Nous sommes un groupe d’amis intéressés par le problème de l’objection de conscience, certains parmi nous étant de futurs objecteurs et, pour cette raison, nous vous écrivons pour vous donner notre avis sur le projet de loi que vous êtes chargé d’élaborer, et pour que vous en teniez compte, si cela vous semble opportun, dans la rédaction du rapport.
En reconnaissant l’objection pour des motifs de croyances religieuses et à cause des pratiques qui en découlent, on fait abstraction des catholiques, car leur religion ne l’exige pas, ainsi que de tout motif autre que religieux comme la non‑violence, le pacifisme, les motifs éthiques ou humanitaires, etc., ce qui ne résout pas tous les problèmes qui se présentent à ce sujet, puisque aucun de nous n’est ni témoin de Jéhovah, ni adventiste. Nous pensons que la loi ne doit pas seulement résoudre les cas actuels, mais aussi les cas futurs. De plus, dans tous les pays d’Europe où l’on reconnaît l’objection de conscience (tous exceptés le Portugal, la Grèce, la Suisse et l’Espagne), on admet cette pluralité de motifs. La reconnaissent aussi l’Assemblée consultative du Conseil de l’Europe et le Concile Vatican II.
En ce qui concerne le service dans les unités ou services spéciaux, il existe à l’étranger (France, Suède, etc.) des organismes civils déterminés qui accueillent les objecteurs (Chiffonniers d’Emmaüs, Service civil international, aide aux déshérités, mouvements ruraux, centres de jeunesse, ministère des Affaires culturelles, etc.) et nous aimerions qu’en Espagne les objecteurs soient acceptés par des organismes similaires existant déjà, ou d’autres qui réaliseraient des activités ayant les caractéristiques suivantes :
— Étrangères à toute activité militaire (ni dans l’armée ni pour l’armée). Par exemple, nous n’accepterions pas de servir des repas dans une caserne, alors que nous le ferions dans un asile pour vieillards ou un orphelinat.
— De caractère social : aide aux plus déshérités.
— D’une grande variété ; pour que puissent s’y consacrer des objecteurs de tout niveau culturel.
— Qui n’isolent pas de la société.
— Qui ne soient pas du travail introduit dans des zones ou des secteurs de chômage.
En Espagne, il y a un million d’enfants sans écoles et presque deux millions d’analphabètes. L’alphabétisation serait le service civil le meilleur et le plus urgent, à condition de ne pas porter préjudice aux instituteurs en quête d’emploi.
À Valence, il existe une grande disproportion entre le nombre très élevé des bars et celui, minime, des centres culturels, car ces derniers fonctionnent au ralenti faute de responsables et d’animateurs.
D’autres services civils pourraient être :
— Le travail dans les Auberges de jeunesse.
— Des travaux forestiers (coupe‑feu, reboisement, etc.).
— L’archéologie.
— La remise en état de routes dans les régions à mauvaises communications, etc.
Ce ne sont que de simples suggestions pour le service civil. Nous pensons que vous connaissez mieux que nous les besoins du pays.
Nous voulons enfin vous rappeler que, à partir du moment où la loi reconnaît le statut d’objecteur de conscience, le service civil n’est plus considéré comme une sanction, mais comme un remplacement au service militaire, et qu’on doit le limiter à une juste proportion quant à sa durée, son intensité, etc. Nous considérons que trois ans sont excessifs, car cela ressemble à une sanction, et que deux ans seraient suffisants pour garantir l’honnêteté d’intention des objecteurs.
En même temps, on devrait prévoir, comme dans tous les pays, les cas d’objecteurs absolus, c’est‑à‑dire ceux qui refusent même le service civil, pour qu’ils aient des peines de prison fixes et proportionnelles au service militaire, et non la prison continue comme c’est le cas actuellement.
Dans l’espoir que cette lettre retiendra votre attention, nous vous remercions.
Pour le groupe : Pepe Beunza