La Presse Anarchiste

L’imprimé , la scène, l’écran

Wit­ch­craft and black magic, by Mon­tague Sum­mers – with 24 illus­tra­tions (Rider, Lon­don, in‑8°, 228 p. 28 sh. net).

M. Mon­tague Sum­mers, qui est un spé­cia­liste en la matière, vient de publier un ouvrage sur la Sor­cel­le­rie et la Magie noire qui fera époque en cette période trou­blée, non point à cause de sa docu­men­ta­tion, mais parce qu’il croit en la Sor­cel­le­rie et en la Magie. Il est agréable de se mesu­rer avec un adver­saire convain­cu dans ses opi­nions, qui regrette qu’on ne brûle plus les sor­cières, accepte comme du bon pain toutes les his­toires col­por­tées ou racon­tées par des auteurs aus­si fana­ti­sés que lui, dont pas un seul moment il ne met en doute la bonne foi. M. M. Sum­mers croit à l’es­prit du Mal, au diable comme enti­té per­son­nelle, à sa pré­sence aux Sab­bats, aux pactes pas­sés avec le démon, aux esprits fami­liers, aux « sorts », aux gri­moires, à l’en­voû­te­ment au mau­vais œil. Il n’y a pas de Magie Blanche pour lui, la Franc-Maçon­ne­rie n’est qu’une suc­cur­sale de la firme Satan et Cie, et les astro­logues et médiums des agents de l’en­fer. La sor­cel­le­rie, le sata­nisme, le démo­nia­lisme est aus­si vivant de nos jours, aus­si flo­ris­sant qu’il l’é­taient au Moyen-Âge ou au temps des Caglios­tro des Caglios­tro et des St. Ger­main. Depuis un quart de siècle la reli­gion de la mali­gni­té, de la malice, du Mal en un mot, s’é­tend sur la terre entière. Le culte infer­nal recrute dans chaque pays un nombre consi­dé­rable d’adhé­rents. Jadis, les Euro­péens les plus sages et les plus avi­sés com­bat­taient par des lois appro­priées les ravages de cette peste. Le point de vue de l’au­teur est celui des indi­gènes afri­cains ou négro-amé­ri­cains : « Si tu ren­contres un sor­cier, ôte-lui la vie. Son exis­tence est incom­pa­tible avec l’ordre public ». Ne pas par­ta­ger cette opi­nion est la néga­tion de toute jus­tice et de toute tolérance.

Au point de vue docu­men­taire, M. Mon­tague Sum­mers connait tous — ou à peu près tous — les livres ou manuels de sor­cel­le­rie. Le Demo­no­ma­nia, le Mal­leus Male­fi­ca­rum n’ont pas de secret pour lui et je ne puis citer les ouvrages fran­çais, anglais, alle­mands, ita­liens et autres auquel il se réfère. On reste stu­pé­fait devant le nombre de trai­té recueillis par l’au­teur du volume. Cepen­dant, je crois que M. Mon­tague Sum­mers se laisse entraî­ner plus loin qu’il ne convien­drait quand il englobe cer­taines mani­fes­ta­tions comme les Hell fire Clubs (Clubs du feu de l’en­fer) dans le Culte Sata­niste. Nous pen­sons, nous, que les fameux moines de l’ab­baye de Med­men­ham avaient tout sim­ple­ment pour but de se livrer a des expé­riences éro­tiques en com­mun, raf­fi­nées, selon eux, et, en tous cas, sor­tant de l’or­di­naire, c’est ce que démontrent les livres, gra­vures, tableaux obs­cènes, por­no­gra­phiques décou­verts dans l’Ab­baye. Les autres « Hell Fire Clubs » ont pro­ba­ble­ment été créés par des débau­chés 100% qui tenaient à s’en­tou­rer de mys­tère et à éloi­gner les intrus en se pla­çant sous le signe de l’Ange des Ténèbres. Ceci dit, on ne peut nier qu’il y ait eu des « Messes Noires » célé­brées un peu par­tout depuis un temps rela­ti­ve­ment récent ; si dans les Uni­ver­si­tés anglaises, ç’a été le cas, le fait n’est pas en faveur de l’en­sei­gne­ment qui y est dispensé.

Il fau­drait pas­ser au crible d’une cri­tique ser­rée les faits pré­sen­tés par l’au­teur. En résu­mé, qu’ont obte­nu ou accom­pli les sor­ciers ? Voi­là ce qu’il fau­drait éta­blir. Ils se sont fait craindre, redou­ter, ont peul-être réus­si quelques phé­no­mènes de lévi­ta­tion, mais en ce qui les concerne per­son­nel­le­ment ? Leur « Maître » n’a pas empê­ché des mil­liers de ces mal­heu­reux illu­mi­nés ou illu­sion­nés de rôtir sur les bûchers. ou d’être pen­dus aux gibets. Quant à l’ef­fi­ca­ci­té des « sorts », je crois qu’une bonne hygiène des étables ou écu­ries, un sérieux trai­te­ment des cultures ren­draient les coïn­ci­dences de plus en plus rares, puisque coïn­ci­dences il y a eu, parait-il.

