Des chiffres récemment
publiés par l’Institut national des statistiques, agence
officielle du gouvernement, jettent une lumière intéressante
sur le niveau de vie des travailleurs espagnols. Le tableau suivant
montre le salaire journalier moyen net de différentes
catégories de travailleurs, qualifiés et non qualifiés,
comprenant les allocations familiales et autres indemnités, et
déduction faite des contributions obligatoires pour la
sécurité sociale et autres :
Industrie : salaire journalier
moyen net, en pesetas.
Travailleur qualifié : tq, Travailleur non qualifié :
tnq
Verre : tq, 57- tnq, 35
Mines : tq, 57,13 – tnq, 37,84
Extraction de la pierre : tq, 54 – tnq, 37
Bâtiment : tq, 52 – tnq, 36
Meuble : tq, 50 – tnq, 32
Travail du bois : tq, 50 – tnq, 32
Poterie : tq, 46 – tnq, 30
Papier : tq, 44 – tnq, 33
Textile : tq, 43 – tnq, 34
Métallurgie : tq, 42 – tnq, 28
Chaussure : tq, 41 – tnq, 28
Vêtement : tq, 33 – tnq, 23
Agriculture : tq, 29 – tnq, 18
La valeur nominale de la peseta
est d’un franc belge.
Dans toutes ces catégories,
la différence entre les salaires en Espagne et ceux d’autres
pays d’Europe (pour ne pas mentionner, naturellement, l’Amérique
du Nord), frappera immédiatement tout travailleur. Les
salaires des femmes sont inférieurs d’environ 30 %. Il
résulte de ces niveaux de salaires extrêmement bas que
80 % des travailleurs (y compris employés, fonctionnaires et
militaires) sont obligés d’avoir deux emplois, ce qui leur
fait une journée de travail d’au moins quatorze heures.
La ration alimentaire journalière
par personne comprend : 300 grammes de pain, 30 grammes de graisse
comestible, 250 grammes de pommes de terre, 15 grammes de sucre, un
tiers de litre de lait, 50 grammes de riz, 100 grammes de poisson,
100 grammes de viande, 1 œuf, 150 grammes de légumes et un
demi-litre de vin. Le coût de cette ration quotidienne varie
selon les provinces de 11 à 15 pesetas. En d’autres mots,
les dépenses journalières minimales pour l’alimentation
s’élèvent à 10 pesetas environ. Le charbon,
l’eau et l’électricité coûteront 5 autres
pesetas par jour, ce qui avec d’autres postes essentiels comme le
loyer et les vêtements donnera un total de 25 à 30
pesetas par jour.
Les conditions de logement sont,
nous l’imaginons aisément, au même misérable
niveau. À Madrid, par exemple, il existe quatre rues dans le
secteur ouvrier, Jaime el Conquistador, Torres Miranda, Dionisio
Valdes et Paseo del Canal, dans lesquelles 8 000 personnes sont
entassées. Un jésuite, le Père Llanos, décrit
ces bas quartiers comme « un amas de taudis dans lesquels les
animaux eux-mêmes ne pourraient vivre ». Toutefois, des
milliers de travailleurs de Madrid et leurs familles y habitent, et
cela dans la capitale d’un pays qui, il y a peu de temps, a été
admis au sein de l’Organisation des nations unies pour l’éducation,
la science et la culture.
Les facilités éducatives
sont également déplorables. Le chef du département
de l’Education de la municipalité de Madrid a récemment
déclaré que 20 000 enfants de la ville n’allaient pas
à l’école à cause du manque de places. Ceux-ci
sont par conséquent obligés de rôder dans les
rues et sont la proie de dangers physiques et moraux qu’il n’est
pas nécessaire de décrire.
(D’un rapport de la Confédération des syndicats libres)