La Presse Anarchiste

Notre nouvelle enquête

La Revue Anar­chiste ouvre une nou­velle enquête des­ti­née, croyons-nous, à un vif succès.

Cette enquête por­te­ra sur le carac­tère impo­sé ou volon­taire du Tra­vail dans le milieu Social qui — la Révo­lu­tion sociale ayant balayé le Capi­ta­lisme — suc­cè­de­ra au milieu actuel.

Il est super­flu de dire que, sous régime bour­geois, cette ques­tion ne se pose pas ; elle est tran­chée : cha­cun sait que, pré­sen­te­ment, le tra­vail est facul­ta­tif pour les pri­vi­lé­giés et obli­ga­toire pour les déshé­ri­tés de la fortune.

La Révo­lu­tion Sociale ayant pour objet et devant avoir pour résul­tat de mettre fin à cette révol­tante inéga­li­té éco­no­mique, il s’agit d’ouvrir un large débat sur le point de savoir si, dans une Socié­té où, la pro­prié­té ayant ces­sé d’appartenir à quelques-uns, tout appar­tien­dra a tous, le tra­vail sera impo­sé ou volon­taire.

Il va de soi que nous n’envisageons pas l’obligation morale dans laquelle tout être valide et en âge de tra­vailler se trou­ve­ra de col­la­bo­rer, sous une forme ou une autre, à l’effort commun.

Cet aspect moral du pro­blème à résoudre est pla­cé en dehors de notre enquête. C’est pour­quoi, dans le but de pré­ve­nir toute équi­voque, nous disons « tra­vail volon­taire ou impo­sé » et non tra­vail facul­ta­tif ou obli­ga­toire.

Cette grave ques­tion a été l’objet des pré­oc­cu­pa­tions constantes des adver­saires du régime capi­ta­liste ; elle a sus­ci­té, d’école à école, les contro­verses les plus pas­sion­nées. Elle est, en effet, d’importance on peut dire capi­tale. Elle met en jeu les deux prin­cipes « Auto­ri­té ou Liber­té » qui dominent tout le pro­blème social et en ins­pirent la solution.

Elle situe, net­te­ment et sur le ter­rain solide des réa­li­tés, la thèse du socia­lisme auto­ri­taire et celle du com­mu­nisme liber­taire ; elle est indis­so­lu­ble­ment liée à toute la struc­ture sociale d’après Révo­lu­tion et la solu­tion qu’on lui donne condi­tionne à la fois les prin­cipes sur les­quels repo­se­ra l’édifice social de demain et les consé­quences pra­tiques qui en découleront.

[|* * * *|]

Dans le but de faci­li­ter à nos lec­teurs les réponses qu’ils dési­re­ront nous adres­ser et pour qu’ils pos­sèdent une com­pré­hen­sion claire de la ques­tion qui leur est posée, nous croyons devoir les invi­ter à réflé­chir mûre­ment, avant que de se pro­non­cer, sur les quelques consi­dé­ra­tions que voici :

Le tra­vail volon­taire, sera pour celui qui vou­dra ne rien faire, le droit de consom­mer comme celui qui tra­vaille­ra. Le tra­vail impo­sé, ce sera, pour celui qui se refu­se­ra au tra­vail, l’interdiction de consom­mer. Ce sera l’application rigou­reuse du fameux pré­cepte : « Qui non labo­rat non man­du­cet », pré­cepte qui se tra­duit ain­si ; « Celui qui ne tra­vaille pas n’a pas le droit de manger. »

Le tra­vail volon­taire, ce sera l’application de cette for­mule : « à cha­cun, selon ses besoins » avec toutes les consé­quences qui s’ensuivent. Le tra­vail impo­sé, ce sera la mise en pra­tique de cette for­mule : « à cha­cun, selon son tra­vail », avec toutes les consé­quences qui en résultent.

Le tra­vail volon­taire, ce sera le droit à la paresse recon­nu, avé­ré ; ce sera l’oisiveté n’exposant l’improductif à aucune répres­sion et lui per­met­tant de vivre maté­riel­le­ment sur le même pied que le tra­vailleur. Le tra­vail impo­sé, ce sera l’oisiveté condam­née, punie ; ce sera le pares­seux voué aux sanc­tions édic­tées par la codi­fi­ca­tion du Travail.

Le tra­vail volon­taire, ce sera le contrat social, repo­sant sur l’adhésion libre de cha­cun et l’entente concer­tée de tous. Le tra­vail impo­sé, ce sera le contrat social repo­sant sur la contrainte exer­cée sur cha­cun et l’impitoyable répres­sion pra­ti­quée, au nom de tous, en ver­tu d’une légis­la­tion du tra­vail minu­tieuse et rigide.

Le tra­vail volon­taire, ce sera le régime de la Liber­té, avec les avan­tages et les incon­vé­nients qu’il com­por­te­ra. Le tra­vail impo­sé, ce sera le régime de l’Autorité, avec les avan­tages et les incon­vé­nients qu’il impliquera.

Ces quelques indi­ca­tions sont des­ti­nées, dans notre esprit, à pro­je­ter sur cette ques­tion — simple à pre­mière vue, mais, à la réflexion, très com­plexe — quelques clar­tés indis­pen­sables à toute réponse pesée, mûrie, judi­cieuse et sans ambiguïté.

[|QUESTIONNAIRE|]

  1. Êtes-vous en faveur du Tra­vail volon­taire ?
    1. Pour quelles raisons ?
    2. Com­ment en conce­vez-vous l’organisation ?
  2. Êtes-vous par­ti­san du Tra­vail impo­sé ?
    1. Pour quelles raisons ?
    2. Com­ment en conce­vez-vous l’organisation ?

L’enquête est ouverte dès à pré­sent. Nous publie­rons dans le pro­chain numé­ro de la Revue Anar­chiste les réponses qui nous seront par­ve­nues avant le 15 Mai.

Nous prions les auteurs de ces réponses d’être aus­si brefs que pos­sible (tout en expri­mant tout ce qu’ils auront d’intéressant et d’essentiel à dire) afin qu’il nous soit pos­sible de publier un grand nombre de réponses.

[/​Sébastien Faure./​]

La Presse Anarchiste