Wit­ch­craft and Black Magic contient d’in­té­res­sants ren­sei­gne­ments sur l’Obeah, la Magie. des Antilles, pra­ti­quée à la Jamaïque, etc., et ori­gi­naire sans doute de l’A­frique. L’i­dée fon­da­men­tale est tou­jours de se rendre favo­rables les puis­sances occultes afin de nuire au pro­chain. Les céré­mo­nies magiques sont entou­rées de mys­tère, inter­dites aux non-initiés.

Il court toutes sortes de légendes concer­nant l’O­beah, selon des ouvrages récents. Ses adeptes croi­raient que le sang dis­til­lé par le cœur d’un petit enfant blanc est apte à gué­rir cer­taines mala­dies graves. Dans leurs réunions, ils absor­be­raient du rhum mélan­gé à du sang humain, etc. Il y a beau­coup d’a­na­lo­gie entre 1’Obeah et le Vau­dou. Contre l’a­depte de l’O­beah se dresse l’a­depte du Mial qui pré­tend défaire ce que l’autre a fait, ce qui n’empêche pas que le remède soit sou­vent pire que le mal. La loi punit assez sévè­re­ment les adeptes de l’O­beah lors­qu’on par­vient à les iden­ti­fier. Les juges jamaï­cains ne plai­santent pas à ce sujet.

L’ou­vrage de M. Mon­tague Sum­mers ren­ferme 24 illus­tra­tions, repro­duites en géné­ral d’ou­vrages datant des 15e et 16e siècles, sor­ciers et sor­cières par­tant pour le Sab­bat, pié­ti­nant la croix, jurant allé­geance au démon ; ado­ra­tion du Malin, bap­tême inter­nal ; faits de lévi­ta­tion ; repré­sen­ta­tion d’un Sab­bat, etc., elles nous per­mettent de nous rendre compte des idées de nos ancêtres sur la sor­cel­le­rie et ses adeptes.

[/​E. Armand/​]

Doro­thy Hoog : The Moral Chal­lenge of Gand­hi ― A Plea for unders­tan­ding India – (Kitab Mahal, Alla­ha­bad). (Le défi moral de Gand­hi – Plai­doyer pour la com­pré­hen­sion de l’Inde).

Le pre­mier de ces livres est basé sur les écrits et les dis­cours de Gand­hi depuis le début de la guerre. Le second s’ef­force de démon­trer que les ensei­gne­ments de Gand­hi sont, mora­le­ment et éthi­que­ment, supé­rieurs à toutes les autres idées de paix. Il est temps de mettre un terme au gon­fle­ment de Gand­hi, car il n’est pas plus en mesure d’ins­tau­rer la paix que n’im­porte quel autre homme d’É­tat. L’ère du culte gand­histe est révo­lue, tant dans l’Inde qu’ailleurs, car son Paci­fisme dépend, de l’É­tat et ne se conçoit pas hors de lui. Gand­hi n’est plus qu’un poli­ti­cien d’en­ver­gure, un homme d’É­tat, qui vit et se meut par­mi ses pareils, par la pen­sée, par la parole, par l’ac­tion. Il n’a jamais été un puc­co (pur) paci­fiste et n’a pas la moindre idée de la façon dont le Paci­fisme pour­rait être ins­tau­ré, bien qu’en temps et hors de temps, il parle d’Ahim­sa et de Paix. Il ne sait que répé­ter ces paroles, comme le font les autres hommes d’É­tat et poli­ti­ciens. Quand il se fait mous­ser dans des livres et dans son heb­do­ma­daire hari­jan, pour­quoi les autres s’y asso­cie­raient-ils ? Qu’on le laisse soi­gner seul sa publi­ci­té. Le Paci­fisme ne peut être l’af­faire des États, mais du peuple. Les États et leurs sou­te­neurs sont des hypo­crites quand ils parlent d’A­him­sa et de la paix. La vio­lence est l’es­sence de tout État, y com­pris l’É­tat gand­histe. Même sons l’é­gide gand­hienne. Même à Ahme­da­bad, Gand­hi n’est par­ve­nu à ins­tau­rer le paci­fisme nulle part, et il n’y par­vien­dra pas, tout en disant qu’il le fera. Tant qu’il ne fera qu’en par­ler, sans le réa­li­ser, il conser­ve­ra sa répu­ta­tion, mais quand la paix qu’il pré­co­nise, — sa paix — advien­dra, tout le monde le mau­di­ra. Je pense que c’est perdre son temps que d’é­crire sur Gand­hi et de lire les ouvrages publiés sur lui de temps à autre. Il vaut mieux res­ter silen­cieux que de se joindre à ceux qui louent un oracle qui perd son reten­tis­se­ment. Il y a trop de gand­hisme dans l’Inde. 

