La Presse Anarchiste

Aux patriotes

[|(Suite) [[Voir les nos2 et 3 de l’Idée Ouvrière.]] |]

Ajou­tons à ces chiffres déjà si ter­ri­ble­ment élo­quents, le nombre des vic­times de la bour­geoi­sie lors des sou­lè­ve­ments popu­laires de 1830, 1848, 1852 et 1871. Pour ce der­nier seule­ment, les bour­geois avouent 35 mille victimes.

En Amé­rique, la guerre d’In­dé­pen­dance a coû­té six cents cin­quante mille hommes. Quelles bou­che­ries ! Quelles mon­tagnes de cadavres qui crient vengeance !

Non seule­ment les guerres ont tou­jours été désas­treuses pour les vain­queurs et les vain­cus, mais encore, les géné­ra­tions qui leur suc­cèdent ont à en sup­por­ter les charges écra­santes ; en 71, la dette natio­nale était en France de douze mil­liards cent trente-deux mil­lions, sept cents soixante-huit mille sept cents francs, et en 1881, de vingt-trois mil­liards„ quatre cents trente-sept mil­lions, huit cent quatre-vingt deux mille. Soit en aug­men­ta­tion de onze mil­liard trois cents cinq mil­lions, cent treize mille trois cents francs.

Allons, cama­rades ! Vous qui nous lisez, opi­ne­rez-vous tou­jours rai­son à ces sinistres far­ceurs qui vous disent que vous devez éle­ver vos enfants avec le res­pect de la loi et l’a­mour de la patrie ? Ne vous ren­drez-vous donc pas compte que s’ils ont fait sem­blant de chas­ser dieu de l’é­cole, ce vieux grin­cheux rébar­ba­tif, ils l’ont rem­pla­cé par la patrie meur­trière, tout aus­si détes­table que ce vieux cro­que­mi­taine démo­dé ? En effet, de par la loi et au nom de la patrie, ne vous dépouillent-ils pas du peu que vous gagnez, par de lourds impôts ? Le moindre objet néces­saire à l’exis­tence ne paie-t-il pas des droits exces­sifs ? avec com­bien de peine arri­vez-vous à mettre les deux bouts ensemble, tout en vous pri­vant, vous et les vôtres du strict néces­saire ? Vou­lez-vous donc que vos enfants vivent dans la même situa­tion pré­caire et détes­table que vous ? s’é­chi­nant du matin au soir pour engrais­ser un tas de fai­néants qui ne font rien de pro­duc­tif et cepen­dant vivent gras­se­ment, roulent en voi­ture, habitent les palais les plus somptueux.

Alors ; envoyez les donc a l’é­cole apprendre ces chants stupides :

II est une mère chérie
Que tous nous devons respecter
Cette mère c’est la Patrie etc.

ou bien encore :

Mou­rir pour la Patrie

Enrô­lez-les donc dans dans les socié­tés, inven­tées par les bour­geois, afin de para­ly­ser l’é­lan des jeunes vers la liber­té, qui est le com­plé­ment de l’homme réel­le­ment digne de ce titre. Enrô­lez-les dans les bataillons sco­laires, socié­tés de tir ou de gymnastique.

Mais plus tard, n’al­lez pas vous plaindre si, quand ils auront vingt ans on vous les enlève armant, leurs bras contre d’autres jeunes gens qu’il n’au­ra jamais vus, éga­le­ment enle­vés à leur famille, qui ne leur auront jamais fait aucun mal, mais que l’on aura habi­tués à consi­dé­rer comme enne­mis sous le pré­texte qu’ils sont nés sous une autre latitude.

Ne vous plai­gnez pas, si après un com­bat achar­né, san­glant, il rentre au domi­cile pater­nel infirme. Ne vous plai­gnez pas si on vous le rap­porte ensan­glan­té ! Mort !

Vous aurez récol­té ce que vous aurez semé ; il sera mort pour sa mère, la Patrie. Vic­time des bour­geois que vous aurez écou­tés, soutenus.

Mort vic­time de vos préjugés.

Erra­ta. — Une omis­sion glis­sée dans le der­nier numé­ro, nous a fait ne pas noter :

1°pour les frais de guerre 1870 – 71, pour la france, 5 mil­liards d’in­dem­ni­té à la Prusse,

2° Lire au lieu du chiffre don­né dans le der­nier numé­ro, comme frais de l’oc­cu­pa­tion, inté­rêts des sommes dues, frais d’emprunt, etc. etc. : un mil­liard, sept cents soixante-neuf mil­lions, deux cents vingt-neuf mille francs.

3° Cent soixante-neuf mil­lions, cinq cents dix-huit mille francs pour l’ap­pro­vi­sion­ne­ment de Paris après le siège que nous avons éga­le­ment omis de men­tion­ner dans notre der­nier numé­ro, ce qui du reste ne change en rien le chiffre don­né comme total qui est exact

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