La Presse Anarchiste

Dieu

Le nom­mé Dieu, c’est toi, Nature,
indif­fé­rente au mal, au bien,
Que rien n’é­meut, qui ne dis rien,
Et dont l’Homme, ta créature,
Subit quelle antique torture !

On t’a­dresse prières, vœux,
Aus­si sté­riles, aus­si creux
Qu’un tour­billon de vent qui passe !
Rien tu ne peux, rien tu ne veux,
O sourd, muet, aveugle Espace !

Mieux aurait, valu le Néant,
Le vide dans tes noirs abîmes,
Que cette pla­nète de crimes,
De guerres se perpétuant,
Dont tes enfants sont les victimes !

Est-ce pour tes félicités
Que par des cal­vaires tu mènes
Les géné­ra­tions humaines
Aux suprêmes atrocités
D’où renaissent les mêmes peines ?

Nos conti­nents ne sont qu’un bois
De ban­di­tismes séculaires,
Où, du haut de leurs vieux repaires,
Des vau­tours, des prêtres, des rois
Tiennent les peuples en leurs serres !

Sur tous les droits exterminés,
Sur toute liber­té qui râle,
Leur Jus­tice règne intégrale !
Il faut, exploi­tés et bernés,
Vous confor­mer à leur Morale !

Sala­riés, Déshérités,
C’est vous, conscients, innombrables,
C’est vous, puis­sances formidables,
Qui dic­te­rez vos volontés
De n’être plus des misérables !

C’est vous, les valets, à genoux
D’un Pos­sé­dant, d’un Chef, d’un Prêtre,
Qui, depuis le pre­mier ancêtre,
Ser­vez, esclaves, c’est vous tous,
Qui régne­rez sans Dieu ni Maître !

Théo­dore Jean

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