À part « le Néo-Naturien » et « les Vagabonds », tout ce qui se publie en province est bien pâle à côté des périodiques libertaires de Paris et son immédiat. Pourquoi ? Les causes sont multiples. En voici quelques-unes.
D’abord, Paris attire. Aussitôt qu’un copain se sent une capacité, soit comme orateur, soit comme écrivain, il file à Paris et s’en va grossir le nombre des « vedettes ». La richesse de Paris fait la pauvreté de la province.
Cependant il reste des valeurs, d’incontestables valeurs dans la province. Pourquoi sont-elles elles méconnues ? Souvent, elles doutent d’elles-mêmes. Et, d’autre part, les organes régionaux ne font rien pour les révéler. En effet, pour ceux-ci, la décentralisation consiste à insister longuement sur les faits locaux, et à négliger les écrits théoriques et d’éducation originaux. Camarades de province (à Germinal, la Révolte, à Terre Libre), voyez si le Libertaire, le Réveil de l’Esclave, etc., agissent ainsi. Ajoutez cette mentalité : l’organe régional est une « filiale » qui se doit de faire une grosse réclame pour l’organe central, celui de Paris… étrange conception du décentralisme.
Enfin, une dernière constatation : de par l’attrait qu’exerce Paris, et de par l’état inférieur des périodiques de province, les camarades de celle-ci font des efforts inouïs pour soutenir les organes de Paris et laissent végéter et quelquefois mourir ceux qui vivent auprès d’eux (n’est-ce pas camarades de la Révolte, n’est-ce pas Vignes). Il y a là un illogisme.
Cette question demanderait à être examinée plus longuement. Il y aurait toute une mentalité nouvelle à créer, mentalité très fédéraliste, et combien plus anarchiste, moins « troupeau » que la présente.
… Des camarades, toujours bien intentionnés, verront dans les quelques lignes ci-dessus, un plaidoyer « pro domo » : ils auront l’excuse de ne me point connaître.
[/Paul Bergeron/]