La Science — dont certains proclament la faillite et d’autres affirment le triomphe — est un vaste domaine, si vaste qu’il ne peut être examiné attentivement, approfondi pendant le cours d’une existence humaine.
L’homme qui sent en lui le besoin irrésistible de savoir, d’ajouter aux hypothèses connues d’autres hypothèses, plus vraisemblables, plus vastes et plus harmonieuses, de résoudre les problèmes qui depuis des siècles tiennent en haleine tous les chercheurs et intéressent au plus haut point l’humanité, ne pouvant embrasser tout le vaste domaine scientifique, le parcourt en troisième vitesse, c’est-à-dire acquiert des connaissances générales sur toutes les branches et se spécialise ensuite dans celle qui l’attire et pour laquelle il éprouve le plus d’affinité.
Ceci fait, le chercheur, laisse de côté toutes ses idées préconçues, ses préjugés, ses sympathies, ses affinités, et observe, expérimente.
Il interroge les faits, et ne tient compte que de ce que l’observation et l’expérience lui font constater. Il enregistre les résultats, recommence, enregistre à nouveau et répète des centaines de fois les mêmes expériences, afin de pouvoir tirer une conclusion qui résume scrupuleusement tout son travail.
La méthode employée est toujours la même : du complexe revenir au simple, à l’unité.
Et l’expérience a montré que là était la bonne route.
En histoire naturelle, les innombrables espèces encore existantes, et les plus innombrables encore qui ont disparu au cours des myriades de siècles qui nous ont précédés, proviennent vraisemblablement d’un type unique, qui dans le temps, selon les lieux, le climat et les circonstances, s’est transformé en une multitude d’espèces différentes.
Telle est l’hypothèse qui s’oppose aujourd’hui, grâce aux recherches de quelques naturalistes, au dogme intangible de la création de toutes les espèces.
En chimie, en physique, également la méthode ramène toujours tout au simple.
Lumière, chaleur, son, électricité, etc., tout cela vibrations de corpuscules ayant des mouvements sinusoïdaux de longueurs d’onde très différentes.
Matière et force, deux formes différentes mais inséparables de l’élément unique que nous ne connaissons que sous le nom d’atome, mais qui est le point de départ de tous les corps.
Dans toutes les branches, comme nous le verrons plus tard, les théories scientifiques ont bouleversé les croyances naïves, ou les explications mensongères.
Mais la bataille fut rude. Tous les savantasses honorés, décorés étaient pour les anciennes formules. L’ironie était La première arme employée contre les initiateurs. Quand elle ne suffisait pas le mensonge et la calomnie accouraient à son secours. Si, malgré tout, le nouvel Archimède ne fuyait pas la lutte, la répression gouvernementale et religieuse usaient de leur pouvoir et de leurs prérogatives.
Le véritable savant qui veut démasquer les erreurs, renverser les préjugés est presque toujours une victime de l’ordre social de l’époque. La misère est son lot, et la persécution le poursuit.
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L’Anarchisme, dans le domaine philosophique, économique, sociologique, emploie pour solutionner les nombreux et difficiles problèmes sociaux, la même méthode que la science : du complexe au simple.
Les Anarchistes ont remarqué les effets désastreux du monde social actuel, ils sont remontés des effets aux causes, et ils ont constaté que dans tous les domaines, les effets étaient produits par les mêmes causes : l’autorité…
La chirurgie démontrant avec preuves à l’appui que pour atténuer ou supprimer l’effet, il faut modifier ou supprimer la cause, les anarchistes ne dérogeant jamais aux méthodes des sciences expérimentales déclarent que pour créer le bonheur, il faut supprimer l’Autorité sous toutes ses formes.
Les gouvernants de chaque pays emploient toute leur activité à faire de la collectivité qu’ils dirigent, une masse passive, obéissante et soumise.
L’individu, ne compte pas, c’est le troupeau qui a de la valeur.
Les Anarchistes toujours en accord avec la Science dénoncent cette imposture.
L’individu, comme l’unité en mathématique, est la cellule sociale. Sans lui, il ne peut y avoir de société.
C’est cette cellule qui, jointe à d’autres, forme la société. Et cette société ne peut être harmonieuse, belle, en parfait état de santé que si chaque individu est sain, bon, juste et beau.
L’individu a droit au bonheur. C’est-à-dire à la liberté de satisfaire ses besoins.
Il se réunit avec d’autres en société pour avoir plus de facilités à obtenir ce bonheur.
La société la meilleure sera donc celle qui lui permettra de satisfaire tous ses besoins.
C’est pour l’existence de cette société que les anarchistes militent et luttent.
Mais cela ne va pas sans risque. La calomnie entre aussi en jeu. La répression, l’emprisonnement sont toujours suspendus sur la tête des libertaires.
Et c’est ainsi que dans leurs méthodes identiques aussi bien que dans la répression qui s’abat sur leurs adeptes, la Science et l’Anarchisme sont sœurs.
L’Anarchisme triomphera parce que la Science lui fournit chaque jour quelques armes nouvelles.
Nous verrons dans les articles qui suivront la vie malheureuse, misérable de presque tous les inventeurs, les chercheurs, les novateurs.
Nous parlerons de leurs travaux ; vous verrez leur vie d’abnégation, de désintéressement et de travail. Vous verrez qu’ils sont bien les frères des vaillants ouvriers de l’Anarchie, qui aussi désintéressés qu’eux vont par tous les temps, malgré toutes les difficultés, annoncer les temps meilleurs.
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