La Presse Anarchiste

Du rôle à jouer matériellement dans la Société

Le Pro­grès maté­riel, ain­si que cette pauvre matière si dédai­gnée, qui fait par­tie cepen­dant de la vie et lui donne même toute sa rai­son d’être, est appe­lée mal­gré nous consciem­ment ou incons­ciem­ment à jouer un autre rôle que celui que lui fait jouer l’In­di­vi­du dans tous les domaines, éco­no­mique, moral et social.

Le Pro­grès maté­riel, force natu­relle, source de satis­fac­tion, d’a­bon­dance, et de bien-être, force de choses indé­pen­dante de notre volon­té, l’o­bligent à réa­li­ser insen­si­ble­ment, sans même nous en aper­ce­voir nos dési­rs com­muns — du moindre effort pour la plus grande somme de bien-être.

Le Pro­grès, qui comme les rayons de soleil (non encore cap­té par un moteur quel­conque, ni cana­li­sé d’of­fice par les puis­sants et pri­vi­lé­giés) sans cache-cache, ni secret pro­fes­sion­nel, vient à nous, en nous disant, pre­nez-moi puisque je suis à vous et appelle à suivre une autre direc­tion que celle que vou­draient lui faire conti­nuer tous les demi-dieux pro­tec­teurs d’humanité.

C’est donc à une force de choses et faits natu­rels et maté­riels, qu’ap­par­tient le soin d’é­du­quer et d’o­rien­ter l’in­di­vi­du vers un autre hori­zon que celui qui le pousse vers ces espèces pécu­niaires qui déna­turent, dété­riorent et cor­rompent les plus belles et nobles inten­tions, ain­si que les meilleures volontés.

Cette pauvre matière pos­sé­dant dans son sein une valeur bien plus noble et digne que celle que nous don­nons à nos sem­blables, est obli­gée d’in­fluen­cer l’In­di­vi­dua­liste et l’Ar­ti­san de la Pen­sée, pour cher­cher à le pous­ser à creu­ser dans son roc, un creu­set, un moule, qui ver­ra don­ner libre cours à ces idées de sim­pli­fi­ca­tion, modi­fi­ca­tion et per­fec­tion­ne­ment moral ; qui sont sous la tutelle et entra­vés par toute sorte de cor­po­ra­tions, confré­ries, corps d’é­tats consti­tués, qui en pos­sèdent et en détiennent le mono­pole ; en usent, abusent à un tel point qu’un simple manant d’illet­tré, se demande com­ment devant de telles entraves, le pro­grès peut encore per­cer, se faire jour ?

L’œuvre, l’é­bauche de trans­for­ma­tion des men­ta­li­tés sup­pri­me­ra tous ces grou­pe­ments sociaux, dans les­quels avec toutes sortes de théo­ries, l’on par­vient faci­le­ment à ENVOUTER, FASCINER, HYPNOTISER, les faibles et fidèles numé­ros qui volon­tai­re­ment, béné­vo­le­ment, font la force des intri­gants. et des ambi­tieux ; leur servent de trem­plin, de gens bons à tout faire. Voi­la le résul­tat de toutes ces œuvres, morales et phi­lan­thro­piques qui s’oc­cupent à résoudre le grand pro­blème social.

L’In­di­vi­du n’ayant pu ni su jouer son rôle, consis­tant à lut­ter pour com­battre les erreurs et les imper­fec­tions de la nature et non contre ses sem­blables, ça sera donc à la matière de prendre son droit de lut­ter contre les pré­ju­gés de l’Individu.

L’ar­ti­san de la pen­sée, n’a pas plus à s’at­tar­der ni à s’in­quié­ter du pas­sé que de l’a­ve­nir, SEUL LE PRÉSENT, doit gui­der, orien­ter insen­si­ble­ment ses pas, au fur et à mesure que son ébauche, son tra­vail, en se com­plé­tant, prend sa forme réa­li­sant à peu près son désir.

N° 20. Cha­po­ton, tis­seur, au Cal­vaire, St. Ram­bert sur Loire. (Loire )

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