La Presse Anarchiste

Essai d’organisation interne d’un groupe

Anar­chie veut dire sans gou­ver­ne­ment, sans auto­ri­té mais en aucun cas sans orga­ni­sa­tion. Cette pré­ci­sion n’est pas inutile car même au soin des mou­ve­ments anar­chistes cette concep­tion n’est pas très claire. Nous vou­lons créer et nous lut­tons pour qu’une socié­té nou­velle et plus juste soit éta­blie mais toute socié­té pos­sède une orga­ni­sa­tion qui lui est propre. Celle-ci peut être de dif­fé­rent type : auto­ri­taire, démo­cra­tique ou fédé­ra­liste. Une socié­té de type liber­taire sera orga­ni­sée et il ne suf­fit pas de dire qu’elle sera anar­chiste, encore faut-il en construire. Les struc­tures qui lui don­ne­ront vie et forme.

C’est dans ce but que nous pro­po­sons ce pro­jet orga­ni­sa­tion­nel des groupes. Sans doute est-ce un tra­vail mineur devant l’am­pleur des tâches qui attendent tous les anar­chistes révo­lu­tion­naires. Je pense que les groupes, repré­sen­tant la plus petite uni­té col­lec­tive, doivent par leur orga­ni­sa­tion être la pré­fi­gu­ra­tion du monde nou­veau. Le Mou­ve­ment liber­taire doit, par une orga­ni­sa­tion pra­tique, mon­trer la réa­li­té de l’Anarchie.

Avertissement

Pour le pre­mier-numé­ro de ce bul­le­tin, nous abor­de­rons l’or­ga­ni­sa­tion des groupes. Il est bien enten­du qu’il ne s’a­git pas d’im­po­ser une forme d’or­ga­ni­sa­tion aux seins des groupes mais sim­ple­ment de donne une base de départ pour les uns, et de per­fec­tion­ne­ment pour les autres. D’autre part, je démon­tre­rai dans le pro­chain numé­ro que lorsque des groupes dési­rent consti­tuer une région, il est pré­fé­rable pour des ques­tions d’ordre pra­tique que les groupes s’or­ga­nisent sur des mêmes bases.

Mais avant de ren­trer dans le détail voyons ce qu’il doit être et ce qu’il ne doit pas être, car nous enten­dons sou­vent des cama­rades qui recons­ti­tuant un nou­veau groupe, par­ler d’une nou­velle expé­rience. Alors ? n’est-il pas temps de trou­ver une solu­tion ou tout au moins une base de départ qui sera peut-être matière à dis­cus­sion pour l’a­ve­nir. Peut-être est-il utile de faire un sché­ma pour que ces groupes qui se consti­tuent res­tent en vie.

Ce qu’il doit être

- Un lieu de for­ma­tion ou l’on construi­ra de véri­tables mili­tants, où l’on construi­ra l’homme de combat.
– Un lieu d’in­for­ma­tion ou l’on ne s’i­sole pas de ce qui se passe autour de soi, dans le Mou­ve­ment comme dans le Monde.
– Un organe de ges­tion où on s’in­té­resse aux groupes non seule­ment pour les fré­quen­ter, mais pour les ani­mer, les amé­lio­rer, y appor­ter sa pierre.
– Un milieu soli­daire basé sur la fraternité.
– Un groupe de loi­sir par des sor­ties communes.
– Un organe de rayon­ne­ment que l’on a envie de faire connaitre à d’autre comme on veut leur faire connaitre ce qu’on a appris et découvert.

Ce qu’il ne doit pas être

- Un simple point de chute où l’on conti­nue à venir parce qu’on ne sait pas quoi faire de mieux pour pas­ser le temps.
– Un simple groupe de copains où l’on prend du bon temps sans se pré­oc­cu­per ni du tiers ni du quart, ni des res­pon­sa­bi­li­té, ni d’or­ga­ni­sa­tion, ni du mou­ve­ment, ni d’au­cune ques­tion tou­chant à quoi que ce soit, inté­rieur ou extérieur.
– Un cénacle de spé­cia­listes ne jurant que par des acti­vi­tés bien déterminées.
– Une agence matri­mo­niale où l’on vient seule­ment pour cher­cher une fille ou dra­guer un garçon.
– Un lieu de pas­sage où ceux qui viennent ne reviennent pas parce qu’on ne s’est pas occu­pé d’eux, ou trop.

De quoi vit un groupe

- D’un local entre­te­nu et agréable (Dans la mesure du possible)
– Des pro­grammes pré­pa­rés à l’a­vance et éla­bo­rés par des com­mis­sions et ensuite dis­cu­tés ensemble.
– D’é­tudes et d’ac­ti­vi­tés variées, de dis­cus­sions pas­sion­nées, voire véhé­mentes, mais cor­diales.- De la par­ti­ci­pa­tion de cha­cun aux tâches maté­rielles et d’un par­tage effec­tif des res­pon­sa­bi­li­tés aux­quelles on accou­tume les nou­veaux venus. (Je repar­le­rai de ce pro­blème quand j’a­bor­de­rai la struc­tu­ra­tion du groupe).
– De sor­ties déten­dues avec un mini­mum de pré­pa­ra­tion, et de contact avec d’autres groupes qui élar­gissent l’horizon.

