À tous les syndicats autonomes !
À un moment tragique de l’histoire du syndicalisme révolutionnaire français, les organisations signataires de cette convocation et de ce manifeste, celles qui sont restées fidèles à la doctrine de notre mouvement ouvrier, qui croient à l’émancipation du prolétariat par l’action syndicale et exclusivement par elle, viennent s’adresser à vous.
Elles vous demandent de prendre les décisions courageuses, viriles et hardies qui peuvent, seules, permettre d’assurer la réorganisation, le redressement et la continuation du mouvement syndicaliste libre et indépendant.
Pour ce faire, la Commission désignée par les organisations syndicales intéressées vous prie très instamment de prendre, avec elle, des responsabilités graves, mais inéluctables.
Elle vous dit carrément :
Il est inutile de retracer ici les phases douloureuses de l’histoire syndicale de ces six dernières années. Vous les connaissez, hélas ! Vous avez vécu cette histoire au jour le jour.
Toutefois, nous nous permettons de vous rappeler que les deux Congrès confédéraux qui se sont tenus à Paris, en août 1925, ont démontré, par l’attitude des deux C.G.T., l’impossibilité d’unir organiquement les trois fractions du mouvement syndical français.
La Conférence interconfédérale qui les suivit immédiatement — dont les décisions furent violées, aussitôt prises, par la C.G.T.U. — confirma cette impossibilité.
L’une et l’autre des deux C.G.T., œuvrant
La C.G.T., appuyant son action sur la thèse erronée de l’intérêt général, fait tous ses efforts pour sauver la bourgeoisie démocrate, d’ailleurs aussi impuissante qu’elle à résoudre les difficultés du moment.
En fait, la C.G.T. est devenue, par ses glissements successifs hors du cadre du syndicalisme, un «
En dépit de ses affirmations, Jouhaux est aujourd’hui un homme d’État. Il n’est plus, il ne sera jamais plus un militant ouvrier.
La C.G.T.U., elle, ne vise qu’à installer au pouvoir le parti qui la dirige. Son action démagogique, révolutionnaire en paroles, mais presque toujours platement réformiste en fait, sa pénétration dans les organismes administratifs du pouvoir, sous le prétexte de ne pas y laisser s’y installer les réformistes, lui ont aliéné les sympathies des travailleurs. Nombreux, très nombreux, sont ceux qui n’ont aucune confiance dans l’action des partis politiques, tous partisans de l’État, tous assoiffés de domination, tous convaincus de la suprématie des « élites » sacrées telles par elles-mêmes.
L’abdication totale de la C.G.T.U. entre les mains du Parti communiste empêche cet organisme de grouper tous les travailleurs. Son action éloigne d’elle, un peu plus chaque jour, ceux qui mirent leurs espoirs en sa naissance.
Il est donc évident que, par les buts qu’elles poursuivent, ni la C.G.T., ni la C.G.T.U. ne peuvent recueillir l’adhésion des syndicalistes qui veulent réaliser la libération des travailleurs et non leur asservissement à de nouveaux maîtres.
Le divorce est donc complet et définitif entre les trois fractions du syndicalisme. Divorce matériel et idéologique.
L’unité d’action, après l’expérience tentée en décembre 1925 par le
Il faut d’ailleurs, à ce sujet, avoir la franchise de dire toute la vérité. L’Unité possible en temps de paix sociale, en période normale, sur l’action strictement revendicative quotidienne, cesse de l’être dès l’ouverture de la période révolutionnaire. Et personne ne niera, à moins d’être aveugle, que celle-ci ne soit déjà commencée.
On ne doit donc nullement s’étonner que l’opposition, chaque jour plus fortement affirmée, des buts poursuivis par les réformistes, les communistes et les syndicalistes soit devenue telle, sous la pression des événements, qu’on ne puisse, aujourd’hui, quelque bonne volonté qu’on y mette, coordonner, rassembler des forces qui marchent, avec précision et méthode, vers des buts opposés, dans des directions nettement différentes, suivant leurs desseins particuliers.
Les deux C.G.T. l’ont compris depuis longtemps. Leur organisation actuelle le prouve clairement. Leurs méthodes le confirment.