[/​M. Acha­rya/​]

Mar­cel Mar­ti­net : Flo­ri­lège Poé­tique – com­po­sé par Vio­lette Rie­der, illus­tré par Gas­ton Pas­tré (Ed. « L’A­mi­tié par le livre ».)

Mar­cel Mar­ti­net est l’une de ces pures figures qui ne s’en­li­sèrent pas dans la boue de la poli­tique et que l’es­prit d’ar­ri­visme n’ef­fleu­ra jamais. Aus­si sommes-nous heu­reux de le retrou­ver dans ce court choix de ses poèmes, où il se montre tel qu’il fut de tous temps.

Dési­rez-vous quelques extraits ? En voici : 

Du Droit des Gens

« L’in­cen­die gagne, bonnes gens,
Et la bête lâchée ravage
Au mépris des règles du jeu,
Au delà des bornes prescrites,
On tue les bles­sés et les femmes,
Ou mutile les prisonniers,
On affame les petits enfants,
Alors vous sur­sau­tez, Tartufes,
Et vous criez avec effroi :
Halte-là, ce n’est plus la guerre,
Ce crime n’est plus patenté,
Voi­ci les fron­tières du crime,
Déli­mi­tées par nos décrets,
Ce n’est qu’à l’in­té­rieur du cercle
Qu’est reniée l’humanité… »

De Départ

« Une rose, une seule rose
Et le ter­reau qui la nourrit
Four­millait d’êtres et de choses
Que pour fleu­rir elle a détruits.

Dans sa féro­ci­té sereine
Elle est celle qui a raison
Puis­qu’elle est belle et son haleine
Abat les murs de ta prison.

Res­pire-la, penche sur elle
La han­tise de ta douleur
Et cette dou­leur éternelle
Fon­dra sous sa brise de fleur.

Amour qu’un par­fum recompose,
Il n’est plus d’ombre ni d’hiver.
Une rose, une seule rose
Tu peux accep­ter l’univers. »

Enfin Poé­sie :

Petit com­pa­gnon grain de blé
Est-ce ta joie, est-ce ta joie
Broyé sous les meules de grés
De deve­nir farine ?

Grain de rai­sin, grain de raisin
Gre­nat ou perle blonde aux vignes
Grain de rai­sin sous le pressoir
Est-ce ta joie, est-ce ta joie
De deve­nir bon vin ?

Et toi vieux cœur tant écrasé
Vieux cœur qui tant aimait la vie
Est‑c ta joie de devenir
Poé­sie, poésie ?

Vous serez d’a­vis comme moi qu’on a bien fait d’é­di­ter de Florilège.

Marc Lan­val : Le conflit conju­gal (Édi­tions du Lau­rier, 2527 rue des Alliés, Bruxelles)

En atten­dant un exa­men de ce volume, on trou­ve­ra, dans ce fas­ci­cule, un extrait com­men­té du der­nier cha­pitre : « Com­ment meurent les Couples ».

Edgard Pesch, proff. de psy­cho­lo­gie : L’exis­ten­tia­lisme, essai cri­tique (30 fr., chez L’au­teur, 19,. r. de l’At­las, Paris 19e).

Étude conscien­cieuse de la doc­trine pro­pa­gée par J.-P. Sartre. Il fau­dra reve­nir sur ce tra­vail qui mérite d’être lu et médi­té par tous ceux qui s’in­té­ressent à la phi­lo­so­phie contemporaine.

Léo­nid Andren­ko : Le pro­blème de la mort (Ed. de l’au­teur, Sigmaringen).

Félipe Alaiz : Las Costas de la Penin­su­la Ibe­ri­ca, Cultu­ra melo­di­ca (nos25 et 27, « Edi­ciones Tier­ra y Libertad »

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Citi­zen Kane – Voi­là un film aux péri­pé­ties dif­fi­ciles à suivre, m’a-t-on décla­ré de plu­sieurs côtés. Évi­dem­ment, cela nous change du pro­to­cole auquel les films ordi­naires sont sou­mis. La tech­nique est autre et l’ac­com­pa­gne­ment musi­cal dif­fère de l’ha­bi­tuel. Il s’a­git de l’his­toire d’un citoyen amé­ri­cain, par­ve­nu à de hautes des­ti­nées, et qui a conser­vé, mal­gré ses suc­cès et ses revers, un secret d’en­fance. Per­son­na­li­té trou­blante, qui appa­raît à ceux qui l’ont connu et appro­ché, tan­tôt comme un grand homme qui n’a pu don­ner sa mesure, tan­tôt comme un. égoïste, tan­tôt comme un auto­ri­taire. C’est un filin à voir. 

[/​E. A./]

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