De quoi il meurt

- Des his­toires personnelles.
– De l’hor­reur des efforts.
– De la trans­for­ma­tion en ami­cale de couples.
– Du non-par­tage des tâches et du vieillis­se­ment sur place des responsables.
– De leur manque d’ini­tia­tive.
– De la recherche abso­lue des « com­pé­tences » au détri­ment de la par­ti­ci­pa­tion de tous et des expé­riences personnelles.
– De l’i­so­le­ment par rap­port aux autres groupes.

Pour conclure, je dirai que le groupe anar­chiste révo­lu­tion­naire doit-être un véri­table orga­nisme bio­lo­gique qui pour réa­li­ser son but doit pos­sé­der comme tout être vivant, une per­son­na­li­té (L’Es­prit), des fonc­tions dif­fé­rentes (Les res­pon­sa­bi­li­tés ), en un mot qui doit être orga­ni­sé. Peut-être trou­ve­ra-t-on que ces consta­ta­tions sont bien élé­men­taires Elles sont simples dans leur appli­ca­tion, mais com­bien leur appli­ca­tion néces­site de pré­oc­cu­pa­tion, d’at­ten­tion et de persévérance.

Causes de formation d’un groupe

Un groupe est com­po­sé d’hommes qui s’u­nissent, en vue d’une action, leur but c’est l’ef­fi­ca­ci­té de l’action.

Il y a deux formes d’action :
– L’ac­tion directe ou concrète.
– L’ac­tion indi­recte ou abstraites.

Le but de l’ac­tion directe est de peser sur les évè­ne­ments dans l’im­mé­diat. L’ac­tion indi­recte est diri­gée vers la recherche et l’é­tude. Ces deux actions ne sont ni paral­lèles, ni diver­gentes : elles sont com­plé­men­taires. La recherche pré­pare l’ac­tion et l’ac­tion influe sur la recherche. Autre­ment dit : la théo­rie pré­pare la pra­tique qui à son tour véri­fie la théo­rie et la com­plète ou la cor­rige au besoin.

Organisation interne d’un groupe

Le groupe doit être au mini­mum com­po­sé de deux commissions 

a) Com­mis­sion admi­nis­tra­tive et culturelle.

b) Com­mis­sion de propagande,

Com­mis­sion admi­nis­tra­tive et culturelle

Son tra­vail est de :
– Rece­voir et répondre au courrier.
– S’oc­cu­per de la trésorerie.
– Ren­con­trer les sym­pa­thi­sants et d’en­tre­te­nir des contacts avec eux.
– De se faire connaître auprès des orga­ni­sa­tions amies ou des for­ma­tions politiques.
– Infor­mer les autres groupes des acti­vi­tés pré­vues qui pour­raient être faites com­mu­né­ment (Confé­rences, sor­ties mani­fes­ta­tions diverses etc.. )

com­mis­sion de propagande
– Fait et pro­pose les pro­jets de tracts et d’af­fiches et après accep­ta­tion par le groupe, s’oc­cupe de sa réa­li­sa­tion pratique.
– Pro­cure le maté­riel néces­saire au collage.
– Orga­nise les ventes des jour­naux, des col­lages, des manifestations.
– Orga­nise à l’é­chelle du groupe une bibliothèque.
– Et est res­pon­sable des archives.

Il est cer­tain que d’autres com­mis­sions peuvent être créées sui­vant les acti­vi­tés du groupe. Si par exemple le groupe édite un jour­nal à l’é­chelle locale une com­mis­sion du jour­nal sera créée pour sa réalisation.

Exemple d’organisation d’une conférence

La com­mis­sion de pro­pa­gande pro­pose d’or­ga­ni­ser une confé­rence avec sujet et orateur.

Le groupe accepte.

Tra­vail de la com­mis­sion de propagande
– Écrit au confé­ren­cier pour affir­ma­tion. Confirme le lieu, l’heure, la date et le sujet.
– É dite des affiches et tracts. Fait pas­ser des com­mu­ni­qués dans dif­fé­rents journaux.
– Orga­nise le col­lage et les dis­tri­bu­tions de tracts.
– Pré­voit pour le jour de la confé­rence, une librai­rie et du maté­riel de pro­pa­gande pour le groupe.

tra­vail de la com­mis­sion d’ad­mi­nis­tra­tion et culturelle
– Écrit aux sym­pa­thi­sants, aux autres groupe du mou­ve­ment de la région.
– Pré­voit un magné­to­phone et tout autre maté­riel pour la bonne marche de la conférence.

Il est évident que tous les membres par­ti­cipent aux tâches col­lec­tives (col­lage par exemple). Les com­mis­sions font à chaque réunion un rap­port de leurs acti­vi­tés. Tout indi­vi­du n’é­tant pas en accord avec l’ac­tion envi­sa­gée a le droit. de refu­ser de col­la­bo­rer. Dans ce cas la com­mis­sion dont il fait par­ti devra assu­rer le tra­vail dont il était chargé.

Voi­là comme nous conce­vons l’or­ga­ni­sa­tion d’un groupe. Cette concep­tion est très simple, des amé­lio­ra­tions pour­ront y être appor­tées, elles le seront si chaque indi­vi­du déci­dé d’a­gir se fixe pour but l’ef­fi­ca­ci­té de son action.

[/​Richard Per­ez./​]

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