L’une et l’autre ont fait
L’heure est venue pour les syndicalistes:de cesser d’être des «
Ce sont les deux seules solutions. Il n’y en a pas une troisième.
Les deux C. G T. sont dans la logique. À nous de nous y mettre à notre tour.
Certes, nous savons qu’il est douloureux, pénible, d’abandonner des illusions chères, mais il est préférable de le faire lorsque la vérité éclate que de se ménager de cruelles désillusions pour un peu plus tard.
N’ayant plus rien à attendre d’une Unité condamnée par les faits. les syndicalistes doivent, sans se soucier des gesticulations intéressées de leurs adversaires, sans s’arrêter aux jérémiades de certains de leurs amis insuffisamment édifiés ou rebelles à l’évidence, accomplir les actes nécessaires.
Ils sont, aujourd’hui, et
Nous sommes, nous, convaincus
L’autonomie, solution paresseuse, empirique, égoïste ; l’autonomie, moyen que les faits ont révélé inefficace, impuissant à résoudre l’unité ; l’autonomie, situation provisoire, précaire, qu’elle soit fédérale. corporative ou locale, est
Si elle persiste, elle sera la négation même du syndicalisme. Celui-ci exige une action locale industrielle, régionale, nationale et internationale que l’autonomie rend impossible.
Continuer encore la pratique de l’autonomie, c’est châtrer l’action du syndicalisme ; c’est vouer à la disparition ou à l’enlisement ses organismes dispersés. Nous ne voulons pas cela. Vous ne le voudrez pas non plus.
Pour sortir de cette situation périlleuse, nous pensons qu’il ne s’agit plus, maintenant, de constituer, une fois encore, un vague organisme de liaison, un quelconque appareil de coordination qui, comme le
Dans un pays où le syndicalisme possède encore, en dépit de tout ce qui fut tenté contre lui, de si puissantes racines, cette C.G.T. doit reconquérir rapidement la place qui n’aurait jamais dû cesser d’être la sienne.
La faillite, lointaine peut-être, mais certaine, cependant, des partis et de leurs annexes ― les C.G.T. actuelles,― permettra à la 3e C.G.T. de poursuivre la tâche de la première, celle de 1906.
Il nous est d’ailleurs permis de dire, avec raison, que cette nouvelle C.G.T. ne sera effectivement que la continuation de la première, après la défection des deux autres.
De même, l’
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Pour résoudre tous ces problèmes, pour doter sans délai le syndicalisme d’une arme de combat indispensable, la Commission vous demande de réaliser l’unité des syndicalistes, en assistant au Congrès de tous les syndicats autonomes de France qui aura lieu à Lyon les 15 et 16
Pour préparer la besogne de ce Congrès, dont la durée sera très restreinte, la Commission a pensé qu’il convenait de faciliter la tâche des syndicats, de leur fournir des matériaux de discussion.
C’est ainsi que vous trouverez dans ce numéro de la
- Un projet de statuts commenté.
- Un projet d’organisation régionale et industrielle également commenté.
Bien entendu, la Commission ne vous adresse ces projets ― que les Syndicats de notre tendance avaient accepté à St-Étienne en juillet 1922 — qu’à titre indicatif, de base de discussion et de travail.
Les Syndicats et le Congrès sont souverainement maîtres de leurs décisions.
La Commission a également pensé qu’il était nécessaire de dresser et de vous soumettre un projet d’ordre du jour que le Congrès fixera définitivement à sa première séance, en le modifiant, s’il le désire.
À notre avis, cet ordre du jour pourrait être le suivant :
- Vérification des pouvoirs ;
- Examen de la situation et utilité de constituer une 3e C.G.T. ;
- Statuts et constitution de l’organisation éventuelle ;
- Sa liaison Internationale ;
- Questions diverses.
Les mandats devront parvenir, autant que possible avant le Congrès, au Camarade
La Commission a le ferme espoir que son appel,
Elle convie tous les Syndicats autonomes, quelle que soit leur situation locale, fédérale ou nationale, à assister à ce Congrès. Elle espère que tous tiendront à honneur de s’y faire représenter pour accomplir la grande tâche qui s’impose à eux .
[/La Commission d’organisation
Pour l’U.F.S.A. :
L.
Pour la Fédération des Coiffeurs autonomes :
G
Pour la Fédération du Bâtiment