Selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, les pétroliers ont, en 1970, transporté 135 millions de tonnes d’hydrocarbures, et ont déversé « légalement », c’est-à-dire d’après les mesures de précaution internationale prescrites, 300.000 tonnes de résidus pétroliers dans la Méditerranée. Vingt mille autres tonnes ont été ajoutées du fait des installations portuaires.
C’est ce que disait un rapport récent de l’organisation susnommée. Et le rapport ajoute qu’aujourd’hui, aux abords des ports pétroliers, français, espagnols et yougoslaves, les poissons ne sont plus comestibles.
L’Italie n’est pas citée, mais elle ne saurait rester longtemps à l’être, car les « tankers » vidangent leurs réservoirs en pleine mer, dans deux zones légalement délimitées, une entre l’Italie et la Libye, l’autre au sud-ouest de Chypre.
Et la F.A.O. demande la suppression des zones de vidange.
Mais si on ne vidange pas dans ces zones méditerranéennes, il faudra le faire dans l’Atlantique. Et en quelques années, la pollution aura gagné une bonne partie des zones de pêche. Nous savons déjà que la mer des Sargasses, où les optimistes voyaient un réservoir de ressources alimentaires, est ainsi devenue un dépotoir.
Les ennemis du capitalisme, qui ne voient les problèmes humains qu’à travers une vision des choses qui date d’hier — et qui du reste n’a pas perdu toute sa valeur — diront que ce sont les méfaits du régime social actuel. Et certes, il y est pour beaucoup ; mais nous savons aussi et nous disons que la plupart des ouvriers qui possèdent une voiture tiennent à la conserver ; et que même nombre de socialistes voudraient que tous les ouvriers aient, demain, une voiture, sinon deux.
Mais pour multiplier le nombre des automobiles, il faut de plus en plus de produits pétroliers. Et transporter ces produits à travers les mers et les océans. Comme pour la production de nombreuses industries et la satisfaction de besoins toujours nouveaux, il faut une énergie qui vient de plus en plus du pétrole. Or, tout ceci entraîne cela.
Il ne suffit pas d’accuser — même justement — le capitalisme. Il faut analyser plus loin. Et se demander si la société d’abondance qu’on nous a présentée comme un rêve paradisiaque doit continuer aussi, même dans le socialisme réalisé, à constituer pour nous un but auquel il faut tout sacrifier. Même l’homme.