Nous l’avons choisie en raison des vives critiques qu’elle nous adresse et du fait que ces critiques portent sur nos quatre derniers cahiers.)]
Du camarade G.P. de Chatenay-Malabry : Je ne suis pas d’accord avec les positions de « Noir et Rouge » n°7/8 sur le Nationalisme. N & R fait une critique favorable des mouvements d’indépendance nationale. Je pense que nous devons absolument nous opposer à ces mouvements retardataires. Comprendre qu’un Algérien soit nationaliste est une chose, approuver son action en est une autre. Les États qui se sont fondés à la suite de révolutions nationales ont tous eu la même structure que les États dominants dans ces pays. Les nations d’Amérique du Sud, d’Asie du Sud-Est ou des pays arabes n’ont pas résolu les questions autrement que les autres États qui auparavant les dominaient. D’autre part il semble que les impérialismes ont intérêt à développer ces nouveaux nationalismes, ce sera de nouveaux débouchés pour eux […].
[…] Le n°9 sur le Parlementarisme et l’Anarchisme est bon. Ce ne sont pas des choses nouvelles qui sont données mais je trouve qu’il est très bien de les redire aujourd’hui.
Le n°10, par contre, me semble très faible. Je trouve que le camarade ayant écrit le premier article est très gentil à l’égard de la classe ouvrière française ; il n’y a pas, non seulement, non-intervention de la classe ouvrière dans la guerre d’Algérie, mas bien acceptation et participation. Il n’y a pas eu de réaction contre cette guerre. Je pense que c’est une folie de voir actuellement la classe ouvrière créer elle même ses conseils révolutionnaires et gestionnaires pour s’engager dans la voie de l’émancipation collective. Aujourd’hui, la classe ouvrière (il faudrait savoir exactement ce qu’elle est et quelles sont ses limites) suit le maître comme elle l’a souvent suivi et, demain, si elle n’est pas contente de celui-là elle en choisira un autre. Depuis 40 ans, il n’y a plus d’éducation ouvrière, 40 ans de stalinisme ont joué leur rôle, la classe ouvrière n’existe pas actuellement en tant que force réelle pour s’occuper des affaires qui l’intéressent. Il est nécessaire, avant de penser à cela, de revoir le problème et de reprendre l’éducation ouvrière à son point de départ. L’héritage du capitalisme ne revient pas nécessairement à la classe ouvrière, il faut que celle-ci avant tout veuille et travaille pour y aboutir. Depuis 40 ans, elle n’a rien fait pour prendre la gestion de l’économie dans toutes les parties du monde. Lorsqu’elle a lutté, ce n’est que pour la défensive et dans des périodes de recul. La classe ouvrière jusqu’ici n’a jamais attaqué l’ordre des choses, elle ne réussira jamais en se contentant de la défensive.
Le n°11 est à mon avis navrant. Pourquoi un numéro spécial sur la gauche ? Je ne pense pas que la classe ouvrière a un point de commun et a un pas à franchir avec cette gauche qu’elle soit radicale, socialiste, communiste, U.G.S. ou autre, la gauche fait partie du système que nous voulons démolir et je suis navré de voir la revue N & R jeter des fleurs à Albert Bayet, homme essentiellement du régime.
En espérant trouver des choses plus intéressantes dans les prochains numéros (je ne demande pas de choses où je suis politiquement d’accord, il est normal que des divergences existent), reçois, etc.
G.P.