La Presse Anarchiste

Poèmes pour l’amie

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Mon amour pour toi a con­nu bien des tribu­la­tions… mon amour pour toi !
La tem­pête l’a assail­li, débouchant des con­fins du nord,
la tem­pête et son cortège de pluie, de neige, de grêle,
et de vent — un vent vio­lent, implaca­ble, irrésistible,
un vent couchant sur le sol les géants des forêts profondes,
soule­vant jusques aux nues les vagues des océans,
ensevelis­sant les bar­ques, sub­mergeant les esquifs, désar­tic­u­lant les radeaux,
s’élançant furieux à l’as­saut des digues de granit !

— Mais mon amour pour toi est comme un vais­seau de haut bord.

L’arid­ité s’est abattue sur lui… sur mon amour pour toi.
L’arid­ité : la sécher­esse qui fait un désert du champ le plus fertile,
la chaleur canic­u­laire qui brûle les moissons, dessèche les tor­rents, tord les arbres,
l’at­mo­sphère étouf­fante qui éma­cie le corps et par­chem­ine la peau,
l’in­can­des­cence de l’air qui amol­lit les nerfs et ronge le courage,
l’ardeur solaire qui affole le gosier et provoque l’inex­tin­guible soif,
la fièvre enfin qui con­sume, qui décharne, qui enflamme le sang.

— Mais mon amour pour toi est comme un puits intarissable !

Les épreuves ont fon­du sur lui… sur mon amour pour toi.

L’épreuve sournoise, larvée, ram­pante, occulte ou affichée,
avec ses aux­il­i­aires : le doute, la rancœur, le soupçon,
les soucis, les mal­adress­es, l’in­cer­ti­tude, l’impatience,
la sépa­ra­tion, l’éloigne­ment, les jours mornes, les hori­zons gris,
la méfi­ance, les mots cru­els, l’in­com­préhen­sion, la tristesse,
les voix vom­ies du sub­con­scient, sour­des, hargneuses, dép­ri­mantes toujours…

— Mais mon amour pour toi n’est pas de ceux qui se reprennent…

[/E. Armand/]