem­bres qui devraient en être chas­sés ; et cela m’ex­plique la marche que tend à suiv­re, depuis quelque temps, le Con­seil de Lon­dres. Mais que des hommes intel­li­gents, probes, dévoués, tels que les citoyens Longuet, Vail­lant, Ran­vi­er, Cour­net, etc., fassent cho­rus avec des drôles de la trempe d’un Ser­railler ! Que des citoyens dont les con­vic­tions et la bonne foi ne sont mis­es en doute par per­son­ne, con­sen­tent à rester plus longtemps con­fon­dus avec des gens qui vivent de l’Inter­na­tionale, et aux dépens de l’Inter­na­tionale, depuis plusieurs années, et, qu’en­fin, ces hommes se ser­vent d’armes déloyales, pour défendre une cause qui est recon­nue mau­vaise — cette cause n’est autre que l’om­nipo­tence du Con­seil général — non plus seule­ment par la Fédéra­tion jurassi­enne, mais par les Fédéra­tions espag­nole et ital­i­enne, et par la Fédéra­tion belge, qui demande la sup­pres­sion du Con­seil général, certes, tout cela nous écœure, et nous avons le droit de nous indigner.

Fort heureuse­ment, la cause du pro­lé­tari­at est en dehors et au-dessus des intrigues et des félonies de quelques char­la­tans. Le tra­vailleur souf­fre, meurt de mis­ère et de faim, pen­dant que le bour­geois mil­lion­naire jouit ; voilà le fait bru­tal qui frappe tous les yeux. Or, il faut que cette sit­u­a­tion anor­male et scan­daleuse cesse. Il faut que l’esclave qui peu­ple aujour­d’hui les chantiers, les ate­liers, les mines, éman­cipé intel­lectuelle­ment et économique­ment, prenne au plus vite sa place au soleil de la jus­tice et de l’égalité !

A. Claris, ex-directeur de la Révo­lu­tion sociale. Genève, 13 juin 1872. 


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