La Presse Anarchiste

Vagabondages…

À travers livres et plaquettes

Le jeu des départs – Mar­cel Millet. C’est un livre déjà ancien, mais qui demeu­re­ra tou­jours. J’ai aimé pas­sion­né­ment ces vers qui dégagent la nos­tal­gie du conti­nuel chan­ge­ment. Éter­nel vaga­bond, le véri­table et grand poète qu’est Millet m’a plu dans son dou­lou­reux pes­si­misme. Mais il n’est pas tou­jours ques­tion de départ, à preuve ce beau poème « l’orgueil », plein de philosophie.

guide cham­pêtre – G.J. Gros. Voi­ci éga­le­ment des vers d’un bon poète qui aime la cam­pagne en toute sai­son. Et il sait si bien décrire ses sen­sa­tions qu’il nous les fait par­ta­ger avec joie, d’au­tant plus que, pri­son­niers des villes, nous avons si rare­ment le bon­heur de res­pi­rer en pleins champs. Ce petit livre orné de bois de M. Gimond est une jolie édi­tion du Damier.

Le Bol­che­visme – Véra Star­koff. C’est l’a­po­lo­gie de la doc­trine tol­stoïenne, apo­lo­gie enthou­siaste accom­pa­gnée de nom­breuses cita­tions du grand écri­vain russe. En tra­çant suc­cinc­te­ment l’his­toire de la très ancienne Rus­sie, V .Star­koff com­mente l’a­vè­ne­ment du bol­che­visme, auquel elle ne reproche qu’une chose : l’emploi de la vio­lence. Mais elle fait rejoindre le bol­che­visme à la doc­trine de Tol­stoï. « Le tra­vail inté­gral, c’est le fond de la doc­trine com­mu­niste, c’est le tra­vail éclai­ré par l’in­tel­li­gence, et c’est l’in­tel­li­gence éclai­rée par le tra­vail. » Une cha­leu­reuse pré­face de Han Ryner aug­mente la valeur docu­men­taire de ce livre.

Claude Tillier – Confé­rence de Han Ryner. Notre ami Han Ryner n’est pas seule­ment un écri­vain de grand talent, un puis­sant phi­lo­sophe, c’est aus­si un confé­ren­cier émé­rite. En par­lant de Claude Tillier, il sut mettre en relief la valeur de l’au­teur de « Mon oncle Ben­ja­min ». Il par­la de la vie dou­lou­reuse de ce « grand humo­riste » comme il le qua­li­fie, qui « vécut de misère », et qui « est mort de son rire », parce qu’il avait su « rire dan­ge­reu­se­ment ». Tant il est vrai qu’il y eut de tout temps des cuistres et des imbé­ciles qui tuèrent des hommes de bien.

Des diverses sortes d’in­di­vi­dua­lisme. Pour le 10e anni­ver­saire de l’, Han Ryner a pro­non­cé une longue confé­rence, et il était natu­rel qu’il ait choi­si pour sujet : l’in­di­vi­dua­lisme. Tan­tôt railleur et iro­niste, tan­tôt phi­lo­sophe, il sut par­ler des dif­fé­rents indi­vi­dua­lismes inhé­rents à chaque indi­vi­du et quoi­qu’il se défen­dit de vou­loir défi­nir l’in­di­vi­dua­lisme, il sut pour­tant le faire dans le lan­gage ima­gé qui lui est per­son­nel. Ce dut être un régal pour les auditeurs.

Le sub­jec­ti­visme – Han Ryner. Voi­ci un livre qui méri­tait depuis long­temps d’être réédi­té. La mai­son du Fau­con­nier l’a fait avec son habi­tuel sou­ci de belle pré­sen­ta­tion. On retrouve avec plai­sir dans ces pages la haute phi­lo­so­phie de Han Ryner qui plane au-des­sus des mes­quines réa­li­tés de la vie quo­ti­dienne. Tous les grands mots qui forment le fonds de la morale des prêtres de toutes les reli­gions sont pas­sés au crible de son rai­son­ne­ment, tan­dis que sa morale a lui, il la résume en ces mots : « Sois toi-même » comme le pro­clame Epi­tecte, dont il est, si l’on peut dire, le plus fervent disciple.

[/​Georges Mano­va/​]

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